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Beaumarchais, Le Mariage de Figaro, Le monologue de Figaro, V, 3 Analyse, Guide, Projets, Recherche de Littérature

Typologie: Guide, Projets, Recherche

2020/2021

Téléchargé le 23/08/2021

Robin_HH
Robin_HH 🇫🇷

4.5

(38)

90 documents

Aperçu partiel du texte

Télécharge Beaumarchais, Le Mariage de Figaro, Le monologue de Figaro, V, 3 Analyse et plus Guide, Projets, Recherche au format PDF de Littérature sur Docsity uniquement! 30 35 40 Beaumarchais, Le Mariage de Figaro, Le monologue de Figaro, V, 3 Suzanne, d'accord avec la Comtesse, a fait parvenir au Comte un billet, destiné à l'attirer dans un piège, "sous les marronniers". Figaro a vu le Comte lire la lettre, et, grâce à une épingle, a su que c'est Suzanne qui l'a rédigée. Il se croit trahi, et laisse éclater ses ressentiments… Figaro, seul, se promenant dans l'obscurité, dit du ton le plus sombre : Ô femme ! femme ! femme ! créature faible et décevante (‘) L.. nul animal créé (?) ne peut manquer à son instinct : le tien est-il donc de tromper ?.. Après m'avoir obstinément refusé quand je l'en pressais devant sa maîtresse ; à l'instant qu'elle me donne sa parole, au milieu même de la cérémonie (*)... Il riait en lisant, le perfide (*) ! et moi comme un benêt (°).. Non, monsieur le Comte, vous ne l'aurez pas. vous ne l'aurez pas. Parce que vous êtes un grand seigneur, vous vous croyez un grand génie !... Noblesse, fortune, un rang, des places, tout cela rend si fier ! Qu'avez-vous fait pour tant de biens ? Vous vous êtes donné la peine de naître, et rien de plus. Du reste, homme assez ordinaire ; tandis que moi, morbleu ! perdu dans la foule obscure, il m'a fallu déployer plus de science et de calculs pour subsister seulement, qu'on n'en a mis depuis cent ans à gouverner toutes les Espagnes (°) : et vous voulez jouter (”).. On vient... c'est elle. ce n'est personne. - La nuit est noire en diable, et me voilà faisant le sot métier de mari ) quoique je ne le sois qu'à moitié ! (// s'assied sur un banc.) Est-il rien de plus bizarre que ma destinée ? Fils de je ne sais pas qui, volé par des bandits, élevé dans leurs mœurs, je m'en dégoûte et veux courir une carrière honnête ; et partout je suis repoussé ! J'apprends la chimie, la pharmacie, la chirurgie, et tout le crédit d'un grand seigneur peut à peine me mettre à la main une lancette 6) vétérinaire ! - Las d'atirisier des bêtes malades, et pour faire un métier contraire, je me jette à corps perdu dans le théâtre : me fussé-je mis une pierre au cou |! Je broche une comédie dans les mœurs du sérail ; auteur espagnol, je crois pouvoir y fronder Mahomet sans scrupule : à l'instant un envoyé... de je ne sais où se plaint que j'offense dans mes vers la Sublime Porte, la Perse, une partie de la presqu'île de l'Inde, toute l'Égypte, les royaumes de Barca, de Tripoli, de Tunis, d'Alger et de Maroc : et voilà ma comédie flambée, pour plaire aux princes mahométans, dont pas un, je crois, ne sait lire, et qui nous meuririssent l'omoplate en nous disant : chiens de chrétiens ! - Ne pouvant avilir l'esprit, on se venge en le maltraitant. - Mes joues creusaient ; mon terme était échu ; je voyais de loin arriver l'affreux recors, la plume fichée dans sa perruque ; en frémissant je m'évertue. [...] Il s'élève une question sur la nature des richesses ; et, comme il n'est pas nécessaire de tenir les choses pour en raisonner, n'ayant pas un sol, j'écris sur la valeur de l'argent et sur son produit net : sitôt je vois du fond d'un fiacre baisser pour moi le pont d'un château fort (°), à l'entrée duquel je laissai l'espérance et la liberté. (// se lève.) Que je voudrais bien tenir un de ces puissants de quatre jours, si légers sur le mal qu'ils ordonnent, quand une bonne disgrâce a cuvé son orgueil ! Je lui dirais. que les sottises imprimées n'ont d'importance qu'aux lieux où l'on en gêne le cours ; que sans la liberté de blâmer, il n'est point d'éloge flatieur ; et qu'il n'y a que les petits hommes qui redoutent les petits écrits. (// se rassied.) Las de nourrir un obscur pensionnaire, on me met un jour dans la rue ; et comme il faut dîner, quoiqu'on ne soit plus en prison, je taille encore ma plume et demande à chacun de quoi il est question : on me dit que, pendant ma retraite économique, il s'est établi dans Madrid un système de liberté sur la vente des productions, qui s'étend même à celles de la presse ; et que, pourvu que je ne parle en mes écrits ni de l'autorité, ni du culte, ni de la politique, ni de la morale, ni des gens en place, ni des corps e) en crédit, ni de l'Opéra, ni des autres spectacles, ni de personne qui tienne à quelque chose, je puis tout imprimer librement, sous l'inspection de deux ou trois censeurs. Pour profiter de cette douce liberté, j'annonce un écrit périodique, et, croyant n'aller sur les brisées d'aucun autre, je le nomme Journal inutile. Pou-ou ! je vois s'élever contre moi mille pauvres diables à la feuille (2, on me supprime (5), et me voilà derechef sans emploi ! 1. décevante : trompeuse. 2.nul animal créé: sous-entendu "par comprenez "nulle créature". 8. La cérémonie : fête en l'honneur du mariage de Suzanne et Figaro. 4. Allusion aux événements qui se sont déroulés pendant le mariage de Figaro: le valet a vu le Comte lire un billet écrit par Suzanne, et il se croit trahi. Le mot "perfide" (‘qui manque à sa parole") désigne le Comte. 5. benêt : idiot. 6. Les Espagnes l'Espagne et les territoires conquis depuis Christophe Colomb. Dieu" ; 7. Jouter : lutter. 8. faisant le sot métier de mari: le mari est traditionnellement, dans la farce, cocu et jaloux. 9. lancette : instrument de chirurgie qui sert à pratiquer les saignées. 10. Une prison — qui fait songer la Bastille. 11. corps : institutions. 12. pauvres diables à la feuille: écrivains rémunérés à la feuille — qui sont la plupart du temps dans la misère. 13. on me supprime : on interdit la publication de mon journal. Beaumarchais, Le Mariage de Figaro, Le monologue de Figaro, V, 3 ° La critique de la noblesse. Emporté par la jalousie, Figaro laisse éclater sa rancœur contre le Comte, et glisse vite du domaine sentimental aux attaques qui visent les privilèges de l'aristocratie. Dans une énumération redondante, le valet résume les "biens" dont jouit une caste : "Noblesse, fortune, un rang, des places". La "noblesse" et le rang" font allusion à la considération qui entoure un homme "bien né", la "fortune" et les "places" — c'est-à-dire les métiers bien payés, en vue, où l'on est en position d'autorité, font référence aux avantages matériels. Or, cette position sociale est acquise, dès la naissance, par des gens qui se sont "donné la peine de naître, et rien de plus". La formule, restée célèbre, est d'une ironie mordante, grâce à une alliance de mots éloquente : "se donner la peine" appelle en effet la mention d'un effort, d'une difficulté surmontée, alors que le verbe "naître" indique une action totalement involontaire, subie par un bébé qui ne peut avoir encore, bien évidemment, aucun mérite personnel. Une antithèse permet à Figaro de souligner l'abîme qui le sépare des privilégiés : le Comte n'est qu'un "homme assez ordinaire", tandis que lui a "déploy[é] plus de science et de calculs pour subsister seulement, qu'on n'en a mis depuis cent ans à gouverner toutes les Espagnes". L'hyperbole par laquelle l'ancien barbier de Séville désigne son talent s'oppose à l'adjectif "ordinaire" et met en lumière la tare d'une société qui ne récompense pas le mérite individuel. Il faut également signaler un travers moral dénoncé par Figaro qui s'exclame :" Parce que vous êtes un grand seigneur, vous vous croyez un grand génie !". Le parallélisme entre "grand seigneur" et "grand génie" éclaire les causes de l'aveuglement où tombent les aristocrates, convaincus d'avoir une intelligence supérieure (c'est le sens du mot "génie") alors qu'ils ont simplement la chance d'appartenir à une classe sociale qui leur a tout donné. Figaro, dans son indignation, voudrait faire admettre cette vérité au Comte, et s'adresse à son maître comme s'il se trouvait devant lui ; il lui pose une question oratoire : "Qu'avez-vous fait pour tant de biens ?" à laquelle ce dernier se verrait contraint de répondre : "Rien". D'une manière analogue, Figaro voudrait avoir en face de lui "un de ces puissants de quatre jours, si légers sur le mal qu'ils ordonnent, quand une bonne disgrâce a cuvé son orgueil !", afin de lui faire prendre conscience des conséquences de ses actes. Figaro dénonce ainsi les privilèges de la naissance, qui sont injustifiés, et plongent ceux qui en bénéficient dans la vanité et l'égoïsme. | M. PARPÈRE , le 22 octobre 2009.
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