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l'humanisme et les etudes classiques dans les pays-bas de la ..., Lectures de Culture grecque-latine

Le nom d'Erasme, le fameux humaniste hollandais du début du 16 e siècle, auteur latin prolifique et éditeur d'un grand nombre d'auteurs antiques, ...

Typologie: Lectures

2021/2022

Téléchargé le 03/08/2022

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Télécharge l'humanisme et les etudes classiques dans les pays-bas de la ... et plus Lectures au format PDF de Culture grecque-latine sur Docsity uniquement! L’HUMANISME ET LES ETUDES CLASSIQUES DANS LES PAYS-BAS DE LA RENAISSANCE1 Marc van der Poel, Radboud Université Nimègue Dans cet exposé j'esquisse à grands traits quelques caractéristiques de l’humanisme aux Pays-Bas dans la période de la Renaissance. Plus particulièrement j’examinerai quelle est la contribution des Pays-Bas à l’humanisme européen, ce courant intellectuel entre 1350 en 1650 autour de la renaissance des lettres classiques (c.à.d. la littérature païenne et chrétienne en Grec et Latin dans l’antiquité). Le nom d'Erasme, le fameux humaniste hollandais du début du 16e siècle, auteur latin prolifique et éditeur d’un grand nombre d’auteurs antiques, notamment de Pères de l’Eglise, vient immédiatement à l'esprit lorsqu'on parle de l'humanisme à l'époque de la Renaissance. Mais Erasme ne peut pas être considéré comme un représentant de l’humanisme néerlandais, parce que, quoique né à Rotterdam, il a changé son pays natal pour vivre à Paris, en Italie, en Angleterre, en Belgique, en Suisse, et parce qu’il fut en son temps le protagoniste de l’humanisme européen au nord des Alpes en général plutôt que néerlandais. En effet, au temps d’Erasme, l’humanisme ne constituait nullement un courant signifiant dans la culture néerlandaise, bien qu’il y eût quelques humanistes néerlandais dont l’oeuvre jouissait d’une renommée européenne, comme celle d’Erasme lui-même. Je pense notamment au frison Rodolphe Agricola, deuxième moitié du 15e siècle, et à Jean Second, né à La Haye au début du 16e siècle. Agricola est l’auteur d’un important manuel sur la dialectique et la rhétorique, publié pour la première fois après la mort de son auteur, qui connut une diffusion en toute l’Europe jusqu’à la fin du 16e siècle. Jean Second fut un poète génial, qui écrivit dans la tradition des grands poètes latins de l’antiquité et de l’Italie humaniste du 15e siècle; son oeuvre la plus importante, les Basia ou Baisers, inspira à son tour des poètes dans toute l’Europe, entre autres les grands poètes de la Pléiade en France. Du point de vue de l’humanisme néerlandais, ces deux auteurs sont, comme Erasme, des exceptions. Il est vrai qu’au cours du 16e siècle un certain nombre Humanisme et Études Classiques 121 d’écoles modernisassent leurs programmes d’études pour ouvrir le chemin aux studia humanitatis, le programme d’études des humanistes, centré sur la lecture des auteurs classiques et sur l’apprentissage de la faculté d’écrire et de parler le latin vivant des auteurs anciens. Pourtant, ces réformes scolaires sur le plan toujours local ne firent pas que, chez nous, l’humanisme arriva à son but. Le centre intellectuel pour toute la région des Pays-Bas et de la Belgique pendant la deuxième moitié du 15e siècle et aux trois quarts du 16e siècle était l’université de Louvain en Belgique. Bien sûr, l’humanisme y exerçait une certaine influence notamment grâce au Collegium trilingue pour l’étude des trois langues bibliques, l’hébreu, le grec et, pour l’église romaine, le latin. Ce collège fut fondé en 1517 grâce aux efforts de plusieurs savants, parmi lesquels Erasme. Cependant, le mouvement humaniste à l’université était constamment contrarié par la puissante faculté de théologie, qui tenait Erasme et Luther comme des partisans et qui considérait comme modernisme dangereux la méthode humaniste d’étudier la littérature et la philosophie classique et les sources du christianisme dans les textes originaux. Et, on le sait, le retour aux sources (‘Ad fontes’), c.à.d. aux textes grecs et latins de l’antiquité, a toujours été le point essentiel et la marque pour l’humaniste à la Renaissance. A Louvain, la méthode scolastique des théologiens et - on peut bien dire – l’esprit conservateur qui généralement y allait de pair, éclipsait l’humanisme. Après l’insurrection contre la domination espagnole et la séparation des Pays-Bas du Nord et du Sud, qui se réalisa formellement avec la fondation dans le nord de la République des sept Provinces-Unies par l’Union de Utrecht en 1579, l’étude des lettres classiques dans les pays du Sud, c.à.d. à peu près la Belgique actuelle, n’eut plus beaucoup de présence en Europe, même pas lorsqu’un grand philologue comme Juste-Lipse (1547-1606) fut nommé professeur de latin à Louvain en 1592, après une carrière de courte durée à l’université de Leyde. C’est là, au nord, et plus particulièrement à la première université dans le nord, celle de Leyde, et sous l’influence du milieu universitaire en cette ville, que l’humanisme se développa en un courant plus large, à la fois déterminant l’étude des lettres classiques et stimulant un mouvement à élever la langue et la littérature nationales sur un plan intellectuel plus élevé. L’épanouissement des études humanistes commença en Hollande presque immédiatement avec la création de CANADIAN JOURNAL OF NETHERLANDIC STUDIES 124 apprendre à parler latin couramment. Jean Sturm, le fameux maître d’école de Strasbourg au milieu du 16e siècle, recommandait ses enseignants à faire étudier et jouer par les élèves les comédies de Plaute et de Térence.4 Son exemple était suivi dans beaucoup d’endroits, bien que plus tard on tendît à se limiter à Térence puisque l’on jugeait Plaute trop archaïque du point de vue linguistique et trop licencieux dans le traitement de ses sujets. Dans le théâtre scolaire néerlandais l’on établissait strictement le rapport entre la ‘formatio linguae’ (enseignement de la langue) et la ‘morum institutio’ (formation des moeurs).5 Dans ce contexte, beaucoup d’humanistes néerlandais préféraient d’écrire leurs propres pièces pour les faire jouer par leurs élèves au lieu de pièces de théâtre païennes. Plusieurs maîtres d’école se firent valoir avec des drames scolaires en latin, dans lesquels la morale chrétienne était tout à fait dominante. Parmi les mieux connus d’entre eux figurent Gulielmus Gnapheus (directeur de l’école latine à La Haye), auteur de l’Acolastus, un drama biblique sur le thème du Fils Prodigue, publié plusieurs fois au cours du 16e siècle, et le prêtre Georgius Macropedius à Utrecht, qui écrivit autour du milieu du 16e siècle 12 pièces, dont sept traitent de sujets bibliques. Le mieux connu de ces dramaturges est le recteur de l’école latine de Haarlem jusqu’au début du 17e siècle, Cornelius Schonaeus, dont les drames scolaires bibliques étaient publiés collectivement sous le titre éloquent de Terentius christianus. Ces drames ont été publiés de nombreuses fois en toute l’Europe; l'oeuvre de Schonaeus peut être considérée comme une première contribution de l’humanisme néerlandais à l’Europe. Les étudiants de l’université de Leyde s’appliquaient aussi à l’étude de pièces de théâtre classiques et, à titre d’exercices, à la représentation de celles-ci. Au commencement, les proviseurs étaient assez libéraux et, outre des tragédies d’Euripide et de Sénèque, des comédies de Plaute furent portées à la scène. Mais une pétition adressée aux sénateurs de l’université, datant de 1602, dans lequel les étudiants demandaient l’autorisation de jouer l’Amphytruo de Plaute, montre qu’à ce moment-là les règles de l’université portant sur le théâtre étaient plus strictes.6 L’Amphitryo est une tragi-comédie sur un thème mythologique, dans lequel Jupiter, le roi des dieux, séduit la femme mortelle Alcmène sous la forme de son mari, le général thébain Amphytruo (de cette union fut né le demi-dieu Heraclée ou Hercule). Humanisme et Études Classiques 125 Le texte de la pétition des étudiants fait paraître que les sénateurs avaient des objections au fait que dans la pièce en question apparaît un dieu adultère. Dans leur pétition, les étudiants proposèrent en contre-partie, donc en défense de la production de l’Amphytruo, premièrement que la représentation de pièces de théâtre est utile dans le contexte de l’enseignement et qu’une comédie est acceptable pour faire décontracter les spectateurs après une tragédie, et deuxièmement que les consuls romains ne se croyaient pas déshonorés d’assister à la représentation d’une comédie. Malgré ces aurguments bien choisis, le jugement des sénateurs fut négatif et l’interdiction fut maintenue. Ce jugement montre à quel point l’université était opposée à l’antiquité païenne, ce qui semble un rejet je dirais plutôt primitif; il s’agit ici, de fait, de la continuation de la lutte des premiers chrétiens contre les dieux païens. Apparemment, on considérait toujours l’acte de montrer sur la scène le comportement immoral de dieux, c.à.d. de caractères mythologiques crées dans l'esprit d’une culture primitive, comme profanation de la divinité. Un autre indice – et c’est mon dernier exemple - montrant de façon claire le réserve vis-à-vis les grands écrivains romains est le fait que dans les écoles latines du 17e siècle on lisait fréquemment l’adaptation des psaumes en vers lyriques dans le style et les mètres d’Horace par l’humaniste écossais George Buchanan comme supplément à une sélection des Odes d'Horace lui-même.7 Et les Odes du poète antique et païen étaient toujours lues tout à fait de façon moralisante. La meilleure illustration de cette tendance très nette est un ouvrage intitulé Emblemata Horatiana de l’artiste-peintre Otto Vaenius ou Otto van Veen (1556-1629). Cette oeuvre, parue pour la première fois à Anvers en 1607, contient 101 gravures de cuivre, qui montrent, comme Vaenius l’explique dans sa préface, les doctrines de l’éthique et de la philosophie stoïcienne.8 Plus particulièrement, chaque gravure représente un précepte concernant une vertu, un vice, une émotion ou une passion à suivre ou à rejeter, d’après tel ou tel texte d’Horace; le texte d’Horace est imprimé à côté de la gravure, souvent accompagné d’une citation appropriée d’un autre auteur latin, dans la plupart des cas Sénèque. Par exemple, l’emblème no. 84 représente, sous le titre 'neglectae religionis poena multiplex' (les punitions pour la négligence de la religion sont multiples'), les vers 1-4 de l' ode 3.6, dans laquelle Horace s’adresse à la jeunesse CANADIAN JOURNAL OF NETHERLANDIC STUDIES 126 de Rome de son temps, en disant que les maux dont Rome a souffert dans le passé récent pendant les guerres civiles ne guériront vraiment que si les jeunes Romains se délivrent de l’impiété et de l’impudicité de leurs ancêtres (fig.1). Le texte est cité en latin (traduction: Tu expieras, innocent, les fautes de tes aînés, Romain, tant que tu n’auras pas relevé les temples, les demeures croulantes des dieux, et leurs images que souille une noire fumée9), complété par une référence à Diagoras et Socrate, deux philosophes Athéniens punis en raison de leur impiété, et par un adage non identifié exprimant l'idée que tous les coupables d'un délit doivent être punis. Le recueil de Vaenius a connu une diffusion très large en toute l’Europe, et non seulement en sa forme originale. Il existe de nombreuses adaptations en plusieurs langues nationales, néerlandais, français, espagnol, allemand, qui contiennent en supplément des textes latins des citations en langues modernes. Le savant génévois Jean Leclerc (1657-1736), qui vivait depuis 1683 en Hollande et qui était professeur de latin à un séminaire protestant à Amsterdam, est l'auteur d’une telle édition bilingue français-néerlandais, avec les légendes aussi en allemand. Cette édition, publiée à La Haye en 1755, alors presque un siècle et demi après la première édition, est destinée à l’éducation de la jeunesse et porte le titre significatif Schouwtoneel des menschelijken leevens of lessen der wysheid, et en français Le spectacle de la vie humaine ou leçons de sagesse.10 Dans cette édition, l’ordre des gravures et citations correspondantes a été changée par rapport à l’oeuvre originale, pour créer une morale chrétienne cohérente portant sur la vie humaine du berceau jusqu’à la mort, ou plutôt jusque dans le ciel. L'emblème qui représente le début de l'ode 3,6 (le numéro 19 dans cette édition, faisant partie d’une série de 4 emblèmes représentant le devoir des hommes envers Dieu) est accompagné, outre la référence aux deux philosophes Athéniens, de plusieurs textes pertinents en latin, allemand, français et néerlandais, et d'une explication par Leclerc, où il fait un appel à son public à se convertir. Cet exemple montre merveilleusement combien on utilisait Horace jusqu’au milieu du 18e siècle pour enseigner aux jeunes citoyens hollandais les valeurs chrétiennes de leur société. Il s’agit chez Vaenius et davantage chez son adaptateur Leclerc d’un Horace moralisé, tout comme il y avait eu au Moyen Age un Ovide moralisé : au cours de l’interprétation le texte originel païen se perd complètement. Humanisme et Études Classiques 129 premier poème édité par Scriverius est un poème soi-disant pour le mardi gras glorifiant le vin, Lofzanck op Bacchus, écrit en 1614, un poème didactique plein d’érudition classique, inspiré par l‘Hymne de Bacchus de Ronsard. Le deuxième poème s’intitule Lofsanck van Jesus Christus, inspiré par La Sepmaine de Du Bartas, que Heinsius écrivit en 1616 en contrepartie du Lofzanck op Bacchus (ici on reconnaît le trait archi-moraliste: qui loue Bacchus doit louer le Christ également). Dans son édition, Scriverius, savant humaniste pur sang lui aussi, donna des notes détaillées aux deux poèmes, presque plus détaillées que les poèmes eux-mêmes. Il ajouta une double introduction, aussi en langue nationale, une en prose et une en vers, dans lesquelles il présenta les deux poèmes comme le début d’une nouvelle époque dans l’histoire littéraire néerlandaise, une époque dans laquelle la poésie en langue néerlandaise pourra enfin prendre son essor pour rivaliser avec la poésie classique latine. Dans son introduction Scriverius explique pourquoi il considère les deux Hymnes de Heinsius comme le modèle d’une nouvelle poésie en néerlandais : ils sont le produit d’un poeta doctus, poète savant. Ce sont donc des poèmes érudits qui suivent dans tous les égards, mais en langue néerlandaise, les règles de la poésie classique, y inclus la pureté de la métrique, bien que, il faut le dire, cette métrique ne convienne pas à la nature d’une langue germanique (la métrique latine consiste en l’alternation de syllabes longues et courtes, ce qui n’existe pas en néerlandais). Dans ses notes très copieuses aux deux poèmes, Scriverius montre la richesse de savoir et de sagesse qu’un poète peut et, en effet, selon lui, doit puiser des auteurs classiques païens et chrétiens. Ce faisant cette édition commentée des deux poèmes fait fonction de programme littéraire dans lequel Scriverius se débarassa de l’ancienne poésie néerlandaise de la tradition des chambres de rhétorique. Désormais, seulement une poésie en langue néerlandaise qui suit, d’après la forme et le tissu littéraire, la poésie classique des Grecs et Romains sera poésie dans le sens authentique du mot. Pour beaucoup de lecteurs et de critiques modernes c’est vrai que ce programme impliqua la victoire d’une poésie érudite, correcte du point de vue de la métrique, mais trop souvent quasi-savante avec beaucoup d’embellissement mythologique et, en fin de compte, fastidieuse, qui gênait le développement d’une lyrique plus naturelle en vers libres comme celle de Brederode et surtout du jeune Hooft. Mais pour Scriverius, CANADIAN JOURNAL OF NETHERLANDIC STUDIES 130 Daniel Heinsius était le seul qui put servir d’exemple pour le poète idéal, car il n’avait aucune relation avec le cercle des rhétoriqueurs et il était le seul qui, grâce à son érudition classique, put équivaloir dans sa poésie néerlandaise aux poètes antiques. Ainsi, l’erudit Heinsius, qui publia ses premières publications philologiques à l’âge de 21 seulement, fut avancé à Leyde comme le héraut d’une poésie de la Renaissance digne de ce nom, au détriment du poète d’Amsterdam que l’on juge aujourd’hui (et à l’époque aussi), comme le poète rénovateur le plus éminent, P.C. Hooft. Ici, on voit bien le poids intellectuel et culturel de l’université de Leyde à cette époque. Le poète allemand Martin Opitz (1597-1639), qui s’établit en Hollande en 1620 à cause de la menace de guerre dans son propre pays, et qui est considéré comme l’inaugurateur d’une nouvelle poésie sublime allemande de niveau européenne, traduisit les deux Hymnes de Heinsius en allemand. De plus, Opitz trouvait dans l’oeuvre de Heinsius (notamment son traité De tragoediae constitutione, publié en 1611) une source d’inspiration importante pour sa Poétique (Das Buch von der deutschen Poetery, publié en 1624), ouvrage dans lequel il plaide en faveur d’une renaissance de la littérature en langue allemande. Ainsi, grâce à Heinsius, l’humanisme néerlandais contribua à l’élévation de la poésie en langue nationale, aussi bien aux Pays-Bas qu’en Allemagne, jusqu’au niveau d’une forme d’art acceptée par la haute société comme équivalente à la poésie classique et néolatine. Avec ces remarques, j’espère avoir montré comment les études classiques des humanistes hollandais du 17e siècle résultaient entre autres en une élévation de la poésie en langue nationale qui n’est pas entièrement jugée comme favorable, bien que cette poésie exerçat une influence sur la renaissance de la littérature surtout en Allemagne. 3. Le troisième domaine qui mérite notre attention, parce qu’il montre l’importance de l’humanisme néerlandais, est, à mon avis, celui de la philologie pure, c.à.d. l’édition scientifique des auteurs grecs et romains, y inclus les auteurs grecs et romains chrétiens et les auteurs grecs de la période byzantine (jusque vers l’an 1000). Au cours du 17e siècle un très grand nombre d’éditions, souvent aves des commentaires, ont été réalisés aux Pays-Bas; beaucoup de ces éditions visaient Humanisme et Études Classiques 131 l’enseignement secondaire, comme par exemple les éditions dites Variorum, qui contiennent une anthologie de commentaires d’humanistes fameux, un genre d’édition lancé par la famille des imprimeurs Elzevier, qui était une réussite éclatante partout en Europe.13 En outre, beaucoup d’érudits, travaillant à Leyde ou ailleurs aux Pays-Bas, publiaient les fruits de leurs études sur le terrain de la critique textuelle (les fruits des collations de manuscrits, des observations sur des passages difficiles etc.) soit dans des recueils soit attachés à une édition de tel ou tel auteur classique. Bref, il y eut une production de travaux académiques dans le domaine des études classiques véritablement énorme. Dans les anneés des débuts de l’université de Leyde, plusieurs grands philologues y travaillaient, comme le néerlandais du Sud Juste-Lipse, qui y était professeur de 1578 à 1591. Outre des commentaires et des études historiques et philologiques, Juste-Lipse a produit des éditions critiques de plusieurs auteurs romains, dont trois ont été publiées pendant son professorat à Leyde: l’édition de Tite-Live (1579), de César (1586) et de Velleius Paterculus (1591). Son oeuvre la plus importante, l’édition de Tacite, parut en 1605, donc bien après son départ de la Hollande protestante pour l’université catholique de Louvain, où le climat religieux était plus favorable pour sa personne. Daniel Heinsius, dont on a déjà parlé auparavant dans un autre contexte, est une autre célébrité pendant les premières décennies de l’université. Heinsius était un philologue actif, qui édita beaucoup de textes, mais ses éditions ne sont pas considérées aujourd’hui comme très importantes, à une exception près. Il est très probable que Daniel Heinsius est l’éditeur du Nouveau Testament en grec publié par les Elzeviers en 1624 et 1633; cette oeuvre a été d’une très grande importance historique, parce que jusqu’à la fin du 19e siècle le texte grec du Nouveau Testament imprimé un peu partout en Europe était celui publié par les Elzeviers; donc le textus receptus du Nouveau Testament grec pendant deux siècles est en toute probabilité celui de Daniel Heinsius.14 L’exemple de Heinsius est typique pour ce que l’on a nommé l’humanisme biblique au nord, qui commença avec Erasme, qui était le premier à faire une édition critique du Nouveau Testament en grec, à côté de la Vulgate latine reconnue comme exclusive par l’Eglise de Rome, qui était basée sur la traduction de St. Jérôme. Le miracle de savoir Hugo Grotius a, lui aussi, mis son CANADIAN JOURNAL OF NETHERLANDIC STUDIES 134 Notes 1 Texte légèrement adapté de la conférence présentée le 14 octobre 2005 à l'UFR d'Etudes Germaniques (Paris IV Sorbonne) à l'occasion de la rentrée 2005. Je remercie dr. P. Tuynman de sa contribution à ce discours. 2 In: J.J. Scaliger, Poemata omnia, ex museio Petri Scriverii, Leiden 1615, p. 43. 3 J.Müller, Vor- und frühreformatorische Schulordnungen und Schulverträge in deutscher und niederländischer Sprache, vol. 2, Zschopau 1886, p. 206, cité dans P.N.M. Bot, Humanisme en onderwijs in Nederland, Utrecht-Antwerpen 1955, p.147. 4 J. Sturm, Classicae epistolae sive scholae argentinenses restitutae (1565), ed. J. Rott, Paris-Strasbourg 1938, p. 62-63, 70-71, 76-77. 5 P. Bot, Humanisme en onderwijs in Nederland (note 3), p. 130. 6 Le texte de la pétition dans P. Molhuysen, Bronnen tot de geschiedenis der Leidsche Universiteit, eerste deel 1574-7 februari 1610, 's-Gravenhage 1913, p. 407*-408*. 7 E.J. Kuiper, De Hollandse "Schoolordre" van 1625, Groningen 1958, p. 79. 8 O. Venius, Q. Horati Flacci emblemata, imaginibus in aes incisis notisque illustrata, Anvers 1607 (réimpr. Hildesheim 1972). 9 Traduction de P. Villeneuve, dans Horace, Odes et epodes, Paris 1927 (Collections des universités de France). 10 J. Le Clerc, Schouwtoneel des menschelyken leevens; of lessen der wysheid, uytgedrukt in 103. fraaye konstplaaten, welker zinspeelingen uyt Horatius verzamelt zyn (...) Le spectacle de la vie humaine; ou leçons de sagesse, exprimées en 103. tableaux en taille douce, dont les sujets sont tirés d'Horace (...), 's Gravenhage, La Haye 1755. 11 'Les Rhétoriqueurs' (ca. 1665; Worcester Art Museum, no. 1954.22); 'Rhétoriqueurs près de la fenêtre' (1662-5; Philadelphia Museum of Art); 'Les rhétoriqueurs "In liefde vrij"' (1665-8; Musées royaux des beaux arts de Belgique, Bruxelles, Inv. no. 1366). 12 D. Heinsius, Bacchus en Christus: twee lofzangen, opnieuw uitgegeven door L. Rank, J. Warners en F. Zwaan, Zwolle 1965. 13 Les Elzeviers sont aussi les inventeurs du livre de poche, les petits in-12 ou in-24, qui ont rapidement conquis l’Europe et qui ont contribué considérablement à la Humanisme et Études Classiques 135 diffusion des livres en Europe; il s'agit d'un produit secondaire, mais important de l’humanisme néerlandais. 14 H.J. de Jonge, Daniel Heinsius and the Textus receptus of the New Testament: a study of his contributions to the editions of the Greek New Testament by the Elzeviers at Leiden in 1624 and 1633, Leiden 1971. «78 EMDLEMATA NEGLECTÆ RELIGIONIS POENA MVLTIPLEX EE Deliéta maiorum immerirus lues Es Romane done templarefecerss, A delque labenteus Decrum, Fada nigro finulacr fumo. Athenienfes Diagoram philofophum pepulerent quia Gribere aufastuerat,primbm ignorare fe;an Di ellent,deinde f Entquales finc. idem Socrarem damnauerunt;quèd nouam religionem intro- ducere videbatur. Gi Noxx par pœna eflo, ve in fo vitio quifque pleétatur. CVL. Van der Poel, Fig. 1 HORATIANA ce : 479 136
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