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1 En français dans le texte, Examens de Langue Française

I. ANALYSE LITTERAIRE. Texte : Victor Hugo, Les Contemplations, II, 6, « LETTRE ». Introduction. Somme poétique publiée en 1856, ...

Typologie: Examens

2021/2022

Téléchargé le 08/06/2022

Renaud
Renaud 🇫🇷

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Télécharge 1 En français dans le texte et plus Examens au format PDF de Langue Française sur Docsity uniquement! 1 En français dans le texte Une émission de France Culture en partenariat avec le ministère de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Émission diffusée le 29 août 2020 Objet d’étude : La poésie du XIXe siècle au XXIe siècle Œuvre : Victor Hugo, Les Contemplations, livres I à IV Parcours : Les mémoires d’une âme I. ANALYSE LITTERAIRE Texte : Victor Hugo, Les Contemplations, II, 6, « LETTRE » Introduction Somme poétique publiée en 1856, Les Contemplations se présentent comme le recueil poétique des « mémoires d’une âme », selon la belle formule de la préface. « Ce sont, en effet, toutes les impressions, tous les souvenirs, toutes les réalités, tous les fantômes vagues, riants ou funèbres, que peut contenir une conscience, revenus et rappelés, rayon à rayon, soupir à soupir, et mêlés dans la même nuée sombre. C'est l'existence humaine sortant de l'énigme du berceau et aboutissant à l'énigme du cercueil ; c'est un esprit qui marche de lueur en lueur en laissant derrière lui la jeunesse, l'amour, l'illusion, le combat, le désespoir, et qui s'arrête éperdu « au bord de l'infini ». Cela commence par un sourire, continue par un sanglot, et finit par un bruit du clairon de l'abîme. Une destinée est écrite là jour à jour. » Si l'effet de collection de souvenirs et de sensations est assumé par le poète, le livre n'en est pas moins savamment composé, voire recomposé : - chaque poème joue comme la trace fugitive d'une heure ou d'un moment passé : l'image du « crible » qui filtre goutte à goutte, heure par heure, image chère à Hugo, sert ici de matrice à chaque texte poétique, envisagé comme le filtre d'un rayon isolé sur la totalité du spectre lumineux (nous sommes à l'époque des expériences sur la décomposition de la lumière blanche par Chevreul, source de Delacroix, puis des impressionnistes) ; - la progression d'ensemble, quant à elle, mène insensiblement du clair au sombre, en travaillant toute la gamme des jeux de la lumière et de l'ombre : elle conduit des joies de l'enfance aux formidables révélations cosmogoniques finales, sans manquer de passer par le deuil (la mort de la fille adorée). Ce nuancier, qui est le principe même du recueil procède moins par antithèses franches et massives - comme on le pense souvent au sujet de l'œuvre de Hugo - que par reprises et subtiles variations, comme on le verra au sein même de ce poème. 2 Au fil de cette trajectoire, les premiers livres, Aurore et L'Âme en fleur, sont naturellement consacrés plus particulièrement à l'enfance, à la jeunesse, à la découverte des premières sensations (amoureuses, érotiques parfois), mais aussi des premières injustices, avant d'entrer, au livre III dans l'âge adulte des responsabilités au sein de la Cité et des combats. Il n'est pourtant pas rare, qu'au cœur même de ces sections, l'âme du poète, réfléchisse par anticipation les noirceurs à venir : c'est que celle-ci, une et indivisible, est marquée par le sceau de la destinée et qu'elle réfracte par intermittences la totalité du spectre, en assurant une très grande cohérence à l'ensemble du recueil. C'est le cas dans ce poème, le sixième du livre deux : la description d'un paysage bucolique, retraite paisible et abandon à l'instant présent, cède peu à peu la place à l'horizon, à l'appel du large et à ses sinistres présages. Explicitation des intentions de lecture de la part du comédien Par exemple, le comédien-lecteur pourra préciser ses choix, notamment sur la tonalité qu’il décide de faire prévaloir à la lecture du poème. Comment lire l’évocation du paysage du premier plan ? Avec émotion, attendrissement pour le pittoresque d’un cadre rassurant ? Ou avec une pointe d’ironie qui prépare l’appel du grand, et laisse percevoir les limites d’un décor sournoisement déceptif? Et comment laisser poindre cet appel final du large dans le texte ? Avec désir, intensité ou davantage, là encore, avec une pointe de désillusion, voire d’ironie (comment faire entendre, par exemple, le mot « superbement »). Pour donner corps à ce travail d’interprétation (au sens quasi musical) auxquels les élèves sont invités, le comédien -lecteur justifiera sa lecture, parlera en quelques minutes des choix qu’il fait, pourra aussi relire de façon différente le même vers, etc. L’idée est qu’une fois le texte lu, le comédien parle de sa lecture, assez librement. Premiers éléments d'analyse du texte Le poème se donne - dès ses premiers vers - comme le tableau pittoresque du séjour normand du poète. La forme épistolaire (affirmée dès le titre) est l'occasion pour celui-ci, sans doute de se livrer à une variation moderne de l'épître classique (voir l'Epître à Lamoignon de Boileau), mais surtout de donner à voir et à sentir en recomposant le paysage. Le texte est donc d'abord une tentative de composition picturale de la nature, marquée par la figure de l'hypotypose (qui peint les choses d’une manière si vive et si énergique, qu’elle les met en quelque sorte sous les yeux, et fait d’un récit ou d’une description, une image, un tableau, ou même une scène vivante), les notations visuelles et sensorielles et les nombreux présentatifs ("voilà", "c'est"). La clef tonale du premier vers donne le "la" : "Tu vois cela d'ici". Le poète, attaché à noter les couleurs et les formes, les silhouettes des objets, rivalise avec 5 Par ces effets rythmiques réitérés, le large et la transcendance, assaillant ce tableau de finitude, semblent le gagner de partout et le faire craquer de l'intérieur. II. POINT DE GRAMMAIRE 1. Les phrases non verbales (vers 1-9) a. Le début du poème se caractérise par une succession de phrases non verbales. Plus précisément, les phrases en question sont des phrases elliptiques, c’est-à-dire où la partie absente se trouve être le verbe « tu vois » présent dans la première partie du vers 1 ; les phrases elliptiques en question sont soulignées ci-dessous : 1 Tu vois cela d’ici. — Des ocres et des craies ; Plaines où les sillons croisent leurs mille raies, Chaumes à fleur de terre et que masque un buisson ; Quelques meules de foin debout sur le gazon ; 5 De vieux toits enfumant le paysage bistre ; Un fleuve qui n’est pas le Gange ou le Caystre, Pauvre cours d’eau normand troublé de sels marins ; À droite, vers le nord, de bizarres terrains Pleins d’angles qu’on dirait façonnés à la pelle ; L’absence de tout verbe introducteur, uniquement présent au vers 1, et la surabondance de noms permettent au poète d’insister sur ce qu’il voit et perçoit. C’est uniquement le résultat de la vision qui est décrit ici. L’absence de verbes d’action permet ici de créer une sorte d’hypotypose où les noms seuls permettent de se figurer à ce que le poète voit. b. Dans un souci de variatio, on note que les déterminants introduisant les phrases elliptiques sont de trois natures : Article indéfini (un, des, de) Un fleuve qui n’est pas le Gange ou le Caystre Des ocres et des craies De vieux toits Déterminant indéfini (quelque) Quelques meules de foin Absence de déterminant () 6 Plaines où… Chaumes à fleur de terre a. En revanche chaque nom est pourvu d’une expansion nominale qui permet de préciser la description : Proposition subordonnée relative Plaines où les sillons croisent leurs mille raies Un fleuve qui n’est pas le Gange ou le Caÿstre, Chaumes à fleur de terre et que masque un buisson ; Groupe nominal Chaumes à fleur de terre Pauvre cours d’eau normand troublé de sels marins Groupe adjectival de bizarres terrains/Pleins d’angles Quelques meules de foin debout sur le gazon ; Participe présent en emploi adjectival De vieux toits enfumant le paysage bistre Participe passé en emploi adjectival Pauvre cours d’eau normand troublé de sels marins La variété des expansions qui relèvent de plusieurs natures grammaticales différentes contribue à la variété du style et à l’écriture poétique. La grande variété grammaticale qui est à l’œuvre dans ce tableau descriptif peut se lire comme une émouvante tentative (mais peut- être dérisoire, et d’autant plus poignante qu’elle est vouée à l’échec) de transfigurer la modestie du paysage du premier plan par la luxuriance du verbe poétique, capable de célébrer par les seules ressources du verbe les limites du monde ordinaire, d’honorer son étroitesse. Sans réel succès. L’appel du lointain l’emporte. 2. La négation (vers 41-44) Dans un poème où l’emploi des négations est rare (v. 6), on note, à l’extrême fin du poème (v. 41-44), l’emploi de plusieurs négations (n’/ni) qui appelle les remarques suivantes. La négation, ne...pas, dont seul le premier membre est ici cité (n’), est une négation totale qui 7 porte sur la totalité de l’énoncé, ce qui la différencie de la négation partielle (Personne ne l’écoute, négation de Quelqu’un l’écoute) et de la négation exceptive (Je n’aime que le chocolat). La nature totale de la négation marque ainsi le caractère inexorable du destin, rythmé par ailleurs par les reprises anaphoriques de l’adverbe négatif ni qui supplée la négation totale ne…pas dont l’emploi n’est pas possible ici du fait de l’absence de formes verbales (On retrouve donc ici aussi, chemin, faisant, l’écriture nominale descriptive que nous avons précédemment évoquée dans les vers 1-9 du poème). Enfin, la négation employée ici n’est pas seulement totale, elle est aussi dite descriptive : la négation descriptive décrit en effet, sous une forme négative, un état de choses qui aurait bien pu aussi être décrit sous une forme positive. Ainsi « Quelque navire que n’ont retenu ni les pleurs des parents, ni l’effroi des épouses » équivaut à « Quelque navire qui a ignoré les pleurs des parents et l’effroi des épouses, etc. ». Le choix de la forme négative, de surcroît employée de manière anaphorique, contribue à décrire le destin de ce navire dont absolument rien ne peut entraver la navigation. III. OUVERTURE 1 La fin du poème, à partir du vers 36, est donc consacrée à un élargissement de la vision. Les seconds plans du paysage font leur apparition dans la description en révélant leur présence secrète depuis le début. « Je vois en pleine mer, passer superbement, Au-dessus des pignons du tranquille village, Quelque navire ailé qui fait un long voyage, Et fuit, sur l’océan, par tous les vents traqué,» Seulement cet élargissement physique de la vision ("je vois"), se double d'un élargissement métaphorique. Avec l'usage ciblé de la métaphore "navire ailé" pour qualifier les voiles, puis de l'exagération épique ("par tous les vents traqué), l'on s'affranchit brusquement du quotidien rassurant (les pignons) et des rives de la description pour atteindre celles de la rêverie ou du songe : le poète ici, n'est plus seulement témoin, mais devient voyant, mage distinguant, derrière l'apparence, une vision hallucinante. Pour le lecteur attentif, ce passage et tout spécialement les vers 38-39, font nettement échos au tout premier poème du recueil, qui lui sert de frontispice, et qui est comme rappelé ici. (Lecture) Un jour je vis, debout au bord des flots mouvants, Passer, gonflant ses voiles, Un rapide navire enveloppé de vents, De vagues et d’étoiles ; 10 Mais que voit le poète au juste dans le spectacle de "Quelque navire ailé qui fait un long voyage"? Sans doute, l'image de sa Destinée, la prescience de sa propre traversée à venir, et le reflet par anticipation des livres suivants du recueil, qui ne pourront se réduire à ce tableau d'un paisible hameau normand dont on comprend qu'il est fondamentalement un mirage et une vanité. IV. OUVERTURE 2 La fin de notre poème impressionne par l'anaphore des quatre mentions négatives introduites par la conjonction de coordination négative "ni", disposée en cadence majeure au final du texte pour en constituer l'acmé. Hugo, dans ses brouillons, avait très tôt dessiné le final de son texte autour de cette structure, comme le révèle l’étude générique du poème. « Et que n’ont retenu, loin des vagues jalouses, Ni les pleurs des parents, ni l’effroi des épouses, Ni le sombre reflet des écueils dans les eaux, Ni l’importunité des sinistres oiseaux. » Le tour peut sembler une réminiscence virgilienne : « Importunaeque volucres signa dabant » (Géorgiques, I, 470). Mais Hugo en renforce l'effet par l'amplitude de la série anaphorique. Sa portée majeure est de maintenir les intersignes négatifs au sein même de la vision radieuse et superbe (fière) du navire en partance pour l'aventure, comme autant de mauvais présages qui s'accumulent. En dépit de l'élan héroïque du départ, que rien n'a pu retenir, les menaces fantômes ne sont pas conjurées : elles s'épaississent tout au contraire, dans le repli de la lumière, telle son ombre portée. L'oxymore de « sombre reflet » dit combien le jeu de la lumière creuse l'ombre à proportion égale de son intensité. La force de la conjonction négative est bien de maintenir indissociablement les deux versants de l'aventure (positive et négative) dans le même plan. C'est que pour le poète, mais il faudra attendre la fin du recueil pour le concevoir, l'ascension est aussi et conjointement une chute ; le vol, un abîme ; la conquête, une perte. Quelques trente-cinq ans plus tard, l'un des plus grands poètes de la fin du siècle, n'oubliera pas ce final sublime et en reprendra l'effet dans l'un des plus beaux textes de notre répertoire poétique : Brise marine (lecture) La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres. Fuir ! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres D’être parmi l’écume inconnue et les cieux ! Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux Ne retiendra ce cœur qui dans la mer se trempe Ô nuits ! ni la clarté déserte de ma lampe 11 Sur le vide papier que la blancheur défend Et ni la jeune femme allaitant son enfant. Je partirai ! Steamer balançant ta mâture, Lève l’ancre pour une exotique nature ! Un Ennui, désolé par les cruels espoirs, Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs ! Et, peut-être, les mâts, invitant les orages, Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots … Mais, ô mon cœur, entends le chant des matelots ! Stéphane Mallarmé, Vers et Prose, 1893 Nous retrouvons bien des motifs similaires et une structure analogue. L'appel au départ, que nul élan contraire ne semble pouvoir empêcher, est maintenu dans le moment même où s'exprime, dans la scansion des "ni", les puissances rétentives de la tradition ou du familier. Mais là où Hugo faisait du "sombre reflet des écueils dans les eaux" le présage épique des combats, des conquêtes et des déchiffrements d'une vie d'homme à venir, Mallarmé circonscrit les puissances de la négativité à l'Ennui : fin de siècle oblige, le voyage est désormais tout intérieur, et la tempête circonscrite à "un crâne". Conclusion "Lettre" n'est certes pas la plus belle, ni l'une des plus célèbres pièces des Contemplations. Rarement citée dans les anthologies, elle disparaît souvent au profit de "Réponse à un acte d'accusation", "Aux Feuillantines", "Melancholia", "Horror", "Dolor", "Les Mages" ou encore "Demain, dès l'aube". Son étude permet pourtant de mettre au jour le travail précis de Hugo en matière de composition de son recueil au sein duquel chaque pièce est solidaire de l'ensemble : son art de la nuance, de la gradation des sensations et des impressions sur la palette générale de son livre, s'y déploie avec subtilité dans l'enchevêtrement du plein et du vide, de la lumière et de l'ombre, de la contingence et de la transcendance. C'est que tout livre selon Hugo doit obéir aux principes de diversité et de cohérence issus de la Nature, qui ne fait pas le tri entre les petites plantes et les grands arbres. Comme le rappelle la Préface de Cromwell : "Il faut puiser aux sources primitives. C'est la même sève, répandue dans le sol, qui produit tous les arbres de la forêt, si divers de port, de fruits, de feuillage. C'est la même nature qui féconde et nourrit les génies les plus différents." Pour la partie littérature : Renaud Ferreira de Oliveira, Igésr Pour la partie grammaire : Fabrice Poli, Igésr
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