Télécharge Elements de corrigé bac blanc de français et plus Notes au format PDF de Langue Française sur Docsity uniquement! Elements de corrigé bac blanc de français 2017 séries générales Question de corpus Nous avons affaire à trois extraits de roman, servant l’étude du personnage de roman du 17e siècle à nos jours: un extrait du roman La peste du Nobel de littérature et théoricien de l’Absurde et de la Révolte, Albert CAMUS, puis un extrait du double prix Goncourt facétieux Romain GARY (avec son autofiction La promesse de l’aube) et enfin un extrait du roman Eldorado, peinture des exodes migratoires en Méditerranée, ce bassin demeurant le lieu de fascination privilégié du romancier et dramaturge Laurent GAUDE. Il s’agira de vérifier comment ces différents extraits mettent en scène et valorisent leur héros. Les textes A et B (CAMUS et GARY) nous présentent un héros émouvant et proche du lecteur, tandis que le texte C propose un tableau mélioratif et poétique d’une jeune femme, soudain et provisoirement héroïsée. Les extraits de CAMUS et GARY nous laissent peu de choix : nous sommes dans la tête du héros, qui donc se distingue des autres, simples personnages, et nous sommes peu à peu forcés d’adhérer à son destin donc éprouver de l’empathie pour lui. La focalisation interne à Rieux que l’on trouve avec “Rieux jugea…” se confirme avec “Rieux sentit planer le calme” et “Le docteur ne savait pas si…”. L’extrait tel qu’il est découpé met en valeur Rieux qui finalement arrive comme un recours, une réponse, un antidote, un contrebalancier à Tarrou qui occupe, agonisant, le premier des deux paragraphes. Rieux est le sujet de quasiment tous les verbes de ce second paragraphe: “Rieux sentit”, “il avait pensé”, “Il avait laissé”, “ne savait pas”, “il croyait”. Dans le texte de GARY, l’identification au narrateur interne est encore plus simple puisque le lecteur est invité à se mettre à sa place, par l’emploi de la première personnage qui donne au texte le ton intimiste de la confession ou du journal: la première personne ouvre l’extrait (“je sentis qu’il fallait me dépêcher”). Les thèmes développés (l’amour filial et la maladie) doivent parler à tous les lecteurs et donner du héros narrateur une image valorisante d’humain dévoué et aimant. Le texte insiste sur le lien, avec l’emploi de très nombreux possessifs (“ma mère”, “ma mère”, “mes oeuvres”, “mon oeuvre future”, “mon être”). C’est donc par la sympathie qu’il dégage que ce héros-‐narrateur s’impose au lecteur. Incontournable, tout ou presque se rapporte à lui dans l’extrait. Le texte C en revanche, donne une place à cette victime anonyme des circonstances et de ballottements du destin, en lui offrant une page esthétique, pour ne pas dire poétique. De personnage secondaire ou transitoire, GAUDE en fait un emblème de son temps, le symbole de toute une époque. La femme qui émerge dans ce récit s’impose par sa récurrence dans le texte, comme une lame de fond persistante: à quatorze reprises, le pronom “elle” (pronom sujet) revient en position anaphorique. Comme une héroïne que GAUDE veut rendre inévitable , elle se poste à chaque début de phrase, avec une emphase tragique. La charge tragique rattachée à la femme se retrouve dans le phénomène de réduction que les phrases qui se rapportent à elle connaissent: de phrases complexes (“elle sentit que…”) en propositions indépendantes “elle ne comprenait pas” qui forcent de plus en plus le trait intransitif pour gagner toujours plus de brusquerie et d’efficacité: “elle cracha et mordit.” La mise en scène de ces apparitions de la femme, de plus en plus réduites à l’essentiel (une action, sans plus aucune circonstance) donnent à la femme une place particulière dans le récit, plus qu’un personnage (qui serait doté d’une vie et d’une complexité et d’évolution), elle devient une pure présence, quasi divine, dont la présence se suffit à elle-‐même. En conclusion, pour distinguer un personnage et le faire passer de personnage à héros, le romancier choisit de nous le rendre sympathique, proche de nous ou à l’inverse, d’en faire une représentation poétique, quasiment une idée. Nous aurions pu ajouter à ce corpus des extraits de la Condition humaine (1933) d’André MALRAUX, notamment ceux où le lecteur est témoin des réflexions intenses de Tchen, révolutionnaire inspiré et radical.