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Dérive à partir de Oreste, face cachée d'Oedipe. Ouvrage de Michèle Gastambide et Jean-Pierre Lebrun, Essai de Littérature

Typologie: Essai

2018/2019

Téléchargé le 14/10/2019

Denise_Orleans
Denise_Orleans 🇫🇷

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Télécharge Dérive à partir de Oreste, face cachée d'Oedipe. Ouvrage de Michèle Gastambide et Jean-Pierre Lebrun et plus Essai au format PDF de Littérature sur Docsity uniquement! Dérive à partir de Oreste, face cachée d'Oedipe. Ouvrage de Michèle Gastambide et Jean-Pierre Lebrun1 Une petite histoire actuelle. Une petite fille de 4 ans demande à son grand-père si elle peut prendre une glace dans le congélateur. Celui-ci lui dit que non, que l'on va passer à table dans quelques minutes et que les glaces, c'est pour le dessert. Elle va voir sa mère: même demande. Celle-ci répond: oui. La petite revient triomphante voir le grand-père : ta fille n'obéit pas, lui-dit elle. Celui-ci a un petit moment d'étonnement: ma fille? Oui, ta fille, qui est ma mère. Tu dis non, elle dit oui. Elle fait n'importe quoi. Le père est absent; elle a recours au représentant de l'autorité. Elle demande de sortir du caprice maternel. La mère dit oui, pour se débarrasser de la demande insistante de sa fille, elle sait d'expérience, que si elle n'obtempère pas, c'est la crise assurée. Le grand-père lui se réfère à une règle de vie familiale, donc à une dimension sociale. Elle distingue finement le oui de la jouissance maternelle du non de la castration. Mais elle demande aussi que cette distinction ait un garant. L'appel au grand-père l'inscrit dans une lignée d'où découle l'autorité. C'est toute la question: au nom de quoi disons nous oui ou non? Je laisse cette histoire brute de décoffrage, pour aborder dans son sillage un certain nombre de questions . Partons de quelques énoncés: 1) «Il n'y a pas de rapport sexuel.» Lacan, L'Etourdit, 1973. Prenons cet non-rapport, qui structure la vie de couple, au sens mathématique. Ex: a/b= 1; d'où l'on déduit que a=b Si l'on transpose au rapport homme/femme, ça ne fait pas du 1. Même si Aristophane dans Le Banquet y va de son petit mythe sur un idéal de complétude, en estimant que l'on s'accouple pour retrouver la sphère d'origine, ce n'est jamais qu'un fantasme qui recouvre l'impossible de l'écriture du rapport sexuel. 2) Qu'en est-il lorsqu'on passe du non-rapport homme/femme au non-rapport père/mère? Une femme dit à un homme qu'elle est enceinte. Restons dans un schéma classique, même si le mariage est décrété pour tous. Cette parole témoigne d'un manque, d'une perte de jouissance, d'un renoncement à la toute-puissance. De plus cette parole fait 1 Ce texte m'a servi d'appui pour questionner Michèle Gastambide et Jean-Pierre Lebrun, qui présentaient leur ouvrage le samedi 6 avril à Montpellier. Jean-Daniel Causse, Professeur des universités, Directeur du Département de psychanalyse de l'Université Paul Valéry Montpellier III  et Claude Allione, psychologue et psychanalyste, intervenaient également comme discutants, sous la présidence de Bob Salzmann, psychanalyste, président de l’Association Lacanienne Internationale du Languedoc-Roussillon 1 appel à une autre dimension que la reproduction biologique. C'est cette parole qui fait d'une femme une mère. C'est un effet-mère... Mais l'homme qui reçoit cette parole qui le désigne comme père, ne peut occuper cette fonction qu'au prix d'une croyance aveugle dans la parole de cette femme. C'est la foi du charbonnier. Donc c'est aussi au prix d'un manque, d'une perte de jouissance, d'un renoncement à tout savoir que cette parole d'une femme le fait père. C'est cette perte assumée et dissymétrique qui pour l'une porte sur la puissance et l'autre sur le savoir, qu'un espace s'ouvre en creux où viendra se loger un petit d'homme. La vérité est celle qui sort de la bouche de chacun. Père et mère sont donc des effets de la parole. Le droit romain y insistait à sa façon en énonçant: mater certissima, pater semper incertus est. La mère on en est absolument sûr, le père, lui, est toujours frappé d'incertitude. Or sur ce point nous sommes devant une difficulté liée, du fait du discours de la science, à une volonté de vérification absolue, notamment sur le plan de la génétique. Mais vérité de la parole n'est pas vérification de la science. Le droit de la filiation a été modifié en France dans les années 90. Il permet aujourd'hui de demander une recherche en paternité à partir d'une expertise génétique. Plus besoin de se parler, l'expert (l'ex-père!) généticien dira le vrai du vrai de la paternité. C'est ce qui est arrivé il y a quelques années à une jeune fille, Aurore Brossard, dont la mère prétendait que le père était Yves Montand. L'expertise à montré que l'ADN présent dans le cadavre de Montand était différent de celui présent dans le corps vivant d'Aurore Brossard. Mais quand bien même il aurait été le même, qu'est ce qu'on aurait trouvé, si ce n'est la trace du géniteur? Car un père est issu de l'échange de paroles entre un homme et une femme. Ces paroles offrent un substrat, « l'humus humain », dit Lacan, qui modifie profondément les rejetons qui naissent de cette union qui ne fait pas rapport. Sur ce plan nous sommes tous des OGM, des organismes génétiquement modifiés par ce que Freud nommait le spacheapparat, l'appareil-à-parler. Le Nom-du-Père, comme capacité de représenter l'absence, en étant la matrice, que chaque sujet met en acte. 3) Schéma de la psychogénèse 2 διοσδότοις σκήπτροισι τιµαλφούµενον, κα τα τα πρ ς γυναικός, ο τιὶ ῦ ὸ ὔ θουρίοις τόξοις κηβόλοισιν, στἑ ὥ ᾽ µαζόνος,Ἀ λλ ς κούσ , Παλλ ς ο τἀ ᾽ ὡ ἀ ῃ ὰ ἵ ᾽ φήµενοιἐ ψήφ διαιρε ν το δεῳ ῖ ῦ πράγµατος πέρι. 630 Ἀπ στρατείας γάρ νινὸ µποληκόταἠ “τ πλε στ µεινον ε φροσινὰ ῖ ᾽ ἄ ὔ δεδεγµένη, δροίτ περ ντι λουτρ κ πῃ ῶ ὰ ἀ ὶ τέρµατι φ ρος περεσκήνωσεν”, ν δᾶ ἐ ᾽ τέρµονιἀ κόπτει πεδήσασ νδρα᾽ ἄ δαιδάλ πέπλ . 635ῳ ῳ Ἀνδρ ς µ ν µ ν ο τοςὸ ὲ ὑ ῖ ὗ ε ρηται µόροςἴ το παντοσέµνου, τοῦ ῦ στρατηλάτου νε ν.ῶ Ταύτην τοιαύτην ε πον, ςἶ ὡ δηχθ λεώς,ῇ σπερ τέτακται τήνδε κυρ σαιὅ ῶ δίκην. Χορός Πατρ ς προτιµ Ζε ςὸ ᾷ ὺ µόρον τ σ λόγ · 640ῷ ῷ ῳ α τ ς δ δησε πατέραὐ ὸ ᾽ ἔ πρεσβύτην Κρόνον. Π ς τα τα τούτοις ο κῶ ῦ ὐ ναντίως λέγεις;ἐ divinateur, et je ne dirai point de mensonges. Jamais, sûr mon trône fatidique, je n'ai rien dit d'un homme, ou d'une femme, ou d'une ville, que Zeus, père des Olympiens, ne m'ait ordonné de dire. Souvenez-vous de prendre mes paroles pour ce qu'elles valent et d'obéir à la volonté de mon père. Aucun serment n'est au-dessus de Zeus. LE CHŒUR DES EUMÉNIDES. Zeus, d'après ce que tu dis, t'avait dicté l'oracle par lequel tu as ordonné à cet Oreste de venger le meurtre de son père, sans respect pour sa mère ? APOLLON. Ce n'est point la même chose que de voir une femme égorger un vaillant homme honoré du sceptre, don de Zeus, et qui n'a point été percé de flèches guerrières lancées de loin, comme celles des Amazones. Écoute, Pallas ! Écoutez aussi, vous qui siégez pour juger cette cause. A son retour de la guerre d'où il rapportait de nombreuses dépouilles, elle l'a reçu par de flatteuses paroles ; et, au moment où, s'étant lavé il allait sortir du bain, elle l'a enveloppé d'un grand voile, et elle l'a frappé tandis qu'il était inextricablement embarrassé. Telle a été la destinée fatale de cet homme très vénérable, du chef des nefs. Je dis que 5 Ὑµ ς δ κούειν τα τ γᾶ ᾽ ἀ ῦ ᾽ ἐ ὼ µαρτύροµαι. πόλλωνἈ Ὦ παντοµισ κνώδαλα,ῆ στύγη θε ν,ῶ πέδας µ ν ν λύσειεν, στιὲ ἂ ἔ το δ κος 645ῦ ᾽ ἄ κα κάρτα πολλ µηχανὶ ὴ ὴ λυτήριος· νδρ ς δ πειδ ν α µἀ ὸ ᾽ ἐ ὰ ἷ ᾽ νασπάσ κόνιςἀ ῃ παξ θανόντος, ο τις στἅ ὔ ἔ ᾽ νάστασις.ἀ Τούτων π δ ς ο κ ποίησενἐ ῳ ὰ ὐ ἐ πατ ρὴ ο µός, τ δ λλα πάντ νωὑ ὰ ᾽ ἄ ᾽ ἄ τε κα κάτω 650ὶ στρέφων τίθησιν ο δ νὐ ὲ σθµαίνων µένει.ἀ Χορός Π ς γ ρ τ φεύγειν το δῶ ὰ ὸ ῦ ᾽ περδικε ς ρα·ὑ ῖ ὅ τ µητρ ς α µ µαιµον κχέαςὸ ὸ ἷ ᾽ ὅ ἐ πέδοι πειτ ν ργει δώµατ ο κήσειἔ ᾽ ἐ Ἄ ᾽ ἰ πατρός; Ποίοισι βωµο ς χρώµενος το ςῖ ῖ δηµίοις; 655 Ποία δ χέρνιψ φρατέρωνὲ προσδέξεται; telle elle a été afin que l'esprit de ceux qui jugent cette cause en soit mordu. LE CHŒUR DES EUMÉNIDES. Zeus, d'après tes paroles, est plus irrité du meurtre d'un père que de celui d'une mère. Mais, lui-même, il a chargé de chaînes son vieux père Cronos. Pourquoi n'as-tu point opposé ceci à ce que tu as dit ? Pour vous, vous l'avez entendu ; je vous prends à témoin. APOLLON. Ô les plus abominables des bêtes détestées des dieux ! On peut rompre des chaînes ; il y a un remède à cela, et d'innombrables moyens de s'en délivrer ; mais quand la poussière a bu le sang d'un homme mort, il ne peut plus se relever. Mon père n'a point enseigné d'incantations pour ceci, lui qui, au- dessus et au-dessous de la terre, ordonne et fait rouler toutes choses, et dont les forces sont toujours les mêmes. LE CHŒUR DES EUMÉNIDES. Comment donc défendras-tu l'innocence de cet homme ? Vois ! après avoir répandu le sang de sa mère, son propre sang, pourra-t-il habiter dans Argos la demeure de son père ? A quels autels publics sacrifiera-t-il ? quelle phratrie lui donnera place à ses 6 libations ? πόλλωνἈ Κ α το το λέξω, κα µάθὶ ῦ ὶ ᾽ ς ρθ ς ρ .ὡ ὀ ῶ ἐ ῶ Ο κ στι µήτηρ κεκληµένουὔ ἔ ἡ τέκνου τοκεύς, τροφ ς δ κύµατοςὸ ὲ νεοσπόρου. Τ ίκτει δ θρ σκων, δ᾽ ὁ ῴ ἡ ᾽ περ ξέν ξένη 660ἅ ῳ σωσεν ρνος, ο σι µ βλάψἔ ἔ ἷ ὴ ῃ θεός. Τ εκµήριον δ το δέ σοι δείξωὲ ῦ λόγου. Π ατ ρ µ ν ν γένοιτ νευὴ ὲ ἂ ᾽ ἄ µητρός· πέλας µάρτυς πάρεστι πα ςῖ λυµπίου Διός,Ὀ ο δ ν σκότοισι νηδύοςὐ ᾽ ἐ τεθραµµένη, 665 λλ ο ον ρνος ο τις ν τέκοιἀ ᾽ ἷ ἔ ὔ ἂ θεός. Ἐγ δέ, Παλλάς, τ λλα θ ςὼ ἄ ᾽ ὡ πίσταµαι,ἐ τ σ ν πόλισµα κα στρατ νὸ ὸ ὶ ὸ τεύξω µέγαν, κα τόνδ πεµψα σ ν δόµωνὶ ᾽ ἔ ῶ φέστιον,ἐ πως γένοιτο πιστ ς ε ς τ π νὅ ὸ ἰ ὸ ᾶ χρόνου 670 κα τόνδ πικτήσαιοὶ ᾽ ἐ σύµµαχον, θεά, κα το ς πειτα, κα τάδὶ ὺ ἔ ὶ ᾽ α αν ς µένοιἰ ῶ στέργειν τ πιστ τ νδε το ςὰ ὰ ῶ ὺ APOLLON. Je dirai ceci ; vois si je parle bien. Ce n'est pas la mère qui engendre celui qu'on nomme son fils ; elle n'est que la nourrice du germe récent. C'est celui qui agit qui engendre. La mère reçoit ce germe, et elle le conserve, s'il plaît aux dieux. Voici la preuve de mes paroles : on peut être père sans qu'il y ait de mère. La fille de Zeus Olympien m'en est ici témoin. Elle n'a point été nourrie dans les ténèbres de la matrice, car aucune déesse n'aurait pu produire un tel enfant. Pour moi, Pallas, et entre autres choses, je grandirai ta ville et ton peuple. J'ai envoyé ce suppliant dans ta demeure, afin qu'il te soit dévoué en tout temps. Accepte-le pour allié, ô déesse, lui et ses descendants, et que ceux-ci te gardent éternellement leur foi ! 7 nouveau passage. (la fin de cette phrase s'avère obscure, et j'y perds un peu... mon grec) Τίκτει δ θρ σκων᾽ ὁ ῴ Engendre celui qui s'élance, qui bondit, qui s'avance dans la hâte, qui saillit. Le père n'est pas nommé... Ce « Ο κ στι µήτηρ...ὔ ἔ » signe le matricide: elle n'est pas. Si l'on s'arrête là, comme la plupart des commentateurs, on arrive à une banalité. Le père est le géniteur qui fournit la semence; la mère l'accueille et la fait grandir jusqu'au terme. Une telle théorie du rôle des sexes dans la reproduction est évoquée d'ailleurs à l'époque d'Eschyle par Anaxagore de Clazomènes, selon Aristote qui le cite dans Génération des animaux (Περ ζώων γενέσεως)ὶ , IV, I, 763b30. « Génération des animaux », c'est bien dit. Ces commentaires en effet ne font pas de distinction entre reproduction animale et reproduction humaine. Alors que le texte pris, tel le menuisier pour le bois, dans le fil des mots, nous raconte tout autre chose. Ce n'est pas la mère qui engendre, mais est-ce le père? On peut même, précise la suite du texte, être père sans qu'il y ait de mère. ὁ Τοκεύς, au masculin, c'est celui qui engendre, le père. Ainsi en fut-il de la fille de Zeus: «La fille de Zeus Olympien m'en est ici témoin, poursuit Apollon, elle n'a point été nourrie dans les ténèbres de la matrice, car aucune déesse n'aurait pu produire un tel enfant.» Le Nom-du-Père serait donc ici le « Père-du-Nom », Zeus Pater, « la parole qui pousse à nommer » « l'invocation », autrement dit le principe même du 10 symbolique, conçu comme capacité, spécifique à l'espèce humaine, de représenter l'absence, dont la première entame est marquée par ce que Freud désigne comme urverdrangung, refoulement originaire. Le père et la mère étant les passeurs, de façon distincte, dissymétrique et dialectique, de « ce que la parole pousse à nommer ». Pour qu'opère le Nom-du-Père, il y faut cette condition première du « Père-du-Nom ». C'est à partir de là, de ce point de vacuité qu'impose la structure langagière, que les Noms-du-Père peuvent se déployer dans leur fonction de mortification, de meurtre de la chose, sur son versant maternel d'abord, paternel ensuite. « Lacan pluralise les Noms du Père, précise Claire Duguet, ce qui revient à désincarner réellement la fonction paternelle. L’être père n’est plus assuré uniquement par un faisant-fonction-de-père et une opération métaphorique articulant symbolique et imaginaire, c’est-à-dire articulant signifiant phallique et signifié du désir de la mère. En effet, ce père symbolique (signifiant du père mort) renvoie à l’ornière de l’amour pour le père avec, au bout, le nom du nom du nom, soit Dieu le Père le père du nom. Lacan insiste, il n’y a pas de Nom propre pour la fonction mais il y a des noms pour les noms du père, comme l’Homme masqué (L’Éveil du printemps de Wedekind) ou le nom d’artiste (Joyce), la femme (Le Sinthome) » (Claire Duguet, « Quelques notes sur le père dans RSI et le Sinthome », Intervention au séminaire mensuel, Mensuel, 2007) « Mais le père, pointe Lacan, en a tant et tant (des Noms-du-Père) qu'il n'y en a pas Un qui lui convienne, sinon le Nom de Nom de Nom. Pas de Nom qui soit son Nom-Propre, sinon le Nom comme ex-sistence.» ( « Préface à l'Eveil du printemps », Autres Ecrits, p. 563.) Sur quoi débouchons-nous alors à l'issue de ce bref cheminement? Si ce n'est que père et mère découlent des principes même de la nomination, selon un double 11 trajet bien balisé dans l'ouvrage sur l'Orestie: du Réel au Symbolique et du Symbolique au Réel. Aller et retour. Mais il n'y a pas d'Autre de l'Autre, et au bout du compte si l'on peut représenter dans un semblant l'origine et du langage et de l'humanité et de chacun d'entre nous, l'espace qu'il délimite est vide. C'est pourquoi l'on peut écrire le nom de Yahvé, composé de quatre lettres, qui sont aussi des nombres, Yod/hé/waw/hé (10/5/6/5), mais qu'on ne peut le prononcer, il y a un vide dans le son, un trou dans la vocalisation. Autrement dit à l'origine de la nomination il y a ce renoncement à occuper tout l'espace de la jouissance sonore. Le « pastout » comme principe de la castration est inscrit d'emblée4. C'est le prix à payer pour produire de l'humain. Les conséquences en sont qu'il s'agit d'opérer un meurtre sur le maternel et sur le paternel, de façon différenciée certes. Un meurtre dont les passeurs sont justement ceux que l'on nomme, du fait de leur fonction, père et mère. Je pense depuis longtemps d'ailleurs que cette distinction s'entend dans la prononciation de ces deux termes, et sans doute dans beaucoup de langues: mère, avec un « m » qui se prononce la bouche close, occlusive bilabiale, et père, avec une occlusive simple, le « p » qui force l'ouverture. Le « p » ouvre ce que le « m » ferme. Ouverture/fermeture, battement de la langue comme battement de l'inconscient. Deux sons qui se redoublent et insistent dans leur version la plus primaire: maman et papa. Voilà pourquoi Lacan disait que « la psychanalyse est une pratique de bavardage. Aucun bavardage n'est sans risque » ( Le moment de conclure, 15 novembre 1977) Mais nul ne peut-être tué in absentia ou in effigie. « Le symbole, précise Lacan, et j'insiste sur cette citation, se manifeste d’abord comme le meurtre de la Chose et cette mort constitue pour le sujet l’éternisation de son désir. » (Ecrits, p. 319). On pourrait à l'issue de cette réflexion ouvrir au troisième meurtre, le meurtre de de l'Enfant. Les infanticides, dont la presse aujourd'hui fait ses choux gras de façon obscène, ne mettent-ils pas en lumière ce troisième volet du meurtre de la Chose? 4 Voir Guy Le Gaufey, Le pastout de Jacques Lacan. Consistance logique, conséquences cliniques, EPEL, 2006. 12
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