Docsity
Docsity

Prépare tes examens
Prépare tes examens

Étudies grâce aux nombreuses ressources disponibles sur Docsity


Obtiens des points à télécharger
Obtiens des points à télécharger

Gagnz des points en aidant d'autres étudiants ou achete-les avec un plan Premium


Guides et conseils
Guides et conseils

1856, Musée du Louvre - Courbet, « L'homme blessé, Notes de Histoire de la Musique

Lecture analytique. Victor Hugo, « L'expiation », Les Châtiments, v. 1 à 28, 1853. Lecture analytique. Arthur Rimbaud, « Le Dormeur du val » Poésies,.

Typologie: Notes

2021/2022

Téléchargé le 08/06/2022

Gabrielle89
Gabrielle89 🇫🇷

4.4

(75)

499 documents

Aperçu partiel du texte

Télécharge 1856, Musée du Louvre - Courbet, « L'homme blessé et plus Notes au format PDF de Histoire de la Musique sur Docsity uniquement! 1 Objet d’étude 1 : Ecriture poétique et quête de sens du Moyen Age à nos jours SEQUENCE 1 : GROUPEMENTS DE TEXTES Le poète face à la guerre « Ce corps qui fut un rire/Brûle à présent./Cendres emportées par le vent jusqu’au fleuve et l’eau les reçoit comme les restes de larmes heureuses » Tahar Ben Jelloun, La Remontée des Cendres. Nous avons cherché à nous interroger sur la façon dont les poètes dénonçaient la guerre. Dans quelle mesure la poésie pouvait être une littérature d’engagement. Perspective dominante Qu’est-ce qu’un poète engagé ? La poésie peut-elle ou doit-elle dénoncer les horreurs ? Perspective secondaire Histoire de la poésie, son vocabulaire, ses registres principaux Textes étudiés pour l’exposé Lecture analytique Victor Hugo, « L’expiation », Les Châtiments, v. 1 à 28, 1853 Lecture analytique Arthur Rimbaud, « Le Dormeur du val » Poésies, 1870 Lecture analytique Robert Desnos, « Ce cœur qui haïssait la guerre », 1943 puis 1953 Textes étudiés pour l’entretien Textes complémentaires Lecture cursive Tahar Ben Jelloun, La Remontée des cendres, 1991 Lecture de l’image Etude de trois tableaux qui font écho aux trois textes poétiques étudiés : - Raffet, « Episode de la retraite de Russie », 1856, Musée du Louvre - Courbet, « L’homme blessé », 1854, Musée d’Orsay - Masson, « La Résistance », 1944, Musée Georges Pompidou Activités proposées à l’élève Possibilités d’écouter les poèmes lus : comprendre l’intérêt de l’alliance du rythme et des sonorités avec le message du texte. 2 LECTURE ANALYTIQUE L'expiation Il neigeait. On était vaincu par sa conquête. Pour la première fois l'aigle baissait la tête. Sombres jours ! L’empereur revenait lentement, Laissant derrière lui brûler Moscou fumant. Il neigeait. L'âpre hiver fondait en avalanche. Après la plaine blanche une autre plaine blanche. On ne connaissait plus les chefs ni le drapeau. Hier la grande armée, et maintenant troupeau. On ne distinguait plus les ailes ni le centre. Il neigeait. Les blessés s'abritaient dans le ventre Des chevaux morts ; au seuil des bivouacs désolés On voyait des clairons à leur poste gelés, Restés debout, en selle et muets, blancs de givre, Collant leur bouche en pierre aux trompettes de cuivre. Boulets, mitraille, obus, mêlés aux flocons blancs, Pleuvaient ; les grenadiers, surpris d'être tremblants, Marchaient pensifs, la glace à leur moustache grise. Il neigeait, il neigeait toujours ! La froide bise Sifflait ; sur le verglas, dans des lieux inconnus, On n'avait pas de pain et l'on allait pieds nus. Ce n'étaient plus des cœurs vivants, des gens de guerre : C'était un rêve errant dans la brume, un mystère, Une procession d'ombres sous le ciel noir. La solitude vaste, épouvantable à voir, Partout apparaissait, muette vengeresse. Le ciel faisait sans bruit avec la neige épaisse Pour cette immense armée un immense linceul. Et chacun se sentant mourir, on était seul. Victor Hugo, Les Châtiments, V, 13, « L’Expiation » v. 1 à 28, 1853 5 DOCUMENTS ICONOGRAPHIQUES (documents complémentaires) pour la séquence sur la guerre en poésie Denis-Auguste-Marie Raffet, Episode de la Retraite de Russie, 1856, Musée du Louvre Gustave Courbet, L’homme blessé, entre 1844 et 1854, Musée d’Orsay André Masson, La Résistance, 1944, musée Georges Pompidou 6 Objet d’étude 2 : Le personnage de roman du XVIIe siècle à nos jours SEQUENCE 2 : ŒUVRE INTEGRALE Guy de Maupassant, Bel Ami, 1885 « Le réaliste, s’il est un artiste, cherchera non pas à nous montrer la photographie banale de la vie, mais à nous en donner la vision la plus complète, la plus probante que la réalité même.» Cette citation de Guy de Maupassant résume l’essence du mouvement littéraire du réalisme. Nous avons cherché à nous interroger sur 1. Le réalisme dans Bel Ami et 2. La figure emblématique de la réussite sociale de Georges Duroy dans la société du XIXe siècle. Perspective dominante Héros et anti-héros : analyse du personnage de Duroy. Analyse des personnages féminins. La vision pessimiste du monde de Maupassant. Perspective secondaire Maupassant dans son époque. Histoire littéraire : les mouvements littéraires du réalisme et du naturalisme. Textes étudiés pour l’exposé Lecture analytique L’incipit du roman, chapitre 1, « quand la caissière (…) au mauvais sujet des romans populaires » Lecture analytique Excipit du roman, chapitre 10, « Bel Ami, à genoux à côté de Suzanne (…) » jusqu’à la fin du roman Lecture analytique Le dîner au café Riche, chapitre 5 (première partie), « les huîtres d’Ostende (…) les pauvres maris ! » Lecture analytique Le déjeuner à la campagne, chapitre 1 (deuxième partie) « Ce fut un long déjeuner (…) leur gaieté. » Textes étudiés pour l’entretien Textes complémentaires - Extrait de la préface de Pierre et Jean de Guy de Maupassant - Comparaison d’extraits discutant du réalisme et du naturalisme : Maupassant, Zola et Flaubert. Lecture cursive Un recueil de nouvelles réalistes et naturalistes : Champfleury, Zola, Maupassant, de Banville, Huysmans, Schwob. Lecture de l’image Gustave Caillebotte, L’homme au balcon, boulevard Haussman, 1880 Activités proposées à l’élève Proposition d’exposés au choix : - Présentation à la classe du tableau de Gustave Courbet, Un enterrement à Ornans. - Les photographies de Charles Manville, étude de la représentation de Paris. - Recherche de tableaux de Gustave Caillebotte représentant Paris. INCIPIT I, 1 Quand la caissière lui eut rendu la monnaie de sa pièce de cent sous, Georges Duroy sortit du restaurant. Comme il portait beau par nature et par pose d'ancien sous-officier, il cambra sa taille, frisa sa moustache d'un geste militaire et familier, et jeta sur les dîneurs attardés un regard rapide et circulaire, un de ces regards de joli garçon. qui s'étendent comme des coups d'épervier. Les femmes avaient levé la tête vers lui, trois petites ouvrières, une maîtresse de musique entre deux âges, mal peignée, négligée, coiffée d'un chapeau toujours poussiéreux et vêtue toujours d'une robe de travers, et deux bourgeoises avec leurs maris, habituées de cette gargote à prix fixe. Lorsqu'il fut sur le trottoir, il demeura un instant immobile, se demandant ce qu'il allait faire. On était au 28 juin, et il lui restait juste en poche trois francs quarante pour finir le mois. Cela représentait deux dîners sans déjeuners, ou deux déjeuners sans dîners, au choix. Il réfléchit que les repas du matin étant de vingt-deux sous, au lieu de trente que coûtaient ceux du soir, il lui resterait, en se contentant des déjeuners, un franc vingt centimes de boni, ce qui représentait encore deux collations au pain et au saucisson, plus deux bocks sur le boulevard. C'était là sa grande dépense et son grand plaisir des nuits; et il se mit à descendre la rue Notre-Dame-de-Lorette. Il marchait ainsi qu'au temps où il portait l'uniforme des hussards, la poitrine bombée, les jambes un peu entrouvertes comme s'il venait de descendre de cheval; et il avançait brutalement dans la rue pleine de monde, heurtant les épaules, poussant les gens pour ne point se déranger de sa route. Il inclinait légèrement sur l'oreille son chapeau à haute forme assez défraîchi, et battait le pavé de son talon. Il avait l'air de toujours défier quelqu'un. les passants, les maisons, la ville entière, par chic de beau soldat tombé dans le civil. 10 Documents complémentaires à la séquence sur le roman Bel-Ami 11 Texte 1 : Guy de Maupassant, extrait de la préface de Pierre et Jean, 1888. Faire vrai consiste donc à donner l'illusion complète du vrai, suivant la logique ordinaire des faits, et non à les transcrire servilement dans le pêle-mêle de leur succession. J'en conclus que les Réalistes de talent devraient s'appeler plutôt des Illusionnistes. Quel enfantillage, d'ailleurs, de croire à la réalité puisque nous portons chacun la nôtre dans notre pensée et dans nos organes. Nos yeux, nos oreilles, notre odorat, notre goût différents créent autant de vérités qu'il y a d'hommes sur la terre. Et nos esprits qui reçoivent les instructions de ces organes, diversement impressionnés, comprennent, analysent et jugent comme si chacun de nous appartenait à une autre race. Chacun de nous se fait donc simplement une illusion du monde, illusion poétique, sentimentale, joyeuse, mélancolique, sale ou lugubre suivant sa nature. Et l'écrivain n'a d'autre mission que de reproduire fidèlement cette illusion avec tous les procédés d'art qu'il a appris et dont il peut disposer. Illusion du beau qui est une convention humaine ! Illusion du laid qui est une opinion changeante ! Illusion du vrai jamais immuable ! Illusion de l'ignoble qui attire tant d'êtres ! Les grands artistes sont ceux qui imposent à l'humanité leur illusion particulière. Texte 2 : Emile Zola, extrait de la préface de L’Assommoir, 1877. J'ai voulu peindre la déchéance fatale d'une famille ouvrière, dans le milieu empesté de nos faubourgs. Au bout de l'ivrognerie et de la fainéantise, il y a le relâchement des liens de la famille, les ordures de la promiscuité, l'oubli progressif des sentiments honnêtes, puis comme dénouement, la honte et la mort. [...] C'est une œuvre de vérité, le premier roman sur le peuple, qui ne mente pas et qui ait l'odeur du peuple. Et il ne faut point conclure que le peuple tout entier est mauvais, car mes personnages ne sont pas mauvais, ils ne sont qu'ignorants et gâtés par le milieu de rude besogne et de misère où ils vivent. Texte 3 : Gustave Flaubert, Extrait de la correspondance ou Préface à la vie d'écrivain, Le Seuil, 1963. Extrait 1 A la princesse Mathilde. Croisset, mercredi (4 octobre 1876). [...] J’ai lu par hasard un fragment de l’Assommoir, paru dans la République des lettres et je suis tout à fait de votre avis. Je trouve cela ignoble, absolument. Faire vrai ne me paraît pas être la première condition de l’art. Viser au beau est le principal, et l’atteindre si l’on peut. Extrait 2 Croisset, samedi 8 décembre 1877.[...]Il ne s’agit pas seulement de voir, il faut arranger et fondre ce que l’on a vu. La Réalité, selon moi, ne doit être qu’un tremplin. Nos amis sont persuadés qu’à elle seule elle constitue tout l’État ! Ce matérialisme m’indigne, et, presque tous les lundis, j’ai un accès d’irritation en lisant les feuilletons de ce brave Zola. Après les Réalistes, nous avons les Naturalistes et les Impressionnistes. Quel progrès ! Tas de farceurs, qui veulent se faire accroire et nous faire accroire qu’ils ont découvert la Méditerranée. » 12 Tableau de Gustave Caillebotte, l’homme au balcon boulevard Haussman, 1880 figure immobile, exprimeront un étonnement et une frayeur indicibles: le passage d'un comportement à l'autre devra se faire, bien entendu, insensiblement. LE PROFESSEUR entre. Il porte une longue blouse noire de maître d'école, pantalons et souliers noirs, faux col blanc, cravate noire. Excessivement poli, très timide, voix assourdie par la timidité, très correct, très professeur. Il se frotte tout le temps les mains: de temps à autre, une lueur lubrique dans les yeux, vite réprimée. Au cours du drame, sa timidité disparaîtra progressivement, insensiblement: les lueurs lubriques de ses yeux finiront par devenir une flamme dévorante, ininterrompue: le Professeur deviendra de plus en plus sûr de lui, nerveux, agressif, dominateur., jusqu'à se jouer comme il lui plaira de son élève, devenue, entre ses mains, une pauvre chose. Evidemment la voix du Professeur devra elle aussi devenir de plus en plus forte, et, à la fin, extrêmement puissante et éclatante, tandis que la voix de l'Élève se fera presque inaudible. Dans les premières scènes, le Professeur bégaiera, très légèrement, peut-être. LE PROFESSEUR: Bonjour, Mademoiselle … C'est vous, c'est bien vous, n'est-ce pas, la nouvelle élève? L'ÉLÈVE se retourne vivement, l'air très dégagée, jeune fille du monde: elle se lève, s'avance vers Le Professeur, lui tend la main. L'ÉLÈVE: Oui, Monsieur. Bonjour, Monsieur. Vous voyez, je suis venue à l'heure. Je n'ai pas voulu être en retard. LE PROFESSEUR: C'est bien, Mademoiselle. Merci, mais il ne fallait pas vous presser. Je ne sais comment m'excuser de vous avoir fait attendre. Je finissais justement … n'est-ce pas, de … je m'excuse. Vous m'excuserez … L'ÉLÈVE: Il ne faut pas, Monsieur. Il n'y a aucun mal, Monsieur. LE PROFESSEUR: Mes excuses … Vous avez eu de la peine à trouver la maison? L'ÉLÈVE: Du tout … Pas du tout. Et puis j'ai demandé. Tout le monde vous connaît ici. LE PROFESSEUR: Il y a trente ans que j'habite la ville. Vous n'y êtes pas depuis longtemps! Comment la trouvez-vous? L'ÉLÈVE: Elle ne me déplaît nullement. C'est une jolie ville, agréable, un joli parc, un pensionnat, un évêque, de beaux magasins, des rues, des avenues … LE PROFESSEUR: C'est vrai, Mademoiselle. Pourtant j'aimerais autant vivre autre part. À Paris, ou au moins à Bordeaux. L'ÉLÈVE: Vous aimez Bordeaux? LE PROFESSEUR: Je ne sais pas. Je ne connais pas. L'ÉLÈVE: Alors vous connaissez Paris? LE PROFESSEUR: Non plus, Mademoiselle, mais, si vous me le permettez, pourriez-vous me dire, Paris, c'est le chef-lieu de .. Mademoiselle? L'ÉLÈVE: (cherche un instant, puis, heureuse de savoir) Paris, c'est le chef-lieu de … la France? LE PROFESSEUR: Mais oui, Mademoiselle, bravo, mais c'est très bien, c'est parfait. Mes félicitations. Vous connaissez votre géographie nationale sur le bout des ongles. Vos chefs-lieux. L'ÉLÈVE: Oh! je ne les connais pas tous encore, Monsieur, ce n'est pas si facile que ça, j'ai du mal à les apprendre. LE PROFESSEUR: Oh, ça viendra … Du courage … Mademoiselle … Je m'excuse … de la patience … doucement, doucement … Vous verrez, ça viendra … Il fait beau aujourd'hui … ou plutôt pas tellement … Ohl si quand même. Enfin, il ne fait pas trop mauvais, c'est le principal … Euh … euh … Il ne pleut pas, il ne neige pas non plus. L'ÉLÈVE: Ce serait bien étonnant, car nous sommes en été. LE PROFESSEUR: Je m'excuse, Mademoiselle, j'allais vous le dire … mais vous apprendrez que l'on peut s'attendre à tout. L'ÉLÈVE: Évidemment, Monsieur. 15 LE PROFESSEUR: Nous ne pouvons être sûrs de rien, Mademoiselle, en ce monde. L'ÉLÈVE: La neige tombe l'hiver. L'hiver, c'est une des quatre saisons. Les trois autres sont euh le prin … LE PROFESSEUR: Oui? L'ÉLÈVE: … temps, et puis l'été et euh … LE PROFESSEUR: Ça commence comme automobile, Mademoiselle. L'ÉLÈVE: Ah, oui, l'automne … LE PROFESSEUR: C'est bien cela, Mademoiselle, très bien répondu, c'est parfait. Je suis convaincu que vous serez une bonne élève. Vous ferez des progrès. Vous êtes intelligente, vous me paraissez instruite, bonne mémoire. L'ÉLÈVE: Je connais mes saisons, n'est-ce pas, Monsieur? LE PROFESSEUR: Mais oui, Mademoiselle … ou presque. Mais ça viendra. De toute façon, c'est déjà bien. Vous arriverez à les connaître, toutes vos saisons, les yeux fermés. Comme moi. L'ÉLÈVE: C'est difficile. LE PROFESSEUR: Oh, non. Il suffit d'un petit effort, de la bonne volonté, Mademoiselle. Vous verrez. Ça viendra, soyez-en sûre. L'ÉLÈVE: Oh, je voudrais bien, Monsieur. J'ai une telle soif de m'instruire. Mes parents aussi désirent que j'approfondisse mes connaissances. Ils veulent que je me spécialise. Ils pensent qu'une simple culture générale, même si elle est solide, ne suffit plus, à notre époque. LE PROFESSEUR: Vos parents, Mademoiselle, ont parfaitement raison. Vous devez pousser vos études. Je m'excuse de vous le dire, mais c'est une chose nécessaire. La vie contemporaine est devenue très complexe. L'ÉLÈVE: Et tellement compliquée … Mes parents sont assez fortunés, j'ai de la chance. Ils pourront m'aider à travailler, à faire des études très supérieures. LE PROFESSEUR: Et vous voudriez vous présenter … L'ÉLÈVE: Le plus tôt possible, au premier concours de doctorat. C'est dans trois semaines. LE PROFESSEUR: Vous avez déjà votre baccalauréat, si vous me permettez de vous poser la question. L'ÉLÈVE: Oui, Monsieur, j'ai mon bachot sciences, et mon bachot lettres. LE PROFESSEUR: Oh, mais vous êtes très avancée, même trop avancée pour votre âge. Et quel doctorat voulez-vous passer? Sciences matérielles ou philosophie normale? L'ÉLÈVE: Mes parents voudraient bien, si vous croyez que cela est possible en si peu de temps, ils voudraient bien que je passe mon doctorat total. LE PROFESSEUR: Le doctorat total? … Vous avez beaucoup de courage, Mademoiselle, je vous félicite sincèrement. Nous tâcherons, Mademoiselle, de faire de notre mieux. D'ailleurs, vous êtes déjà assez savante. À un si jeune âge. L'ÉLÈVE: Oh, Monsieur. LE PROFESSEUR: Alors, si vous voulez bien me permettre, mes excuses, je vous dirais qu'il faut se mettre au travail. Nous n'avons guère de temps à perdre. 16 LECTURE ANALYTIQUE Lecture analytique n°2 : LA LEÇON DE MATHEMATIQUES LE PROFESSEUR: Arrêtez-vous, Mademoiselle. Quel nombre est plus grand? Trois ou quatre? L'ÉLÈVE: Euh … trois ou quatre? Quel est le plus grand? Le plus grand de trois ou quatre? Dans quel sens le plus grand? LE PROFESSEUR: Il y a des nombres plus petits et d'autres plus grands. Dans les nombres plus grands il y a plus d'unités que dans les petits. L'ÉLÈVE: … Que dans les petits nombres? LE PROFESSEUR: À moins que les petits aient des unités plus petites. Si elles sont toutes petites, il se peut qu'il y ait plus d'unités dans les petits nombres que dans les grands … s'il s'agit d'autres unités … L'ÉLÈVE: Dans ce cas, les petits nombres peuvent être plus grands que les grands nombres? LE PROFESSEUR: Laissons cela. Ça nous mènerait beaucoup trop loin: sachez seulement qu'il n'y a pas que des nombres … il y a aussi des grandeurs, des sommes, il y a des groupes, il y a des tas, des tas de choses telles que les prunes, les wagons, les oies, les pépins, etc. Supposons simplement, pour faciliter notre travail, que nous n'avons que des nombres égaux, les plus grands seront ceux qui auront le plus d'unités égales. L'ÉLÈVE: Celui qui en aura le plus sera le plus grand? Ah, je comprends, Monsieur, vous identifiez la qualité à la quantité. LE PROFESSEUR: Cela est trop théorique, Mademoiselle, trop théorique. Vous n'avez pas à vous inquiéter de cela. Prenons notre exemple et raisonnons sur ce cas précis. Laissons pour plus tard les conclusions générales. Nous avons le nombre quatre et le nombre trois, avec chacun un nombre toujours égal d'unités: quel nombre sera le plus grand, le nombre plus petit ou le nombre plus grand? L'ÉLÈVE: Excusez-moi, Monsieur … Qu'entendez-vous par le nombre le plus grand? Est-ce celui qui est moins petit que l'autre? LE PROFESSEUR: C'est ça, Mademoiselle, parfait. Vous m'avez très bien compris. L'ÉLÈVE: Alors, c'est quatre. LE PROFESSEUR: Qu'est-ce qu'il est, le quatre? Plus grand ou plus petit que trois? L'ÉLÈVE: Plus petit … non, plus grand. LE PROFESSEUR: Excellente réponse. Combien d'unités avez-vous de trois à quatre? … ou de quatre à trois, si vous préférez? L'ÉLÈVE: Il n'y a pas d'unités, Monsieur, entre trois et quatre. Quatre vient tout de suite après trois: il n'y a rien du tout entre trois et quatrel LE PROFESSEUR: Je me suis mal fait comprendre. C'est sans doute ma faute. Je n'ai pas été assez clair. L'ÉLÈVE: Non, Monsieur, la faute est mienne. LE PROFESSEUR: Tenez. Voici trois allumettes. En voici encore une, ça fait quatre. Regardez bien, vous en avez quatre, j'en retire une, combien vous en reste-t-il? On ne voit pas les allumettes, ni aucun des objets, d'ailleurs, dont il est question: le Professeur se lèvera de table, écrira sur un tableau inexistant avec une craie inexistante, etc. L'ÉLÈVE: Cinq. Si trois et un font quatre, quatre et un font cinq. LE PROFESSEUR: Ce n'est pas ça. Ce n'est pas ça du tout. Vous avez toujours tendance à additionner. Mais il faut aussi soustraire. Il ne faut pas uniquement intégrer. Il faut aussi désintégrer. C'est ça la vie. C'est ça la philosophie. C'est ça la science. C'est ça le progrès, la civilisation. L'ÉLÈVE: Oui, Monsieur. LE PROFESSEUR: Revenons à nos allumettes. J'en ai donc quatre. Vous voyez, elles sont bien quatre. J'en retire une, il n'en reste plus que … 17 LE PROFESSEUR: … et ceci est encore un principe fondamental, toute langue n'est en somme qu'un langage, ce qui implique nécessairement qu'elle se compose de sons, ou … L'ÉLÈVE: Phonèmes … LE PROFESSEUR: J'allais vous le dire. N'étalez donc pas votre savoir. Écoutez, plutôt. L'ÉLÈVE: Bien, Monsieur. Oui, Monsieur. LE PROFESSEUR: Les sons, Mademoiselle, doivent être saisis au vol par les ailes pour qu'ils ne tombent pas dans les oreilles des sourds. Par conséquent, lorsque vous vous décidez d'articuler, il est recommandé, dans la mesure du possible, de lever très haut le cou et le menton, de vous élever sur la pointe des pieds, tenez, Ï, VOUS voyez … L'ÉLÈVE: Oui, Monsieur. LE PROFESSEUR: Taisez-vous. Restez assise, n'interrompez pas … Et d'émettre les sons très haut et de toute la force de vos poumons associée à celle de vos cordes vocales. Comme ceci: regardez: « Papillon », « Eurêka », « Trafalgar », « papi, papa». De cette façon, les sons remplis d'un air chaud plus léger que l'air environnant voltigeront, voltigeront sans plus risquer de tomber dans les oreilles des sourds qui sont les véritables gouffres, les tombeaux des sonorités. Si vous émettez plusieurs sons à une vitesse accélérée, ceux-ci s'agripperont les uns aux autres automatiquement, constituant ainsi des syllabes, des mots, à la rigueur des phrases, c'est-à-dire des groupements plus ou moins importants, des assemblages purement irrationnels de sons, dénués de tout sens, mais justement pour cela capables de se maintenir sans danger à une altitude élevée dans les airs. Seuls, tombent les mots chargés de signification, alourdis par leur sens, qui finissent toujours par succomber, s'écrouler … L'ÉLÈVE: … dans les oreilles des sourds. LE PROFESSEUR: C'est ça, mais n'interrompez pas … et dans la pire confusion … Ou par crever150 comme des ballons. Ainsi donc, Mademoiselle … (L'Élève a soudain l'air de souffrir.) Qu'avez vous donc? L'ÉLÈVE: J'ai mal aux dents, Monsieur. LE PROFESSEUR: Ça n'a pas d'importance. Nous n'allons pas nous arrêter pour si peu de chose. Continuons … 20 DOCUMENTS COMPLEMENT ATRES : D'abord incomprise du public, La Leçon s'affirme rapidement comme un chef-d'œuvre du théâtre contemporain. Les spectateurs sont fascinés par l'évolution aussi burlesque qu'effrayante du couple formé par le professeur et son élève 7 Marie Crouail et David Stever compagnie Méga Pobec (Évreux, 2010) 1. De quelle façon le metteur en scène souligne-t-il ici Le rapport de force qui oppose les deux personnages ? Com- ment Le choix des costumes le renforce-t-il ? 2. Observez la façon dont les livres sont utilisés. Quelle double signification, thématique et symbolique, ces acces- soires ont-ils ici ? À Christine Chevrot (la bonne), Claire Defflippi (le professeur) et Jean-Marc De Cesare (élève), mise en scène de Jean-Marc De Cesare, troupe du Millénaire (Marseille, 2012). Un couple stéréotypé mais surprenant La pièce oppose deux personnages stéréotypés, sans originalité. Leur dialogue absurde fait tou l'intérêt de cette confrontation où le professeur d'abord intimidé par sa nouvelle élève, l'assujettit finalement à son autorité menaçante Constamment en scène, les deux comédiens doivent faire résonner le caractère extravagan de propos répétitifs qui marquent la progression inquiétante de l'intrigue nise en scène de Jean-Pierre Brière La bonne, un personnage à part entière ® Personnage clé de la comédie, la bonne est dans toute comédie l'adjuvant d'un couple de jeunes gens menacés par un barbon. Dans La Leçon, elle est du côté de ce dernier, le professeur, et joue contre la jeunesse incarnée par l'élève ® lonesco fait de la servante un person nage pervers et redoutable qui, à la fin de la pièce, attache un brassard nazi à son maître, le professeur. 1. Identifiez La comédienne jouant La bonne. Étant donné son attitude, à quel moment de la pièce cette photographie correspond-elle ? 2. Selon vous, quel est l'intérêt de traves- tir les rôles, c'est-à-dire de faire jouer le professeur par une femme, et l'élève par un homme ? Comment le décor semble-t-il redoubler l'effet ainsi produit ? 21 Une pièce comique ? ® jouant à la fois sur les comiques de mots, de gestes, de caractère et de répétition, La Leçon revêt une puissance burlesque portée par le rythme endiablé de l'intrigue. Mais le dénouement atroce à l'issue d'une progression tendue plonge le spectateur dans une atmosphère sombre et angoissante © Les différentes mises en scène ont savamment souligné les registres mêlés de la pièce. Décors, ac- cessoires, costumes et jeux de comédiens alternent ou superposent des aspects aussi désopilants qu’effrayants Carole Pierret (l'élève), Jean-Noël Pithon > (le professeur) et Danièle Claverie (La bonne), mise en scène de Stéphane Alvarez, compagnie du théâtre du Pont Tournant (Bordeaux, 2012). 1. On définit souvent le comique comme un registre jouant sur Le déca- lage et la disproportion. Selon vous, laquelle de ces deux mises en scène respecte ce programme ? Expliquez. 2. Quelle mise en scène met Le mieux en évidence l'ambivalence de La Leçon, entre comique et tragique ? Justifiez par une description précise du décor. Une mise en scène de La Leçon Sur Internet, cherchez des photogra- phies de la mise en scène de Marcel Cuvelier en 1951 1. De quelle façon les trois comédiens incarnaient-ils les personnages par leur costume et leur jeu ? Quelles différences essentielles voyez-vous par rapport aux mises en scène pro- posées dans ce dossier ? 2. Selon vous, quel spectacle est le plus fidèle à l'esprit de la pièce ? Expliquez. À Alain Ganas (le professeur), Stéphanie Chodat (l'élève) et Stéphanie Mathieu (la bonne), mise en scène de Marcel Cuvelier, théâtre de La Huchette (Paris, 2015). 22 25 Documents complémentaires étudiés à la suite du texte de Corneille 10 15 25 35 Jean Racine, Phèdre Le récit de Théramène (Acte V, scène 6) Thésée, Théramène Thésée, le roi d'Athènes, a banni Hippolyte, son fils de la cité l'accusant d'un amour incestueux envers Phèdre, sa belle-mère. I lui lance une malédiction, demandant à Neptune, son père, de le venger en causant sa perte. À sa sortie de la cité, Hippolyte doit alors affronter un terrible monstre marin. Théramène, ami d'Hippolyte, revient à la cour pour annoncer l'issue du combat. THÉRAMENE À peine nous sortions des portes de Trézène, Il était sur son char ; ses gardes affligés Imitaient son silence, autour de Iui rangés ; Il suivait tout pensif le chemin de Mycènes : Sa main sur les chevaux laissait flotter les rênes ; Ses superbes coursiers qu'on voyait autrefois Pleins d’une ardeur si noble obéir à sa voix, L'œil more maintenant, et la tête baisée, Semblaient se conformer à sa triste pensée. Un effroyable cri, sorti du fond des flots, Des airs en ce moment a troublé le repos ; Et du sein de la terre une voix formidable Répond en gémissant à ce cri redoutable. Jusqu'au fond de nos cœurs notre sang s’est glacé : Des coursiers attentifs le crin s’est hérissé. Cependant sur le dos de la plaine liquide, S’élève à gros bouillons une montagne humide ; L’onde approche, se brise, et vomit à nos yeux, Parmi des flots d’écume, un monstre furieux. Son front large est armé de cornes menaçantes ; Ses longs mugissements font trembler le rivage. Le ciel avec horreur voit ce monstre sauvage ; La terre s’en émeut, l’air en est infecté ; Le flot qui l’apporta recule épouvanté. Tout fuit ; et sans s’armer d’un courage inutile, Dans le temple voisin chacun cherche un asile. Hippolyte lui seul, digne fils d'un héros, Arrête ses coursiers, saisit ses javelots, 40 45 55 65 Pousse au monstre, et d’un dard lancé d’une main sûre, Il ini fait dans le flanc une large blessure. De rage et de douleur le monstre bondissant ‘Vient aux pieds des chevaux tomber en mugissant, Se roule, et leur présente une gueule enflammée Qui les couvre de feu, de sang et de fumée. 70 La frayeur les emporte ; et, sourds à cette fois, Ils ne connaissent plus ni le frein ni la voix ; En efforts impuissants leur maître se consume ; Ils rougissent le mors d’une sanglante écume. On dit qu’on a vu même, en ce désordre affreux, Un dieu qui d’aiguillons pressait leur flanc poudreux. À travers les rochers la peur les précipite : L'essieu crie et se rompt : l’intrépide Hippolyte Voit voler en éclats tout son char fracassé ; Dans les rênes lui-même il tombe embarrassé. J'ai vu, seigneur, j'ai vu votre malheureux fils Traîné par les chevaux que sa main a nourris. Il veut les rappeler, et sa voix les effraie : Ils courent : tout son corps n’est bientôt qu’une plaie. De nos cris douloureux la plaine retentit. Leur fougue impétueuse enfin se ralentit : Ils s’arrêtent non loin de ces tombeaux antiques Où des rois ses aïeux sont les froides reliques. J'y cours en soupirant, et sa garde me suit : De son généreux sang la trace nous conduit ; Les rochers en sont teints ; les ronces dégouttantes Portent de ses cheveux les dépouilles sanglantes. J'arrive, je l'appelle ; et me tendant la main, Il ouvre un œil mourant qu'il referme soudain : « Le ciel, dit-il, m’arrache une innocente vie. « Prends soin après ma mort de la triste Aricie. « Cher ami, si mon père un jour désabusé « Plaint le malheur d’un fils faussement accusé, « Pour apaiser mon sang et mon ombre plaintive, « Dis-lui qu'avec douceur il traite sa captive : « Qu'il lui rende... » À ce mot, ce héros expiré N'a laissé dans mes bras qu’un corps défiguré : Triste objet où des dieux triomphe la colère, Et que méconnaîtrait l'œil même de son père. 26 10 15 25 Racine, Phèdre, Acte V, scène 7. THÉSÉE, PHEDRE, THERAMENE, PANOPE, GARDES. THÉSÉE - Eh bien ! vous triomphez, et mon fils est sans vie ! Ah ! que j'ai lieu de craindre, et qu’un cruel soupçon, L'excusant dans mon cœur, m'alarme avec raison ! Maïs, madame, il est mort, prenez votre victime ; Jouissez de sa perte, injuste ou légitime : Je consens que mes yeux soient toujours abusés. Je le crois criminel, puisque vous l'accusez. Son trépas à mes pleurs offre assez de matières Sans que j'aille chercher d'odieuses lumières, Qui, ne pouvant le rendre à ma juste douleur, Peut-être ne feraient qu'accroître mon malheur. Laissez-moi, loin de vous, et loin de ce rivage, De mon fils déchiré fuir la sanglante image. Confus, persécuté d’un mortel souvenir, De l'univers entier, je voudrais me bannir. Tout semble s'élever contre mon injustice ; L'éclat de mon nom même augmente mon supplice : Moins connu des mortels, je me cacherais mieux. Je hais jusques aux soins dont m'honorent les dieux ; Et je m'en vais pleurer leurs faveurs meurtrières, Sans plus les fatiguer d'inutiles prières. Quoi qu'ils fissent pour moi, leur funeste bonté Ne me saurait payer de ce qu'ils m'ont ôté. PHÈDRE Non, Thésée, il faut rompre un injuste silence ; Il faut à votre fils rendre son innocence : Il n'était point coupable. THÉSÉE Ah ! père infortuné ! Et c'est sur votre foi que je l'ai condamné ! Cruelle ! pensez-vous être assez excusée... PHÈDRE Les moments me sont chers ; écoutez-moi, Thésée : 35 45 55 65 C'est moi qui sur ce fils, chaste et respectueux, Osai jeter un œil profane, incestueux. Le ciel mit dans mon sein une flamme funeste : La détestable Œnone a conduit tout le reste. Elle a craint qu'Hippolyte, instruit de ma fureur, Ne découvrit un feu qui lui faisait horreur : La perfide, abusant de ma faiblesse extrême, S'est hâtée à vos yeux de l’accuser lui-même. Elle s’en est punie, et fuyant mon courroux, A cherché dans les flots un supplice trop doux. Le fer aurait déjà tranché ma destinée ; Mais je laissais gémir la vertu soupçonnée : J'ai voulu, devant vous exposant mes remords, Par un chemin plus lent descendre chez les morts. J'ai pris, j'ai fait couler dans mes brülantes veines Un poison que Médée apporta dans Athènes. Déjà jusqu'à mon cœur le venin parvenu Dans ce cœur expirant jette un froid inconnu ; Déjà je ne vois plus qu’à travers un nuage Et le ciel et l'époux que ma présence outrage ; Et la mort à mes yeux dérobant la clarté, Rend au jour qu'ils souillaient toute sa pureté. PANOPE Elle expire, seigneur ! THÉSÉE D'une action si noire Que ne peut avec elle expirer la mémoire ! Allons, de mon erreur, hélas ! trop éclaircis, Méêler nos pleurs au sang de mon malheureux fils ! Allons de ce cher fils embrasser ce qui reste, Expier la fureur d'un vœu que je déteste : Rendons-lui les honneurs qu'il a trop mérités ; Et, pour mieux apaiser ses mânes irrités, Que, malgré les complots d'une injuste famille, Son amante aujourd'hui me tienne lieu de fille ! 27 30 LECTURE ANALYTIQUE ainsi que le document complémentaire une illustration de la fable par Grandville LECTURE ANALYTIQUE LA COUR DU LION Sa Majesté Lionne un jour voulut connaître De quelles nations le ciel l'avait fait maître. Ilmanda donc par Députés Ses Vassaux de toute nature, Envoyant de tous les côtés Une circulaire écriture, Avec son sceau. L'écrit portait Qu'un mois durant le Roi tiendrait Cour plénière, dont l'ouverture Devait être un fort grand festin, Suivi des tours de Fagotin. Par ce trait de magnificence Le Prince à ses sujets étalait sa puissance. En son Louvre il les invita. Quel Louvre! un vrai charnier, dont l'odeur se porta D'abord au nez des gens. L'Ours boucha sa narine: Il se fût bien passé de faire cette mine, Sa grimace déplut. Le Monarque irrité L'envoya chez Pluton faire le dégoûté. Le Singe approuva fort cette sévérité, Et flatteur excessif, il loua la colère Et la griffe du Prince, et l'Antre, et cette odeur: Il n'était ambre, il n'était fleur, Qui ne füt ail au prix. Sa sotte flatterie Eut un mauvais succès, et fut encor punie. Ce Monseigneur du Lion-là Fut parent de Caligula. Le Renard étant proche: Or cä, lui dit le sire, Que sens-tu? dis-le moi : parle sans déguiser. L'autre aussitôt de s'excuser, Alléguant un grand rhume : il ne pouvait que dire Sans odorat ; bref, il s'en tire. Ceci vous sert d'enseignement : Ne soyez à la Cour, si vous voulez y plaire, Ni fade adulateur, ni parleur trop sincère ; Et tâchez quelquefois de répondre en Normand. 31 32 DOCUMENTS COMPLÉMENTAIRES en lien avec la fable “La Cour du Lion” Il est terrible le petit bruit de l'œuf dur cassé sur un comptoir d'étam il est terrible ce bruit quand A rome dans la mémoire de l'homme qu a faim est terrible aussi la tête de l'homme la tête de l'homme qui a faim quand À se regarde à 1x heures du matin dans la glace du grand magasin une tête couleur de poussière ce n'est pas sa tête pourtant qu'il regarde dans la vitrine de chez Potin 1l s'en fout de sa tête l'homme À ny perse pas ou une tête de n'importe quoi qui se mange et il remue doucement la mâchoire doucement et il grince des dents doucement car le monde se paye sa tête et il ne peut rien contre ce monde et il compte sur ses doigts un deux trois ‘un deux trois cela fait trois jours qu'il n'a pas mangé l'assassin le vagabond lui a volé deux francs soit un café arrosé deux tartines beurrées et vingt-cinq centimes pour le pourboire du garçon Il est terrible le petit bruit de l'œuf dur cassé sur un comptoir d'étam il est terrible ce bruit quand il remue dans la mémoire de l'homme qui a fam 35 36 Objet d’étude 5 : Vers un espace culturel européen : Renaissance et Humanisme SEQUENCE 6 : Groupement de texte A la découverte de l’Autre «frotter et limer notre cervelle contre celle d’autrui suggère Montaigne dans son œuvre « Les Essais ». Nous nous sommes interrogés sur les différentes visions de l’Autre que les écrivains défendent dans l’Europe du XVIe siècle ? Perspective dominante L’argumentation directe et indirecte L’humanisme et son apport jusqu’à nos jours Perspective secondaire Les thématiques principales de l’humanisme : autrui, éducation, sciences Textes étudiés pour l’exposé Lecture analytique Michel de Montaigne, Essais, « Des Cannibales », 1588. Lecture analytique/commentaire composé Jean de Léry, Histoire d’un voyage en la terre du Brésil, chapitre XIII, 1578 ce texte a été étudié sous la forme d’un commentaire composé dans le cadre d’un sujet bac. Lecture analytique J.C. Carrière, La Controverse de Valladolid, extrait, 1992 Textes étudiés pour l’entretien Textes complémentaires - Différentes lectures sur Humanisme et Renaissance dont le site de la Bibliothèque Nationale de France : http://classes.bnf.fr/dossitsm/humalumi.htm - Claude Lévi-Strauss, extrait de Anthropologie structurale II, « La question raciale devant la science moderne », 1952 - Jean de Léry, Histoire d’un voyage en la terre du Brésil, chapitre XIII, 1578 (autre extrait) - Michel de Montaigne, Essais, Livre III, chapitre VI « Des Coches », 1588 - Claude Lévi-Strauss, Tristes Tropiques, 1955 - Dissertation : Dans le premier livre des Essais, Michel de Montaigne explique que pour se former, il faut « frotter et limer notre cervelle contre celle d’autrui ». En quoi peut-on dire que l’Humanisme se caractérise par une ouverture à l’autre et une interrogation sur l’autre ? Lecture cursive J.C. Carrière, La Controverse de Valladolid, GF Etonnants classiques Activités proposées à l’élève - Regarder le film de Roland Joffé, Mission - Exposition « L’invention du sauvage » au musée du Quai Branly : http://culturebox.francetvinfo.fr/arts/expos/l- invention-du-sauvage-au-musee-du-quai-branly- 69537 - Recherchez une œuvre représentative du siècle de la Renaissance et expliquez votre choix ? LECTURE ANALYTIQUE : Montaigne “Des Cannibales" MONTAIGNE Qui sont les sauvages ? Or je trouve , pour revenir à mon propos, qu'il n°y a rien de barbare et de sauvage en cette nation, à ce qu'on m'en a rapporté : sinon que chacun appelle barbarie ce qui n'est pas de son usage : comme de vrai. il semble que nous n'avons autre mire de la vérité et de la raison que l'exemple et l'idée des opinions et usances du pays où nous sommes. Là est toujours la parfaite religion, la parfaite police, parfait et accompli usage de toutes choses. Ils sont sauvages. de même que nous appelons sauvages les fruits que nature, de soi et de son progrès ordinaire, a produits : là où, à la vérité, ce sont ceux que nous avons altérés par notre artifice , et détournés de l'ordre commun. que nous devrions appeler plutôt sauvages. En ceux-là sont vives et vigoureuses les vraies et plus utiles et naturelles vertus et propriétés, lesquelles nous avons abâtardies en ceux-ci, et les avons seulement accommodées au plaisir de notre goût corrompu. Et si pourtant, la saveur même et délicatesse se trouve à notre goût excellente, à l'envi des nôtres, en divers fruits de ces contrées-là sans culture. Ce n’est pas raison que l’art gagne le point d'honneur sur notre grande et puissante mère Nature. Nous avons tant rechargé la beauté et richesse de ses ouvrages par nos inventions, que nous l'avons du tout étouffée. Si est-ce que, partout où sa pureté reluit, elle fait merveilleuse honte à nos vaines et frivoles entreprises. Essais. Livre I, chap. XXX : « Des Cannibales » (1580-1588-1592) 40 LECTURE ANALYTIQUE : J.C. Carrière, La Controverse de Valladolid, 1992 distinguer, dans leurs motifs, ce qui relève d'une admiration sincère ou de la simple flagornerie. Quelles autres marques d'esclavage naturel avez-vous relevées chez eux ? Sépulvéda prend une liasse de feuillets et commence une lecture faite à voix plate, comme un compte rendu précis. indiscutable : - Ils ignorent l'usage du métal, des armes à feu et de la roue. Ils portent leurs fardeaux sur le dos. comme des bêtes. pendant de longs parcours. Leur nourriture est détestable, semblable à celle des animaux. Ils se peignent grossièrement le corps et adorent des idoles affreuses. Je ne reviens pas sur les sacnifices humains. qui sont la marque la plus haïssable, et la plus offensante à Dieu. de leur état. Las Casas ne parle pas pour le moment. Il se contente de prendre quelques notes. Tout cela ne le surprend pas. - J'ajoute qu'on les décrit stupides comme nos enfants ou nos idiots. Ils changent très fréquemment de femmes. ce qui est un signe très vrai de sauvagerie. Ils ignorent de toute évidence la noblesse et l'élévation du beau sacrement du mariage. Ils sont timides et lâches à la guerre. Ils ignorent aussi la nature de l'argent et n'ont aucune idée de la valeur respective des choses. Par exemple. ils échangeaient contre de l'or le verre cassé des barils. - Eh bien ? s'écrie Las Casas. Parce qu'ils n'adorent pas l'or et l'argent au point de leur sacrifier corps et âme. est-ce une raison pour les traiter de bêtes ? N'est-ce pas plutôt le contraire ? - Vous déviez ma pensée. répond le philosophe. - Et pourquoi jugez-vous leur noumiture détestable ? Y avez-vous goûté ? N'est-ce pas plutôt à eux de dire ce qui leur semble bon ou moins bon ? Parce qu'une nourriture est différente de la nôtre, doit-on la trouver répugnante ? - Ils mangent des œufs de fourmi, des tripes d'oiseau. - Nous mangeons des tripes de porc ! Et des escargots ! - Ils se sont jetés sur le vin, dit Sépulvéda, au point, dans bien des cas, d'y laisser leur peu de raison. - Et nous avons tout fait pour les y encourager ! Mais ne vous a-t-on pas appris. d'un autre côté, qu'ils cultivent des fruits et des légumes qui jusqu'ici nous étaient inconnus ? Et que certains de leurs tubercules sont délicieux ? Vous dites qu'ils portent leurs fardeaux sur le dos : Imorez-vous que la nature ne leur a donné aucun amimal qui pôt le faire à leur place ? Quant à se peindre grossièrement le corps, qu'en savez-vous ? Que signifie le mot "grossier" ? - Frère Bartolomé, dit le légat, vous aurez de nouveau la parole, aussi longtemps que vous voudrez. Rien ne sera laissé dans l'ombre, je vous l'assure. Mais pour le moment, restez silencieux. » Le dominicain, qui paraît fatigué, se rassied. Jean-Claude Carrière, La Controverse de Valladolid, 1992 41 DOCUMENTS COMPLEMENT AIRES: Objet d'étude : Vers un espace culturel européen : Renaissance et humanisme Le sujet comprend : Texte A : Jean de Léry, Histoire d'un voyage fait en la terre du Brésil, chapitre XIII, 1578 (orthographe modernisée) Texte B : Jean de Léry, Histoire d'un voyage fait en la terre du Brésil, chapitre XVIII, 1578 (orthographe modernisée) Texte C : Michel de Montaigne, Essais, Livre III, chapitre VI « Des coches », 1588 (adaptation en français moderne par André Lanly) Texte D : Claude Lévi-Strauss, Tristes Tropiques, 1955 42 DOCUMENT COMPLÉMENTAIRE: extrait de la pièce de Sénèque Texte 2 - Sénèque, Médée, 63-64 Dieux de l'Hymen, et toi, Lucine, gardienne du lit conjugal; Minerve, qui enseignas à Tiphys l'art de diriger le navire nouveau sur les flots obéissants; d'invoquer, chaos de l'étenelle nuit, régions souterraines de l'enfer, Ombres impies, souverain de ce royaume funeste, et toi, son épouse, enlevée par un séducteur plus fidèle, je vous invoque d'une voix sinistre : venez, déesses qui parûtes autrefois à mes noces ; apportez-moi la mort pour cette nouvelle épouse, la mort pour son père et pour toute cette race royale, et Laissez-moi vous demander un supplice plus terrible pour l'époux. Qu'il vive, mais pour réduit à regretter mon amour, à frapper deux fois à une porte étrangère comme un hôte fatal; et, ce qui est le vœu le plus cruel que je puis former contre lui, qu'il ait des enfants semblables à lui-même, semblables à leur mère! Je suis, oui, je suis déjà vengée j'ai des enfants. Mais c'est trop de plaintes et de paroles inutiles. N'irai-je pas contre mes ennemis? n'éteindrai-je pas les torches nuptiales et la clarté du jour? Le Soleil, père de ma famille, voit un pareil spectacle! Il se laisse voir lui-même, et, monté sur son char, suit 14 route accoutumée dans l'arur d'un ce sans nuages! ne recule pas, ine mers qu'elle sépare. C'est le seul parti qui me reste : je porterai comme ma rivale une torche d'hyménée, je réciterai les prières sacramentelles, et j'immolerai des victimes sur les autels consacrés pour ce grand jour. Cherche dans leurs entrailles mêmes le chemin de la vengeance, mon âme; si tu sais encore oser, et s'il te reste quelque chose de ta vigueur première, bannis toute crainte de femme, et revêts-toi de toutes les fureurs du Caucase. Tous les crimes qu'ont vus le Phase et le Pont, Corinthe les verra : je roule dans mon esprit des projets affreux, inouïs, abominables, qui doivent épouvanter à la fois le ciel et la terre. Blessures, meurtre, membres épars et sans sépulture, qu'est-ce que cela? mes premiers essais de jeune fille. Je veux que ma colère aujourd'hui soit plus terrible; femme et mère, il me faut de plus grands forfaits. Arme-toi de fureur, et prépare tout ce que tu as de rage et de puissance pour détruire ; que le souvenir de ta répudiation soit sanglant comme celui de tes noces. Comment vas-tu quitter ton époux? comme tu l'as suivi. Abrège ces vains retards ; tu es entrée dans ce palais par un crime, c'est par un crime qu'il faut en sortir. 46 LECTURE ANALYTIQUE : Jean Anouilh, Médée Il s’agit ici du début de la pièce de Jean Anouilh, Médée et sa nourrice habite une roulotte. MÉDÉE Elle s'arrête. Écoute. LA NOURRICE C'est le vent. C'est la fête. Il ne rentrera pas, ce soir non plus. MÉDÉE Mais quelle fête? Quel bonheur qui pue jusqu'ici leur sueur, leur gros vin, leur friture? Gens de Corinthe, qu'avez-vous à crier et à danser? Qu'est-ce qui se passe de si gai ce soir qui m'étreint, moi, qui m'étouffe?... Nourrice, nourrice, je suis grosse ce soir. J'ai mal et j'ai peur comme lorsque tu m'aidais à me tirer un petit de mon ventre... Aide-moi, nourrice! Quelque chose bouge dans moi comme autrefois et c'est quelque chose qui dit non à leur joie à eux là-bas, c'est quelque chose qui dit non au bonheur. Elle se serre contre la vieille, tremblante. Nourrice, si je crie tu mettras ton poing sur ma bouche, si je me débats tu me tiendras, n'est-ce pas? Tu ne me laisseras pas souffrir seule... Ah ! tiens-moi, nourrice, tiens-moi de toutes tes forces. Tiens-moi comme lorsque j'étais petite, comme le soir où j'ai failli mourir en enfantant. J'ai quelque chose à mettre au monde encore cette nuit, quelque chose de plus gros, de plus vivant que moi et je ne sais pas si je vais être assez forte... UN GARÇON, entre soudain et s'arrête. C'est vous, Médée? MÉDÉE, lui crie. Oui ! Dis vite! Je sais! LE GARÇON C'est Jason qui m'envoie. MÉDÉE Il ne rentrera pas? Il est blessé, mort? LE GARÇON Il vous fait dire que vous êtes sauvée. MÉDÉE Il ne rentrera pas ? LE GARÇON Il vous fait dire qu'il viendra, qu'il faut l'attendre. MÉDÉE Il ne rentrera pas? Où est-il? LE GARÇON Chez le roi. Chez Créon. MÉDÉE Emprisonné ? LE GARÇON Non. MÉDÉE, crie encore. Si ! C'est pour lui cette fête ? Parle ! Tu vois bien que je sais. C'est pour lui ? LE GARÇON Oui. C'est pour lui. MÉDÉE Qu'a-t-il donc fait ? Allons, dis vite. Tu as couru, tu es tout rouge, il te tarde d'y retourner. On danse, n'est- ce pas ? LE GARÇON Oui. MÉDÉE Et on boit? LE GARÇON 47 Six barriques ouvertes devant le palais! MÉDÉE Et les jeux, et les pétards, et les fusils qui partent tous ensemble vers le ciel. Vite, vite, petit, et tu auras joué ton rôle, tu pourras retourner là-bas et t'amuser. Tu ne me connais pas. Qu'est-ce que cela peut te faire ce que tu vas me dire? Pourquoi mon visage te fait-il peur? Tu veux que je sourie? Voilà, je souris. D'ailleurs, c'est plutôt une bonne nouvelle puisqu'on danse. Vite, petit, puisque je sais! LE GARÇON Il épouse Créuse, la fille de Créon. C'est demain matin la noce. MÉDÉE Merci, petit ! Va danser maintenant avec les filles de Corinthe. Danse de toutes tes forces, danse toute la nuit. Et quand tu seras vieux, rappelle-toi que c'est toi qui es venu dire à Médée. LE GARÇON, fait un pas. Qu'est-ce qu'il faudra lui dire? MÉDÉE A qui? LE GARÇON A Jason. MÉDÉE Dis-lui que je t'ai dit merci ! Le garçon s'en va. MÉDÉE, crie soudain. Merci, Jason! Merci, Créon ! Merci la nuit ! Merci tous ! Comme c'était simple, je suis délivrée... LA NOURRICE, s'approche. Mon aigle fière, mon petit vautour... MÉDÉE Laisse, femme ! Je n'ai plus besoin de tes mains. Mon enfant est venu tout seul. Et c'est une fille, cette fois. 0 ma haine ! Comme tu es neuve... Comme tu es douce, comme tu sens bon ! Petite fille noire, voilà que je n'ai plus que toi au monde à aimer. 50 DOCUMENTS COMPLÉMENTAIRES: Etude d’iconographies autour du mythe de Médée Gustave Moreau, Jason et Médée, 1865 Peintre et graveur français Gustave Moreau est essentiellement connu pour ses toiles symbolistes qui s’inspirent des grands maîtres de la Renaissance. A leur imitation, il choisit souvent des sujets tirés de l’Antiquité comme ici Jason et Médée qui présente le couple au moment de leur rencontre. Jason et Médée A Gustave Moreau. 5 En un calme enchanté, sous l'ample frondaison De la forêt, berceau des antiques alarmes, Une aube merveilleuse avivait de ses larmes, Autour d'eux, une étrange et riche floraison. Par l'air magique où flotte un parfum de poison, 51 10 Sa parole semait la puissance des charmes ; Le Héros la suivait et sur ses belles armes Secouait les éclairs de l'illustre Toison. Illuminant les bois d'un vol de pierreries, De grands oiseaux passaient sous les voûtes fleuries, Et dans les lacs d'argent pleuvait l'azur des cieux. L'Amour leur souriait, mais la fatale Epouse Emportait avec elle et sa fureur jalouse Et les philtres d'Asie et son père et les Dieux. Document : Portrait de Médée extrait du film du même nom (1969) Pier Paolo Pasolini est un réalisateur italien. Il s’est souvent attaché à mettre en scène les mythes fondateurs de notre civilisation : Œdipe Roi inspiré de la pièce de Sophocle et réfléchissant sur le mythe d’Œdipe. Avec Médée, le réalisateur adapte le mythe de la femme magicienne en s’inspirant de la tragédie d’Euripide. Il choisit cependant d’en atténuer la violence afin de montrer une épouse meurtrie à la dignité et à la force d’âme admirables. Image extraite du film de Pasolini avec Maria Callas dans le rôle de Médée
Docsity logo


Copyright © 2024 Ladybird Srl - Via Leonardo da Vinci 16, 10126, Torino, Italy - VAT 10816460017 - All rights reserved