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Analyse linéaire pour le bac de francais, Lectures de Français

Analyse linéaire pour les élèves de premiere générale

Typologie: Lectures

2021/2022

Téléchargé le 09/04/2022

1ere23-fahmy-yara
1ere23-fahmy-yara 🇫🇷

4.7

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Aperçu partiel du texte

Télécharge Analyse linéaire pour le bac de francais et plus Lectures au format PDF de Français sur Docsity uniquement! séance n° 8 : étude des remarques 13, 50, 94 du livre VIII Etude linéaire n°10 : La Bruyère, Les Caractères, livre VIII, remarques 13, 50, 94, 1688 O. I. Livre VIII, « De la Cour », remarque 13 5 10 15 20 25 Il n’y a rien qui enlaidisse certains courtisans comme la présence du prince : à peine les puis-je reconnaître à leurs visages ; leurs traits sont altérés1, et leur contenance2 est avilie3. Les gens fiers et superbes sont les plus défaits4, car ils perdent plus du leur ; celui qui est honnête et modeste s’y soutient5 mieux : il n’a rien à réformer6. Livre VIII, « De la Cour », remarque 50 L’on court7 les malheureux pour les envisager8 ; l’on se range en haie, ou l’on se place aux fenêtres, pour observer les traits et la contenance d’un homme qui est condamné, et qui sait qu’il va mourir : vaine9, maligne, inhumaine curiosité ; si les hommes étaient sages, la place publique serait abandonnée, et il serait établi qu’il y aurait de l’ignominie10 seulement à voir de tels spectacles. Si vous êtes si touchés de curiosité, exercez-la du moins en un sujet noble : voyez un heureux, contemplez-le dans le jour même où il a été nommé à un nouveau poste, et qu’il en reçoit les compliments ; lisez dans ses yeux, et au travers d’un calme étudié et d’une feinte modestie, combien il est content et pénétré de soi-même ; voyez quelle sérénité cet accomplissement de ses désirs répand dans son cœur et son visage, comme il ne songe plus qu’à vivre et à avoir de la santé, comme ensuite sa joie lui échappe et ne peut plus dissimuler, comme il plie sous le poids de son bonheur, quel air froid et sérieux il conserve pour ceux qui ne sont plus égaux : il ne leur répond pas, il ne les voit pas ; les embrassements et les caresses des grands, qu’il ne voit plus de si loin, achèvent de lui nuire ; il se déconcerte11, il s’étourdit : c’est une courte aliénation. Vous voulez être heureux, vous désirez des grâces12 ; que de choses pour vous à éviter ! Livre VIII, « De la Cour », remarque 94 Qu’un favori s’observe de fort près ; car s’il me fait moins attendre dans son antichambre13 qu’à l’ordinaire, s’il a le visage plus ouvert, s’il fronce moins le sourcil, s’il m’écoute plus volontiers, et s’il me reconduit14 un peu plus loin, je penserai qu’il commence à tomber, et je penserai vrai. L’homme a bien peu de ressources dans soi-même, puisqu’il lui faut une disgrâce15 ou une mortification16 pour le rendre plus humain, plus traitable, moins féroce, plus honnête homme. Exécution en place de Grève, 1757, gravure sur bois, anonyme. 1- Altérer : Changer une chose de bien en mal 2- Contenance : Maintien, manière de se tenir, de se montrer 3- Avilir : rendre vil = Qui est de peu de valeur, Bas, abject, méprisable 4- Défait : Qui a perdu sa contenance et sa bonne façon 5- Se soutenir : Se maintenir, ne pas se démentir 6- Réformer : Rectifier, c'est-à-dire rétablir dans l'ancienne forme ou dans une forme meilleure 7- On court : On recherche avec empressement 8- Envisager : Regarder une personne au visage 9- Vain, e : Vide, sans valeur, sans effet 10- Ignominie : Grand déshonneur 11- Se déconcerter : Perdre contenance 12- Grâce : Ce qui est accordé à quelqu'un comme lui étant agréable, utile, sans lui être dû strictement 13- Antichambre : Pièce d'entrée d'un appartement 14- Reconduire : Accompagner par civilité jusqu'à la porte une personne qui se retire après une visite 15- Disgrâce : Perte des bonnes grâces d'une personne puissante 16- Mortification : Humiliation qu'on éprouve par quelques refus, par quelques mépris, par quelques réprimandes Introduction : La Bruyère a écrit les Caractères de 1688 à 1696, remaniant son œuvre à maintes reprises. Le recueil est organisé en chapitres et présente la hiérarchie sociale de son temps, avec une progression dans les thèmes abordés. Dans ce recueil nous trouvons trouve des réflexions, des maximes, mais aussi des portraits. Les trois remarques portées à notre étude sont issues du chapitre VIII, chapitre central puisque le livre en compte 16 et chapitre plus long que les autres, donc mis en exergue. Le moraliste y dresse un tableau peu flatteur des personnes gravitant autour du roi Louis XIV qui adoptent souvent, ainsi que ces remarques le montrent, un comportement allant à l’encontre de leur naturel, de leur « caractère ». Problématique : Nous nous demanderons comment La Bruyère réussit à montrer à travers ces trois remarques à quel point la comédie sociale, et en particulier celle de la Cour, pervertit le naturel des gens au point qu’ils en viennent à perdre leur caractère. sous-entend donc que les hommes ne sont pas sages et que « la place publique » ne sera jamais « abandonnée ». Dans cette dernière phrase, une critique sous-jacente de l’autorité point à travers l’expression « serait établi », verbe à la voix passive sans complément d’agent, complément d’agent laissé à la discrétion du lecteur : est-ce le roi ? les autorités religieuses ? la doxa au sens philosophique qui devrait établir que le fait d’assister à ces exécutions est une « ignominie » ? 3e mouvement : remarque 50 : - lignes 10 à 21 (« aliénation ») : l’ascension sociale change radicalement les hommes Si vous êtes si touchés de curiosité, exercez-la du moins en un sujet noble : voyez un heureux, contemplez-le dans le jour même où il a été nommé à un nouveau poste, et qu’il en reçoit les compliments ; lisez dans ses yeux, et au travers d’un calme étudié et d’une feinte modestie, combien il est content et pénétré de soi-même ; voyez quelle sérénité cet accomplissement de ses désirs répand dans son cœur et son visage, comme il ne songe plus qu’à vivre et à avoir de la santé, comme ensuite sa joie lui échappe et ne peut plus dissimuler, comme il plie sous le poids de son bonheur, quel air froid et sérieux il conserve pour ceux qui ne sont plus égaux : il ne leur répond pas, il ne les voit pas ; les embrassements et les caresses des grands, qu’il ne voit plus de si loin, achèvent de lui nuire ; il se déconcerte11, il s’étourdit : c’est une courte aliénation. Le deuxième mouvement de cette remarque voit l’énonciation changer brusquement : nous passons d’une sentence générale à la troisième personne sur la curiosité des hommes devant les exécutions à mort à un vouvoiement apostrophant directement le lecteur. Le lecteur comprend donc qu’il est clairement visé par les critiques précédentes. Cette interpellation est renforcée par l’emploi de nombreux impératifs (« exercez », « voyez », « contemplez », « lisez », « voyez »). Ces injonctions attirent l’attention du lecteur qui pense ainsi recevoir une véritable leçon philosophique, comme le laissait présager l’adjectif « sages » du mouvement précédent. Les deux premières lignes confirment d’ailleurs cette impression, à travers les termes « sujet noble » et « heureux », adjectif faisant référence au bonheur recherché par les philosophes. Le lecteur a donc l’impression que La Bruyère dans cette remarque a élevé son propos et va lui dispenser une leçon philosophique sortant du contexte de la Cour et observant les « sages », les hommes qui sont véritablement, contrairement aux courtisans, dignes d’être admirés, mais il n’en est rien : nous nous rendons compte de manière abrupte que cet « heureux » est en fait un homme ayant reçu une promotion sociale. La Bruyère a donc dérouté son lecteur et le contraste entre le sage philosophique et cet homme venant de s’élever socialement est très saisissant, il crée un décalage ironique fort. Le moraliste nous invite donc à prendre comme sujet d’observation un homme venant de recevoir une promotion. Nous avons ici, comme dans le premier mouvement, la métaphore du théâtre, puisque nous assistons à un spectacle, tel celui que nous donnera à voir le portrait de Pamphile dans la remarque 50 du livre IX : la position de spectateur du lecteur apparaît nettement à travers les verbes appartenant au champ lexical du regard qui lui sont attribués : « voyez » (redoublé), « contemplez ». Ce portrait est ainsi une véritable saynète qui se déroule sous nos yeux dans une très longue phrase hachée par de nombreux signes de ponctuation, parataxe qui mime à la fois la rapidité des réactions de l’homme observé et les déplacements du regard de l’observateur. Dans ce portrait, l’ironie de La Bruyère excelle, notamment dans le décalage entre l’utilisation d’hyperboles pour décrire les réactions de l’homme observé et la réalité : la promotion sociale semble être une source de vie pour celui qui l’a reçue, comme l’attestent les termes « sérénité », « accomplissement », « cœur », « ne songe plus qu’à vivre ». Cependant ces hyperboles sont à mettre en contraste avec un lexique bien plus négatif, révélant la critique de La Bruyère qui rejoint celle que nous avions dans la remarque 13 : le courtisan porte un masque, nous sommes pleinement dans le theatrum mundi, avec les termes « étudié », « feinte », « dissimuler ». Cette remarque poursuit la critique assénée dans la remarque 13 et cette fois La Bruyère ne se contente pas de mentionner le physique altéré par l’ascension sociale, il affirme que le masque que les courtisans sont obligés de porter est très lourd voire prend vie indépendamment de l’acteur qui le porte. Cela est mentionné avec l’adverbe « ensuite », qui marque un changement dans les réactions de l’homme décrit : après avoir profité de la joie procurée par l’annonce de sa promotion sociale, il va endosser totalement son rôle social et ce rôle va le dépasser. Nous pouvons constater ce phénomène à travers la personnification « sa joie lui échappe », à travers le contraste comique entre « il plie sous le poids » qui sous-entend un accablement, et le mot « bonheur », à travers les termes décrivant le mépris dont fait preuve celui qui est décrit pour ceux qu’il considère comme inférieurs « air froid et sérieux », « il ne leur répond pas, il ne les voit pas » et à travers les termes forts et ordonnés en gradation « nuire », « déconcerte », « s’étourdit », « aliénation ». Comme dans la remarque 13, La Bruyère affirme donc que le rôle joué par les courtisans aboutit à une perversion, une altération qui était physique dans la remarque 13 et devient une altération du comportement et une perte de soi-même dans la remarque 50. La Bruyère adresse également un avertissement au lecteur en décrivant parfaitement la société pyramidale de son époque : d’une part les courtisans qui obtiennent des promotions méprisent ceux qui leur paraissent inférieurs (« il ne les voit pas ») mais sont eux-mêmes méprisés par les « grands » (« les caresses des grands, qu’il ne voit plus de si loin », la répétition du mot « voit » vient renforcer cet aspect pyramidal), d’autre part cette joie procurée par la promotion sociale est « courte », elle n’est pas destinée à durer, comme le prouve la remarque 94. 4e mouvement : dernière phrase de la remarque 50 : morale adressée directement au lecteur Vous voulez être heureux, vous désirez des grâces12 ; que de choses pour vous à éviter ! La dernière phrase de cette remarque, qui contraste par sa brièveté avec les deux précédentes, sonne comme une morale. Il est intéressant de noter que c’est au lecteur de tirer ses propres conclusions puisqu’il n’y a pas de connecteur logique notifiant le rapport de conséquence, ni avec ce qui précède, ni même au sein de la morale où le point-virgule tient lieu de connecteur. De même, le terme « choses » est assez vague pour pouvoir recouvrir à la fois tout ce qui précède et d’autres écueils de la Cour, c’est au lecteur de mettre ce qu’il veut derrière ce mot générique. La Bruyère reprend ici volontairement le mot « heureux » que nous avions à la ligne 12 et retrouvions par dérivation avec le terme « bonheur » à la ligne 18. Mais cette fois, le terme n’est plus galvaudé : l’auteur invite à trouver le vrai bonheur, au sens philosophique, et cela passe par, si ce n’est un retrait total de la Cour tels les stoïciens, du moins une prise de conscience des dangers auxquels nous pouvons être confrontés à la Cour, d’où l’intérêt d’observer ceux qui se trouvent pris dans ces dangers, afin de pouvoir les « éviter ». 5e mouvement : premier paragraphe remarque 94 : la disgrâce change également les hommes Qu’un favori s’observe de fort près ; car s’il me fait moins attendre dans son antichambre13 qu’à l’ordinaire, s’il a le visage plus ouvert, s’il fronce moins le sourcil, s’il m’écoute plus volontiers, et s’il me reconduit14 un peu plus loin, je penserai qu’il commence à tomber, et je penserai vrai. Le premier mouvement de cette remarque est constitué d’une longue phrase qui débute comme une recette : La Bruyère donne un conseil à son lecteur en passant par l’injonction au subjonctif. Nous avons donc en quelque sorte le « manuel de survie » à la Cour pour « éviter » les dangers dont il était question dans la remarque 50. Cette remarque débute donc de manière générale et place à nouveau le lecteur comme observateur des courtisans, avec le verbe « s’observe ». Cependant, La Bruyère va s’impliquer fortement dans son propos en utilisant, comme dans la remarque 13, la première personne, afin de donner du crédit à ses paroles, nous avons l’impression qu’il partage une expérience vécue. Ici, nous avons la poursuite de la remarque 50, avec cette fois la description non d’un courtisan venant d’obtenir une promotion sociale, mais sur le point d’être déchu et dont La Bruyère décrit le comportement en énumérant des détails très précis (l’ « antichambre », « le visage », « l’aptitude au dialogue, etc.) Encore une fois, comme dans la remarque 50, le moraliste engage son lecteur à observer l’apparence physique et le comportement des courtisans afin d’y déceler ce qu’ils pensent. Nous pouvons remarquer que La Bruyère joue sur l’antithèse en mobilisant une succession de comparatifs d’infériorité associés à des termes négatifs (« moins attendre », « fronce moins ») et de supériorité associés à des termes positifs (« plus ouvert », « m’écoute plus volontiers », « me reconduit plus loin »). Le moraliste veut donc montrer que les comportements civils sont inversement proportionnels à la hauteur dans l’échelle sociale. Son propos est affirmé de manière forte avec l’utilisation du futur de certitude dans un système hypothétique introduit par « si » et non du conditionnel et par l’utilisation en fin de phrase de l’adverbe « vrai ». 6e mouvement : second paragraphe remarque 94 : morale générale sur la disgrâce L’homme a bien peu de ressources dans soi-même, puisqu’il lui faut une disgrâce15 ou une mortification16 pour le rendre plus humain, plus traitable, moins féroce, plus honnête homme. Le second paragraphe de cette remarque voit son énonciation changer : après s’être impliqué avec la première personne, La Bruyère énonce une sorte de morale à la troisième personne qui débute par le terme générique « l’homme » et mobilise le présent de vérité générale. Le paragraphe précédent était donc un exemple venant illustrer cette morale, nous avons ici un raisonnement inductif. Cette conclusion
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