Docsity
Docsity

Prépare tes examens
Prépare tes examens

Étudies grâce aux nombreuses ressources disponibles sur Docsity


Obtiens des points à télécharger
Obtiens des points à télécharger

Gagnz des points en aidant d'autres étudiants ou achete-les avec un plan Premium


Guides et conseils
Guides et conseils

L2 Droit, Droit administratif, Notes de Droit

Sur le principe d'égalité devant le service public et l'application de tarifs différenciés : Document 6. CE., Sect. 10 mai 1974, Denoyez et Chorques, n° 88032 ...

Typologie: Notes

2021/2022

Téléchargé le 08/06/2022

Alexandre_Rouen
Alexandre_Rouen 🇫🇷

4.4

(55)

93 documents

Aperçu partiel du texte

Télécharge L2 Droit, Droit administratif et plus Notes au format PDF de Droit sur Docsity uniquement! Faculté de droit et science politique L2 Droit, Droit administratif Jean-François Brisson, professeur Séance de travaux dirigés n°10 Les « lois » du service public (la question tarifaire). Sur le principe d’égalité devant le service public : Document 1. Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, art. 1er et 13. Document 2. CE., Sect., 9 mars 1951, Société des concerts du conservatoire, n° 92004, Leb. Sur l’importance pour l’Administration de conserver la maitrise de la tarification des services publics : Document 3. Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, al. 9. Document 4. Code des transports (extraits). Sur le principe d’égalité et les modes de financement du service public : Document 5. ADEME (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l’énergie), « Les modes de financement du service public de gestion des déchets », www.ademe.fr, https://www.ademe.fr/expertises/dechets/passer-a-laction/couts- financement/dossier/modes-financement-service-public-gestion-dechets/generalites-differents-modes Sur le principe d’égalité devant le service public et l’application de tarifs différenciés : Document 6. CE., Sect. 10 mai 1974, Denoyez et Chorques, n° 88032 et autre. Document 7. CE, Sect., 26 avril 1985, Ville de Tarbes, n° 41169 – CE, Sect., 29 décembre 1997, Communes de Gennevilliers et Nanterre, n° 157425. Document 8. CE, 13 mars 2002, Union fédérale des consommateurs et autre, n° 177509, Leb. Document 9. CE, 10 octobre 2014, Région Nord-Pas-de-Calais, n° 368206, Tab. Document 10. CC., n° 2019-809 QPC du 11 octobre 2019, Union nationale des étudiants en droit, gestion, AES, sciences économiques, politiques et sociales et autres [Droits d'inscription pour l'accès aux établissements publics d'enseignement supérieur] (extraits). Document 11. CE., 1er juillet 2020, Union nationale des étudiants en droit, gestion, AES, sciences économiques, politique et sociales (UNEDESEP) et autres, n° 430121. Pour des réflexions théoriques sur la gratuité du service public : Document 12. DUMONT G., « Gratuité et service public : (in)actualité d’un principe », AJDA 2020, p. 980. Document 13. MARTIN S., « La gratuité du service public des transports », AJDA 2020, p. 999. Exercice (dissertation). La gratuité est-elle l’aboutissement du principe d’égalité devant le service public ? Afin de traiter au mieux le sujet proposé, il vous est suggéré de vous interroger notamment sur : - L’application des concepts d’« égalité réelle et égalité formelle » à la question de l’accès au service public ; - Les notions d’ « impôt, taxe, redevance, et prix » et sur l’impact de ces modes de financement sur l’égalité entre usager d’un service public ; - La nature et l’objet des services publics (régalien, obligatoire, facultatif). « Considérant que la fixation de tarifs différents applicables à diverses catégories d'usagers implique, à moins qu'elle ne soit la conséquence d'une loi, qu'il existe entre les usagers des différences de situations appréciables ou que cette mesure soit justifiée par une nécessité d'intérêt général en rapport avec les conditions d'exploitation du service ; Cons. que, d'une part, les différences de revenus entre les familles des élèves n'étaient pas constitutives, en ce qui concerne l'accès au service public, de différences de situation justifiant des exceptions au principe d'égalité qui régit cet accès ; d'autre part, compte tenu de l'objet du service et de son mode de financement, il n'existait aucune nécessité d'intérêt général justifiant, pour la fixation des droits d'inscription, une discrimination fondée sur les seules différences de ressources entre ces usagers ; » (Ville de Tarbes) « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le fonctionnement du conservatoire de musique de Gennevilliers constitue un service public municipal administratif à caractère facultatif ; qu'eu égard à l'intérêt général qui s'attache à ce que le conservatoire de musique puisse être fréquenté par les élèves qui le souhaitent, sans distinction selon leurs possibilités financières, le conseil municipal de Gennevilliers a pu, sans méconnaître le principe d'égalité entre les usagers du service public, fixer des droits d'inscription différents selon les ressources des familles, dès lors notamment que les droits les plus élevés restent inférieurs au coût par élève du fonctionnement de l'école ; » (Communes de Gennevilliers et Nanterre) Document 8. CE, 13 mars 2002, Union fédérale des consommateurs et autre, n° 177509, Leb. Vu 1°), sous le n° 177509, l'ordonnance en date du 28 décembre 1995, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 12 février 1996, par laquelle le président du tribunal administratif de Paris transmet au Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le dossier de la requête de l'UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS ; Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 26 septembre 1995 et le 4 janvier 1996 au greffe du tribunal administratif de Paris, présentés pour l'UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS, dont le siège est ... (75555 Cedex 11), représentée par ses représentants légaux en exercice ; l'UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS demande l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 25 juillet 1995 par laquelle le conseil d'administration du Syndicat des transports parisiens a fixé les régimes tarifaires applicables à l'ensemble des liaisons ferroviaires de l'Ile-de-France, en tant que par ses articles 1er et 2 elle a supprimé les billets valables entre une gare de banlieue et une gare tête de ligne parisienne ; elle demande, en outre, que le Syndicat des transports parisiens soit condamné à lui verser une somme de 12 000 F en application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ; Vu 2°), sous le n° 180544, l'ordonnance en date du 3 juin 1996, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 14 juin 1996, par laquelle le président du tribunal administratif de Paris transmet au Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le dossier de la requête de M. Kadio X... Y... ; Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 août et 26 septembre 1995 au greffe du tribunal administratif de Paris, présentés par M. Kadio X... Y..., demeurant ... ; M. KOUA Y... demande l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du conseil d'administration du Syndicat des transports parisiens en date du 25 juillet 1995 ; […] Sur la légalité des articles 1er à 4 et 6 de la décision du 25 juillet 1995 : […] En ce qui concerne la violation du principe d'égalité : Considérant, en premier lieu, que contrairement à ce que soutiennent les requérants le Syndicat des transports parisiens a pu, sans porter atteinte au principe d'égalité, décider l'instauration d'un titre de transport unique applicable à des usagers ne se trouvant pas tous dans la même situation ; que, d'ailleurs, il résulte de ce qui a été dit précédemment que la mise en place de la nouvelle tarification, qui a pour objet de mettre un terme à des disparités tarifaires, relève des nécessités d'intérêt général en rapport avec les conditions d'exploitation du service ferré dans la région des transports parisiens ; Considérant, en deuxième lieu, que M. KOUA Y... soutient que l'article 4 de la décision attaquée méconnaît le principe d'égalité en ce qu'il fixe un premier niveau de prix relativement moins élevé que celui arrêté pour les autres niveaux de prix ; que, toutefois, le Syndicat des transports parisiens n'était pas tenu d'étendre l'avantage tarifaire accordé aux usagers concernés par le premier niveau aux autres usagers ; Considérant enfin qu'en prévoyant par l'article 6 une tarification spéciale au bénéfice des usagers résidant dans les communes les plus proches de Paris de nature à limiter l'incidence financière pour les intéressés résultant de la mise en place de la nouvelle tarification, le Syndicat des transports parisiens n'a pas méconnu le principe d'égalité ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré de ce que les dispositions des articles 1er à 4 et 6 de la décision du 25 juillet 1995 auraient porté atteinte au principe d'égalité doit être écarté ; Document 9. CE, 10 octobre 2014, Région Nord-Pas- de-Calais, n° 368206, Tab. Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 mars et 17 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la région Nord- Pas-de-Calais, dont le siège est à l'Hôtel de Région, Centre Rihour à Lille (59555 Cedex) ; la région Nord-Pas-de-Calais demande au Conseil d'Etat : […] 1. Considérant que la région Nord-Pas-de-Calais demande l'annulation pour excès de pouvoir de la décision par laquelle la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) a fixé les tarifs voyageurs applicables à compter du 24 janvier 2013 sur la liaison TGV entre Lille et Paris, au départ ou à l'arrivée des gares de Lille-Flandres et Lille-Europe ; […] 3. Considérant, en deuxième lieu, que selon l'article 13 du cahier des charges de la Société nationale des chemins de fer français : " La S.N.C.F. perçoit un prix en contrepartie des prestations qu'elle fournit. / Elle mène une politique tarifaire visant à développer l'usage du train en participant à la satisfaction du droit au transport, dans des conditions assurant l'équilibre global de son exploitation, compte tenu des participations des collectivités publiques et d'autres bénéficiaires publics ou privés qui, sans être usagers des services, en retirent un avantage direct ou indirect. / Cette politique tarifaire favorise la réalisation des objectifs définis par l'Etat pour obtenir l'utilisation la meilleure au plan économique et social du système des transports intérieurs français " ; qu'en vertu de l'article 14 du cahier des charges : " 1. Les prix payés par les usagers des services nationaux sont fixés par la S.N.C.F. en application : / 1° D'un tarif de base général correspondant au prix du voyage en seconde classe ; / 2° De tarifs réglementés de référence correspondant au prix du voyage en seconde classe, sur certaines relations, institués dans les conditions définies au 2 du présent article ; / 3° De l'ensemble des tarifs comportant diverses modulations par rapport à l'application du tarif de base général et des tarifs réglementés de référence et intégrant notamment les tarifs sociaux mis en oeuvre par la S.N.C.F. à la demande de l'Etat. / 2. Dans les conditions fixées par l'arrêté prévu au 3 du présent article, un tarif réglementé de référence peut être institué sur une relation : / 1° Lorsqu'elle présente pour les usagers des avantages particuliers de rapidité et de confort ; / 2° Ou lorsqu'elle est soumise à une forte concurrence de la part d'un autre mode de transport ou d'un autre exploitant ferroviaire et que l'institution du tarif réglementé de référence est susceptible, en développant l'usage du train, d'éviter la dégradation ou de concourir à l'amélioration des comptes de résultat de la S.N.C.F. " ; 4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la SNCF peut, en lieu et place du tarif de base, instituer, selon les conditions prévues, un tarif particulier sur une relation déterminée lorsque celle-ci présente pour les usagers des avantages particuliers de rapidité et de confort ou est soumise à une forte concurrence de la part d'un autre mode de transport ou d'un autre exploitant ferroviaire ; que le principe d'égalité ne s'oppose à ce que des tarifs différents soient ainsi appliqués à des liaisons différentes ; qu'en l'espèce, la liaison entre Paris et Lille est assurée par des rames circulant à grande vitesse pendant la plus grande partie du parcours, permettant ainsi d'assurer, dans des conditions de confort avantageuses, le parcours de 214 kilomètres en une heure ; que les conditions d'exploitation de cette ligne étant différentes notamment de celles des autres lignes ferroviaires, de même que le service rendu aux usagers, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité entre les usagers du service public ne peut qu'être écarté ; Document 10. CC., n° 2019-809 QPC du 11 octobre 2019, Union nationale des étudiants en droit, gestion, AES, sciences économiques, politiques et sociales et autres [Droits d'inscription pour l'accès aux établissements publics d'enseignement supérieur] (extraits). 1. Le troisième alinéa de l'article 48 de la loi du 24 mai 1951 mentionnée ci-dessus prévoit que sont fixés par arrêté : « Les taux et modalités de perception des droits d'inscription, de scolarité, d'examen, de concours et de diplôme dans les établissements de l'État ». 2. Les associations requérantes soutiennent que ces dispositions méconnaîtraient le treizième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946. D'une part, le principe de gratuité de l'enseignement public, qui découlerait selon elles de cet alinéa, ferait obstacle à la perception de droits d'inscription pour l'accès à l'enseignement supérieur. D'autre part, en se bornant à habiliter le pouvoir réglementaire à fixer les taux et modalités des droits d'inscription sans considération des ressources des étudiants, le législateur n'aurait pas entouré cette habilitation de garanties suffisantes, en violation du principe d'égal accès à l'instruction. Pour ces mêmes motifs, les dispositions renvoyées seraient entachées d'incompétence négative dans des conditions affectant les exigences de gratuité de l'enseignement public et d'égal accès à l'instruction. […] 6. Aux termes du treizième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 : « La Nation garantit l'égal accès … de l'adulte à l'instruction … L'organisation de l'enseignement public gratuit … à tous les degrés est un devoir de l'État ». Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'exigence constitutionnelle de gratuité s'applique à l'enseignement supérieur public. Cette exigence ne fait pas obstacle, pour ce degré d'enseignement, à ce que des droits d'inscription modiques soient perçus en tenant compte, le cas échéant, des capacités financières des étudiants. 7. Les dispositions contestées se limitent à prévoir que le pouvoir réglementaire fixe les montants annuels des droits perçus par les établissements publics d'enseignement supérieur et acquittés par les étudiants. Il appartient aux ministres compétents de fixer, sous le contrôle du juge, les montants de ces droits dans le respect des exigences de gratuité de l'enseignement public et d'égal accès à l'instruction. 8. Par conséquent, les griefs tirés de la méconnaissance de ces exigences constitutionnelles doivent être écartés. 9. Le troisième alinéa de l'article 48 de la loi du 24 mai 1951, qui ne méconnaît aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclaré conforme à la Constitution. Document 11. CE., 1er juillet 2020, Union nationale des étudiants en droit, gestion, AES, sciences économiques, politique et sociales (UNEDESEP) et autres, n° 430121. Sur l'arrêté attaqué : En ce qui concerne le cadre juridique : 8. Aux termes de l'article L. 719-4 du code de l'éducation, dont un extrait est cité au point 6 : « les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel disposent, pour l'accomplissement de leurs missions, des équipements, personnels et crédits qui leur sont attribués par l'Etat. Ils peuvent disposer des ressources provenant notamment de la vente des biens, des legs, donations et fondations, rémunérations de services, droits de propriété intellectuelle, fonds de concours, de la participation des employeurs au financement des premières formations technologiques et professionnelles et de subventions diverses. Ils reçoivent des droits d'inscription versés par les étudiants et les auditeurs. Ils peuvent recevoir des subventions d'équipement ou de fonctionnement des régions, départements et communes et de leurs groupements [...] ». Aux termes de l'article 48 de la loi du 24 mai 1951 de finances pour l'exercice 1951 : « Seront fixés par arrêtés du ministre intéressé et du ministre du budget : / [...] Les taux et modalités de perception des droits d'inscription, de scolarité, d'examen, de concours et de diplôme dans les établissements de l'Etat. » Aux termes de l'article R. 719-48 du code de l'éducation : « Le produit des droits de scolarité versés par les étudiants est affecté en recette au budget des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel dans lesquels les intéressés s'inscrivent. » En application de l'article D. 714-38 du même code, une part des droits annuels de scolarité payés par les étudiants est affectée au budget propre du service des bibliothèques de l'établissement. Enfin, aux termes du second alinéa de l'article D. 612-4 de ce code, dans sa rédaction issue du décret du 19 avril 2019 : « L'acquittement de la totalité du montant des droits d'inscription conditionne la délivrance du diplôme et de tout ou partie des crédits européens validés en vue de son obtention. » […] En ce qui concerne les aux moyens tirés de la méconnaissance du principe d'égalité entre les usagers du service public : Il est soutenu par les requérants que l'arrêté du 19 avril 2019 a méconnu le principe d'égalité entre les usagers du service public, dès lors qu'à l'exception des formations mentionnées à son article 5, il fixe des frais d'inscription différents, selon que les étudiants relèvent de la première ou de la seconde des catégories d'étudiants qu'il définit, lesquelles seraient fondées sur l'origine géographique des étudiants. Le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier. Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation : « Le droit à l'éducation est garanti à chacun afin de lui permettre de développer sa personnalité, d'élever son niveau de formation initiale et continue, de s'insérer dans la vie sociale et professionnelle, d'exercer sa citoyenneté. » En outre, l'article L. 123-2 du code de l'éducation dispose que : « Le service public de l' enseignement supérieur contribue : [...] / 1° Au développement de la recherche, support nécessaire des formations dispensées, à la diffusion des connaissances dans leur diversité et à l'élévation du niveau scientifique, culturel et professionnel de la nation et des individus qui la composent ; / 2° A la croissance et à la compétitivité de l'économie et à la réalisation d'une politique de l'emploi prenant en compte les besoins économiques, sociaux, environnementaux et culturels et leur évolution prévisible ; / 3° A la lutte contre les discriminations, à la réduction des inégalités sociales ou culturelles et à la réalisation de l'égalité entre les hommes et les femmes en assurant à toutes celles et à tous ceux qui en ont la volonté et la capacité l'accès aux formes les plus élevées de la culture et de la recherche. [...] / 3° bis A la construction d'une société inclusive. A cette fin, il veille à favoriser l'inclusion des individus, sans distinction d'origine, de milieu social et de condition de santé ; / 4° A la construction de l'espace européen de la recherche et de l' enseignement supérieur ; / 5° A l'attractivité et au rayonnement des territoires aux niveaux local, régional et national ; [...] / 7° A la promotion et à la diffusion de la francophonie dans le monde [...]. » Eu égard aux objectifs poursuivis par le service public de l' enseignement supérieur , parmi lesquels figure celui de former les individus susceptibles de contribuer à la vie économique, sociale, scientifique et culturelle de la nation et à son développement, il était loisible aux ministres de fixer les montants des frais d'inscription applicables aux étudiants inscrits dans les établissements publics d' enseignement supérieur en vue de la préparation d'un diplôme national ou d'un titre d'ingénieur diplômé en distinguant la situation, d'une part, des étudiants ayant, quelle que soit leur origine géographique, vocation à être durablement établis sur le territoire national, et d'autre part, des étudiants venus en France spécialement pour s'y former. La différence de traitement qui en résulte concernant les montants de frais d'inscription est en rapport avec cette différence de situation et n'est pas manifestement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi de formation de la population appelée à contribuer à la vie économique, sociale, scientifique et culturelle de la Nation et à son développement. général », ce qui n'empêche pas juridiquement sa prise en charge par l'impôt, mais rend possible la justification du caractère onéreux du service « par l'idée qu'il n'y a aucune raison pour que les contribuables, en finançant des services dont ils ne bénéficient pas nécessairement, fassent des cadeaux aux usagers de ces services » (M. Waline, Gratuité ou rémunération des services publics, RD publ. 1951. 497). Au-delà de la prestation principale du service, toute prestation complémentaire ou spéciale, soit mise en oeuvre par le gestionnaire du service, soit sollicitée par les usagers, est a priori individualisable et peut faire l'objet d'une tarification. Tel est par exemple le cas, en matière de secours en montagne, des demandes qui « ne relèvent pas de la nécessité publique » et excèdent les « besoins normaux de protection des personnes et des biens auxquels la collectivité est tenue de pourvoir dans l'intérêt général » (CE 5 déc. 1984, n° 48639, Ville de Versailles c/ Lopez, Lebon 399 ; RFDA 1985. 522, note X. Prétot) ; ou, concernant les activités de police, des mesures de surveillance spécifiquement mises en place pour assurer la sécurité de manifestations culturelles, ou des services d'ordre à la demande (v. D. Maillard Desgrées du Loû, Police et gratuité, in G. J. Guglielmi et G. Koubi [dir.], La gratuité, une question de droit ?, préc., p. 21 ; v. égal. M. Lavaine, Contrat et police : la facturation des activités des forces de l'ordre à des personnes privées, AJDA 2018. 2226 ; R. Hertzog, Le prix du service public, AJDA 1997. 55). René Chapus synthétisait cette distinction en esquissant un parallèle avec l'utilisation des dépendances du domaine public, opposant principe de gratuité (mais assorti de dérogations notables) des utilisations collectives et principe d'exigence d'une redevance en ce qui concerne les utilisations privatives, la délivrance d'une prestation spécifique (et complémentaire) transformant des usagers « génériques » en « usagers privatifs » (Droit administratif général, préc., p. 573). La distinction entre le principal et l'accessoire s'opérait cependant parfois selon des modalités dont l'opportunité (financière) n'était pas absente. Ainsi, pour assurer la pérennité du financement du service public de la navigation aérienne, le Conseil d'Etat a pu estimer que « la mission de contrôle d'approche est exercée principalement et directement au profit des exploitants des aéronefs guidés à leur arrivée et à leur départ », ce qui permet au gouvernement d'instituer légalement, « pour financer ce contrôle et en contrepartie du service rendu, une redevance mise à la charge des exploitants d'aéronefs » (CE 21 oct. 1988, n° 72862, Syndicat national des transporteurs aériens, Lebon ; RD publ. 1989. 464, note Y. Gaudemet). Sans doute pour éviter de rendre trop visibles ces considérations d'opportunité, le Conseil d'Etat a récemment simplifié le critère lié à l'identification de l'usager. Atténuant la distinction entre accessoire et principal, il estime désormais qu'une redevance pour service rendu peut être édictée si « elle trouve sa contrepartie directe dans une prestation rendue au bénéfice propre d'usagers déterminés » (CE 28 nov. 2018, n° 413839, SNCF Réseau, Lebon avec les concl. ; AJDA 2019. 189, concl. G. Odinet ; et 595, note F. Alhama). Dans ses conclusions, Guillaume Odinet précise le sens de cette évolution : « La question de savoir si le service penche in fine du côté de l'intérêt général ou du côté de l'intérêt de l'usager est assez indifférente : il importe uniquement que la redevance soit le prix d'un service, donc que l'usager trouve une contrepartie directe à la somme mise à sa charge. » La perspective est en quelque sorte renversée : il ne s'agit plus de partir d'un « principe » de gratuité qui serait applicable au « coeur de cible » du service public mais, en ne s'intéressant qu'à la redevance projetée, de rechercher si elle peut être rattachée à une prestation en contrepartie. B. Gratuité et objet du service Au-delà de l'individualisation des relations avec les usagers, la tarification suppose qu'un critère relatif à l'objet du service soit également présent. On distingue traditionnellement en la matière entre services publics obligatoires qui, sauf disposition contraire, « doivent fonctionner gratuitement à l'égard des usagers » (J.-F. Lachaume, C. Boiteau et H. Pauliat, Droit des services publics, Armand Colin, 3e éd., 2004, p. 449), et services publics facultatifs, qui peuvent faire l'objet d'une tarification (CE 5 déc. 1984, Ville de Versailles, préc.). Il ne s'agit là que de l'autre facette du critère de la relation à l'usager. On peut en effet supposer que les services publics administratifs facultatifs sont institués par les personnes publiques non pour leur propre intérêt public, mais pour la satisfaction de besoins des usagers. Reste que cette distinction, pour classique qu'elle soit, ne rend compte que d'une partie du « tableau bigarré » (F. Alhama, Les activités de service public insusceptibles d'être tarifées, AJDA 2019. 595) que dessine la jurisprudence et n'est pas totalement opérante, dans la mesure où des services publics obligatoires peuvent donner lieu à perception de redevance lorsque leurs gestionnaires développent des activités spécifiques pour des usagers identifiables. La notion de service public obligatoire, purement normativiste, ne recoupe en effet que partiellement une autre approche, également retenue par la jurisprudence, qui identifie les services gratuits par leur nature. L'idée est ici que « certains services qui correspondent aux fonctions de souveraineté ne sont finançables que par l'impôt. On ne saurait en réserver la satisfaction à ceux qui peuvent payer, sans méconnaître les fondements même de l'Etat démocratique » (P.-L. Frier et J. Petit, Droit administratif, préc., p. 308). Certains services, ou certaines fonctions, appartenant « par nature » à l'Etat (ou, plus largement, aux personnes publiques), ne peuvent faire l'objet d'une tarification. Ainsi, « les services rendus par les services de sécurité d'incendie et de sauvetage et par la gendarmerie correspondent à des missions d'intérêt général qui incombent, par nature, à l'Etat », ce qui empêche leur financement par la redevance (CE 20 mai 1998, n° 179784, Syndicat des compagnies aériennes autonomes, Lebon T. 891). De la même façon, la police de l'espace aérien « appartient à l'Etat » (CE 21 oct. 1988, Syndicat national des transporteurs aériens, préc.), parce qu'elle a un « but d'intérêt général de protection des usagers et des populations ». Il en va de même de « l'exercice par la gendarmerie nationale des missions de surveillance et de sécurité des usagers », qui « par nature incombe à l'Etat », et ne peut donc donner lieu à tarification (CE, ass., 30 oct. 1996, n° 136071, Mme Wajs et Monnier, Lebon 387 ; AJDA 1996. 1041 ; et 973, chron. D. Chauvaux et T.-X. Girardot ; RFDA 1997. 726, concl. J.-D. Combrexelle ; RTD com. 1997. 243, obs. G. Orsoni ; CJEG 1997. 52, concl. J.-D. Combrexelle), ce qui est, plus largement, le cas de la « mission de police administrative de l'Etat » (CE 11 mai 2009, n° 296919, Ville de Toulouse, Lebon avec les concl. ; AJDA 2010. 634, note C. Rigambert). Ainsi, certaines activités, parce qu'elles sont indispensables à la vie en commun, « sont exercées dans l'intérêt de tous et s'imposent à des personnes qui ne bénéficient ni d'une prestation, ni d'un service rendu. Elles sont donc financées par la collectivité tout entière grâce à l'impôt » (P.-L. Frier et J. Petit, préc., p. 336). La raison de cette « gratuité » des services publics régaliens est aussi d'assurer l'indépendance du service à l'égard des usagers (J. Rivero et J. Waline, Droit administratif, Dalloz, 19e éd., 2002, p. 453), surtout lorsque ces derniers ne sont pas des individus mais des personnes morales de droit privé. La notion de « missions qui incombent par nature à l'Etat » (CE 28 nov. 2018, SNCF Réseau, préc.), formule synthétique désormais retenue par le Conseil d'Etat, n'est toutefois pas dépourvue d'ambiguïté, parce qu'elle recoupe très exactement celle de service public insusceptible de faire l'objet d'une délégation. S'il est assez évident qu'un service dont la gestion est confiée dans le cadre d'une délégation de service public doit pouvoir faire l'objet d'une tarification, et peut donc difficilement être gratuit, le possible choix de cette modalité de gestion n'a que peu à voir, a priori, avec celui du gestionnaire du service public, sauf à considérer qu'envisager la tarification d'un service public auprès des usagers serait une démarche identique au choix du transfert de sa gestion au secteur privé, manifestant ainsi le rôle politique de la notion de gratuité. II - La gratuité, révélateur de la transformation des lois du service public En l'absence de véritable contrainte juridique, le choix de la gratuité ou de la tarification du service public relève essentiellement d'une décision politique, qu'il s'agisse de politique jurisprudentielle ou d'un choix de l'autorité administrative. A ce titre, la gratuité entretient une relation très étroite avec deux des « lois » du service public : l'égalité et la continuité. Maurice Hauriou soulignait ainsi que « l'égalité du service est, en même temps que sa régularité, la grande raison d'être de l'organisation des services publics. Des entreprises privées pourraient rendre la plupart des services, s'il ne s'agissait pas de les faire pénétrer également partout. Des compagnies privées feraient des routes, elles feraient des chemins de fer, elles assureraient même la police ; seulement, elles ne le feraient que là où elles auraient une chance de trouver une rémunération. Elles ne feraient pas de chemins de fer fonctionnant à perte, ce que réalise l'administration publique, parce qu'elle ne part pas de l'idée du gain, mais au contraire du désir de satisfaire également tout le public » (M. Hauriou, Précis de droit administratif et de droit public, Sirey, 10e éd., 1921, p. 26). La gratuité était donc conçue à la fois comme une condition de l'accès égal au service public et comme la garantie de sa réalisation continue sur l'ensemble du territoire. Si la relation entre gratuité, égalité et continuité s'est considérablement distendue, la gratuité continue de servir de marqueur tant des évolutions de l'égalité que des transformations de l'Etat dont la continuité est la caractéristique première. A. La gratuité, moyen de l'égalité On sait que Louis Rolland, après avoir envisagé de faire de la gratuité un principe du fonctionnement du service public, finit par estimer que « la gratuité n'est pas de l'essence des services publics » (L. Rolland, Cours de droit administratif, 1945/1946, Les cours de droit, p. 131). Mais dans la première perspective, la gratuité était présentée comme « une nécessité pour garantir l'effectivité de l'égalité des services publics » (v. L. Bézie, Louis Rolland : théoricien oublié du service public, RD publ. 2006. 847). La gratuité est donc d'abord perçue comme le moyen par excellence de garantir l'accès égal de tous les usagers à un même service public. Liée à la création, sous la IIIe République, des services publics obligatoires, cette approche universaliste prévaudra aussi longtemps que les discriminations tarifaires seront refusées par la jurisprudence relative au principe d'égalité. La gratuité est alors conçue comme « un dérivé, une expression particulière, sur le plan financier, de l'égalité formelle, par l'universalité » et est en quelque sorte un principe du service public par procuration : « Elle garantit l'égalité devant le service public en ce qu'elle permet à l'ensemble des usagers, quels que soient leurs moyens, leurs ressources propres, de pouvoir bénéficier de la même prestation d'intérêt général » (D. Charbonnel, Une relecture des lois du service public, th. Limoges, 2019, p. 444). Alors que l'accès générique et indifférencié aux services publics qu'elle permet était vu comme la meilleure garantie de la solidarité, la gratuité va être perçue comme un obstacle à l'égalité réelle, puisqu'elle empêcherait de pratiquer des discriminations positives. Le glissement progressif (et partiel) de l'égalité formelle vers l'égalité réelle, systématisé à partir des années quatre-vingt-dix (CE 18 mars 1994, n° 140870, Mme Dejonckeere, Lebon 562 ; CE, sect., 29 déc. 1997, n° 157425, Commune de Gennevilliers, Lebon ; et n° 157500, Commune de Nanterre, Lebon ; AJDA 1998. 168 ; et 102, chron. T.-X. Girardot et F. Raynaud ; RFDA 1998. 539, concl. J.-H. Stahl), déplace la gratuité de l'égalité vers l'accessibilité : la gratuité partielle devient la garantie de l'accessibilité des services publics (v., sur ce point, L. Cluzel, Le service public et l'exigence de qualité, préc., p. 227). A la gratuité par absence de prix succède la gratuité par dispense de prix, qui révèle deux conceptions de la solidarité (M. Borgetto, L'idée de gratuité et la notion de solidarité sociale, in G. J. Guglielmi et G. Koubi [dir.], La gratuité, une question de droit ?, préc., p. 23). Les moyens de cette « gratuité différenciée » sont divers, soit qu'un « tarif gratuit » soit mis en place pour permettre l'accès d'une catégorie d'usagers au service, soit que ces derniers bénéficient d'une subvention ou d'une compensation rendant gratuit l'accès au service, le cas échéant a posteriori (G. J. Guglielmi et G. Koubi, Droit du service public, préc., p. 647). Ce passage de la gratuité du service à la gratuité dans le service modifie profondément la nature même de la notion. Alors qu'elle était perçue comme le moyen d'assurer l'égalité, c'est désormais à l'égalité qu'elle doit se conformer : l'autorité administrative qui décide une mesure de gratuité, perçue sous le prisme de la discrimination tarifaire, « doit respecter le principe d'égalité » (CE, sect., 18 janv. 2013, SOS Racisme, préc.). La tarification est perçue comme assurant l'égale contribution de tous au fonctionnement du service public, que la gratuité risquerait de remettre en cause si elle n'est pas justifiée par un motif d'intérêt général ou une différence de situation entre usagers. Elle ne devient que la modalité extrême de la progressivité du prix demandé à l'entrée du service, de son « onérosité modulée » (D. Charbonnel, préc., p. 447). Cette évolution est confortée par le droit de l'Union européenne, en particulier par l'émergence de la notion de service universel permettant la fourniture d'un service de base sur l'ensemble du territoire, dans des conditions égales pour tous, à un « prix abordable » pour tous, notion qui « semble constituer une alternative à l'inexistence d'un principe de gratuité » (V. Donier, Les lois du service public : entre tradition et modernité, préc.). B. La continuité, justification dépassée de la gratuité S'il est un point sur lequel s'accordent tous les auteurs de droit administratif lorsqu'ils abordent la gratuité, c'est sur le caractère « politique » de la notion. En l'absence de principe de gratuité, la décision de mettre en oeuvre la gratuité (ou la non-gratuité) d'un service public, totalement ou pour certains usagers, est « une option politique quasiment discrétionnaire » (R. Hertzog, Le prix du service public, préc.). Si l'on s'accorde sur le fait que cette décision est « d'essence politique » (M. Borgetto, L'idée de gratuité et la notion de solidarité sociale, préc., p. 22), c'est parce qu'elle met en oeuvre une conception de l'Etat qui dépasse la seule organisation pratique des services publics. L'usage de la gratuité est donc un marqueur des évolutions du rôle et des missions de l'Etat et de la place qui est accordée dans ce cadre aux services publics et, en particulier, à la relation à l'usager. La première justification de la gratuité est liée à la continuité de l'Etat, et à l'enracinement de la République. La gratuité concerne alors « tous les services pensés "obligatoires" pour les administrés, pour les habitants des communes. Faire payer pour une contrainte pouvait assurément paraître incongru » (G. Koubi, Gratuité ? Sans prix certes, mais pas sans valeur !, in G. J. Guglielmi et G. Koubi [dir.], La gratuité, une question de droit ?, préc., p. 13). L'usage obligatoire de services publics, assurant la visibilité et la continuité de l'Etat républicain, doit être garanti par la gratuité. Le service de l'instruction publique est le premier concerné par cette approche, sa gratuité procédant de l'intérêt de l'Etat qui exige « une éducation morale et civique obtenue par une sage pédagogie tout autant que l'instruction » (M. Hauriou, Précis de droit administratif et de droit public, préc., p. 113). La gratuité n'est pas un dérivé laïc de la charité mais un élément central du projet démocratique. Ferdinand Buisson expliquait ainsi, à propos de la gratuité de l'enseignement primaire, que « notre démocratie ne l'a jamais conçue que comme un devoir de l'Etat corrélatif à un devoir du citoyen et comme une application de la grande loi de l'égalité » (Dictionnaire de pédagogie et d'instruction primaire, Hachette, 1887, cité par H. Orizet, Le service public de l'éducation nationale sous la troisième République, th. Nantes, 2017, p. 193). La gratuité, dans ce cadre, ne saurait être une décision libre du gestionnaire du service, mais la conséquence d'une norme étatique, garantissant la mise en oeuvre continue, sur l'ensemble du territoire, d'un service public dont le caractère national est revendiqué (v. les explications d'H. Orizet, préc., p. 398, à propos de la « nationalisation » du logement des instituteurs et de l'entretien des écoles primaires). La gratuité est donc aussi le moyen de rendre visible et concret le mythe fondateur du désintéressement du service public, rejoignant le devoir de désintéressement du fonctionnaire dans la mise en oeuvre de « l'esprit de service public » (G. Koubi, Gratuité ? Sans prix certes, mais pas sans valeur !, préc., p. 18). Le service public que révèle la gratuité ne peut donc pas trouver sa légitimité dans le service rendu mais dans la solidarité nationale et le pouvoir d'imposer (R. Bonnard, Précis de droit public, Sirey, 1944, p. 828). C'est aussi la raison pour laquelle la gratuité est si faiblement présente dans l'école du service public : parce qu'elle est liée à une conception des services publics comme « des moyens de police et des façons d'assurer l'ordre public » (M. Hauriou, Précis de droit administratif et de droit public, préc., p. 31). Cette articulation étroite entre gratuité et continuité de l'Etat a disparu dès lors que le pragmatisme administratif et les nécessités liées à l'expansion des services publics ont imposé de rechercher un financement, même complémentaire, auprès des usagers. C'est désormais la continuité matérielle des prestations qui justifie que l'on recherche des financements autres que l'imposition, au risque de perdre tout lien avec le principe de continuité du service public - voire tout lien avec le service public. S'il est peut-être excessif de considérer que « dès que surgit la rhétorique de la prestation, l'idée de service public ne deviendrait qu'accessoire » (G. Koubi, Méprises sur la gratuité des prestations de service... public, RGCT 2016. 137, n° 59), le fait que le recours à la tarification soit désormais la règle générale ne peut rester sans conséquence sur la nature même du service public. Si l'idée de gratuité a pu effectivement correspondre à une « conception de l'Etat libéral dont l'action économique devait se cantonner dans les secteurs non marchands » (A.-S. Mescheriakoff, Droit des services publics, préc., p. 195), le repli généralisé de la gratuité, et son cantonnement presque exclusif au traitement des discriminations, sont également la marque d'une approche « libérale » des services publics. La première raison de la disparition de la gratuité est en effet d'ordre psychologique : elle est la conséquence de « l'impossibilité de dépasser un seuil de prélèvements fiscaux, qui amène à reporter sur les usagers la prise en charge du coût des services » (A.-S. Mescheriakoff, préc., p. 196). Parce que l'exigence de services publics croît, il faut « rechercher dans le prix des recettes d'appoint » (R. Hertzog, Le prix du service public, préc.), à défaut de pouvoir compter sur les recettes fiscales pour assurer la continuité de la fourniture des services publics. Dans cette perspective, la gratuité peut être perçue comme un obstacle, voire une « impasse », notamment en raison des biais comportementaux qu'elle induit chez les usagers (L. Bahougne, L'usager et le financement du service public - Pour une approche comportementale, RFFP 2019, n° 148, p. 93), mais aussi sans doute chez les gestionnaires de service. Parce que la liaison opérée entre service public et continuité de clairement respecté puisque les usagers bénéficient d'un traitement strictement égalitaire pour bénéficier du service public. B. La gratuité partielle La gratuité partielle d'un service public de transport se caractérise lorsque l'AOM offre à certains usagers ou à l'occasion de certains évènements un droit à bénéficier gratuitement de ce service. Sans prétendre à l'exhaustivité, des dispositifs offrant la gratuité des transports publics existent au profit des anciens combattants, des bénéficiaires d'aides sociales, telles que la complémentaire santé solidaire (CSS ; anciennement couverture maladie universelle [CMU]), le revenu de solidarité active (RSA) ou l'aide médicale de l'Etat (AME), des personnes handicapées, des enfants scolarisés ou des demandeurs d'emploi. Il faut préciser que les dispositifs permettant de bénéficier de la gratuité ne sont pas généralisés dans tous les réseaux de transport, bien au contraire, et que les AOM préfèrent instaurer des régimes de réduction tarifaire au profit de certains usagers. En effet, le principe d'égalité devant le service public, s'il ne s'oppose pas à l'introduction d'une différenciation tarifaire, ne saurait obliger l'administration à y procéder. Le contrôle juridictionnel des choix opérés par les autorités en charge des services publics est en outre très abstrait, ce qui empêche de faire valoir toute particularité d'une situation donnée(3). Dans ces circonstances, la question du respect du principe d'égalité devant le service public se pose en des termes évidemment différents. Néanmoins, du point de vue juridique, l'application d'une telle politique tarifaire différenciée ne pose guère de difficulté. La jurisprudence est d'ailleurs particulièrement claire sur ce point : les discriminations tarifaires sont interdites entre les usagers d'un même service public ou d'un même ouvrage public « à moins qu'elles ne soient la conséquence nécessaire d'une loi, soit qu'il existe entre les usagers des différences de situation appréciables, soit qu'une nécessité d'intérêt général en rapport avec les conditions d'exploitation du service ou de l'ouvrage commande cette mesure » (CE, sect., 10 mai 1974, n° 88032, Denoyez et Sieur Chorques, Lebon). Cette jurisprudence a ensuite été fait sienne par le Conseil constitutionnel : « En précisant [...] que l'acte administratif instituant une redevance sur un ouvrage d'art reliant des voies départementales peut prévoir des tarifs différents ou la gratuité, selon les diverses catégories d'usagers, pour tenir compte soit d'une nécessité d'intérêt général en rapport avec les conditions d'exploitation de l'ouvrage d'art, soit de la situation particulière de certains usagers, et notamment de ceux qui ont leur domicile ou leur lieu de travail dans le ou les départements concernés, la loi dont il s'agit a déterminé des critères qui ne sont contraires ni au principe de l'égalité devant la loi ni à son corollaire, celui de l'égalité devant les charges publiques » (Cons. const. 12 juill. 1979, n° 79-107 DC, Ponts à péage). Enfin, cette jurisprudence a été confirmée par la juridiction suprême de l'ordre administratif (CE, sect., 29 déc. 1997, n° 157425, Commune de Gennevilliers, Lebon ; et n° 157500, Commune de Nanterre, Lebon ; AJDA 1998. 168 ; et 102, chron. T.-X. Girardot et F. Raynaud ; RFDA 1998. 539, concl. J.-H. Stahl). Un arrêt rendu par le Conseil d'Etat (CE 4 mai 2011, n° 322901, Epoux Sanchez, AJDA 2011. 1704), à propos de la différence de traitement entre élèves d'établissements publics et privés recourant au service de transport scolaire, illustre parfaitement cette jurisprudence. Une élève s'était vu refuser l'attribution d'une carte de transport scolaire gratuit au motif qu'elle fréquentait, du fait d'une dérogation accordée par l'inspecteur d'académie, un établissement d'enseignement public situé en dehors du secteur de ramassage scolaire correspondant à celui dont dépend son domicile. Ses parents se plaignaient de la non-application au profit de leur fille d'une délibération du conseil général permettant aux élèves scolarisés dans un établissement privé de bénéficier de la gratuité du transport scolaire même si ledit établissement était situé en dehors du secteur du ramassage scolaire correspondant à leur domicile. Pour le juge administratif, « cette différence de traitement ne trouve sa justification ni dans une différence de situation objective entre deux catégories d'usagers, ni dans aucun motif d'intérêt général en rapport avec l'objet du service public du transport scolaire ». Ainsi, la gratuité, notamment dans le cadre des services publics de transport, peut entrer dans le champ « des discriminations positives [qui] sont admises lorsqu'elles sont nécessaires pour assurer une vraie égalité » (intervention de B. Stirn, à l'occasion du colloque d'Athènes, « Service(s) public(s) en Méditerranée », les 19 et 20 oct. 2017 : https://www.conseil-etat.fr/actualites/discours-et- interventions/le-service-public-dans-la-jurisprudence-du- conseil-d-etat-francais). A cet égard, on peut souligner que « Duguit défend [...] ce qu'il appelle "le vrai principe d'égalité", qui consiste à entendre l'égalité "seulement en ce sens que tous les hommes doivent être également protégés par la loi" et que "les charges [...] doivent être non pas arithmétiquement égales, mais proportionnelles" ». Ces mêmes pages (Traité de droit constitutionnel, t. III) suggèrent qu'une telle interprétation du principe d'égalité (qui n'exclut pas certaines formes d'inégalités, puisque l'égalité proportionnelle n'aboutit évidemment pas à l'égalitarisme, mais consiste plutôt à procéder de façon juste en matière de répartition) correspond à l'interprétation « libérale » du principe d'égalité : alors que le faux principe de l'égalité naturelle et absolue des hommes conduit en fait à donner une « justification apparente » à la « lourde tyrannie qu'on faisait peser sur le pays » (pour « étendre un niveau égalitaire sur tous les individus »), l'Etat libéral se donne pour but de « faire des lois en harmonie avec les différences naturelles ou acquises entre les hommes - selon un principe d'égalité proportionnelle » » (L. Thiaw-Po- Une, Les services publics face au principe d'égalité, préc.). On le voit donc particulièrement bien ici, pour ce qui est des modalités d'organisation des services publics de transport, la gratuité se révèle être le complément utile du principe d'égalité des usagers devant le service public. Qu'en est-il au niveau de ses implications ? II - Les implications de la gratuité et les principes du service public Lorsqu'une AOM fait le choix de la gratuité, cela répond nécessairement à des objectifs et emporte certaines conséquences notamment au plan financier. Ces implications, qui vont varier selon la forme de gratuité mise en place, invitent, elles aussi, à réfléchir sur leur rapport avec les principes du service public. A. Une gratuité répondant à des objectifs politiques Pour le groupement des autorités responsables de transport (GART), qui a étudié la mise en place de la gratuité totale pour les services publics de transport, « les motivations de mise en oeuvre de la gratuité sont multiples et différentes selon la taille des réseaux. Les témoignages [...] ont mis en exergue trois objectifs fondamentaux : favoriser la rationalité économique du service public et de la gestion des ressources financières de l'autorité organisatrice, notamment dans les petits réseaux, partant du constat que les coûts d'investissements et de gestion de la billetterie et des tarifs s'avèrent parfois supérieurs aux ressources procurées par les recettes de la tarification ; assurer l'efficacité technique et valoriser l'image d'un service public peu, voire très peu, utilisé en regard des moyens techniques et humains alloués localement ; renforcer l'utilité socio-économique et environnementale des transports publics en supprimant toutes conditions d'accès et de limites d'utilisation des transports aux catégories sociales les moins aisées et en facilitant, pour tous les habitants, un changement de comportement favorisant la non-utilisation de la voiture particulière » (GART, Gratuité(s) des transports publics pour les usagers, rapport d'analyse, 2 oct. 2019). Quant à l'autre forme, la « gratuité partielle se décline [elle]- même en un grand nombre de possibilités et répond à des ambitions multiples. La mise en place de tarifs préférentiels pour les plus jeunes [est] un moyen de fidéliser les adultes de demain et de faciliter la mobilité des familles [...] l'introduction de tarifs préférentiels à destination des personnes sans emploi ou des personnes disposant de peu de ressources [peut s'analyser comme] une mesure de justice sociale [...]. La mise en place de la gratuité des transports collectifs à l'occasion de certains évènements répond à des objectifs multiples, selon les situations. Il peut s'agir d'une part d'évènements culturels ou touristiques que l'AOM souhaite mettre en lumière, ou afin de fluidifier les réseaux en cas de forte affluence. [...] D'autres cas de figure conduisent à rendre le réseau gratuit temporairement. Il s'agit notamment des épisodes de pics de pollution » (M. Vullien et G. Gontard, Gratuité des transports collectifs : fausse bonne idée ou révolution écologique et sociale des mobilités ?, Rapp. d'information n° 744, Sénat, sept. 2019). La lecture de ces différents objectifs que peuvent avancer les AOM en faveur de la gratuité rappelle tout d'abord qu'un tel choix n'est pas contraire au principe de mutabilité ou d'adaptation des services publics. Ce dernier, qui garantit « le droit pour une personne publique assurant ou assumant une mission de service public de modifier la mise en oeuvre de celui-ci en raison de l'évolution des circonstances de fait ou de droit, à la condition de prévoir une indemnisation compensatoire au bénéfice de l'éventuel cocontractant » offre la possibilité aux autorités d'instaurer la gratuité quand elles le désirent. Le principe de mutabilité (https://chevaliersdesgrandsarrets.com/2012/01/11/levolutio n-du-principe-de-mutabilite-du-service-public/) a été reconnu à partir de l'arrêt du Conseil d'Etat du 10 janvier 1902 (n° 94624, Compagnie nouvelle du Gaz de Deville-lès-Rouen c/ Commune de Deville-lès-Rouen, Lebon), dans lequel le juge administratif a admis pour « la commune de Deville la faculté d'assurer ce service au moyen de l'électricité, en le concédant à un tiers dans le cas où la compagnie requérante dûment mise en demeure refuserait de s'en charger aux conditions acceptées par ce dernier ». Le Conseil d'Etat, dans l'arrêt de section Vannier, du 27 janvier 1961, en a déduit que « les usagers d'un service public administratif n'ont aucun droit au maintien de ce service ; qu'il appartient à l'administration de prendre la décision de mettre fin au fonctionnement d'un tel service lorsqu'elle l'estime nécessaire, même si un acte réglementaire antérieur a prévu que ce fonctionnement serait assuré, pendant une durée déterminée, à la condition, toutefois, que la disposition réglementaire relative à cette durée soit abrogée par une mesure de même nature émanant de l'autorité administrative compétente ». Il faut néanmoins souligner que cela peut poser certaines difficultés juridiques lorsque la collectivité publique a confié le service de transport à un tiers par contrat. En effet, la gratuité du service pour les usagers soulève la question du mode de contractualisation et, en particulier, celle du choix entre la délégation de service public (DSP) et le marché public de service. Il ressort de la jurisprudence que « la voie de la DSP est bien envisageable dès lors qu'une part substantielle de la rémunération du cocontractant est susceptible de varier en fonction de la fréquentation des lignes de transports et des recettes susceptibles d'être générées par ailleurs dans le cadre de cette exploitation » (O. Guillaumont, Un service gratuit de transport urbain de voyageurs peut-il constituer une DSP ?, RLCT 2010, n° 58 ; v. aussi, D. Broussolle, Transports routiers de voyageurs, J.- Cl. Adm., fasc. 275). Sans s'étendre sur cette problématique, on se contentera de souligner que, même si la gratuité a tendance à augmenter les subventions directes versées par la collectivité à l'opérateur, il est toujours possible que « la partie fixe de la contribution financière n'a[it] pas pour objet ou pour effet de couvrir la totalité d'un risque de déficit car elle a un caractère forfaitaire et est calculée en fonction d'un engagement de dépenses et d'un engagement de recettes, donc d'un déficit prévisionnel et non d'un déficit constaté » (C. Cabanes et B. Polderman, Délégation de service public : légalité d'un avenant instaurant la gratuité dans les transports, Contrats Publics 2014, n° 145, p. 74 et s.). Par ailleurs, nous pourrions considérer que la gratuité des services publics de transport constituerait une recherche d'une meilleure accessibilité. A cet égard, il faut tout de suite affirmer que nos propos n'entendent pas faire référence à la conception restrictive de ce principe. En effet, au plan strictement juridique, le principe d'accessibilité vise surtout à assurer la présence administrative en milieu rural ou dans les quartiers en difficulté des zones urbaines pour faire en sorte que les services publics soient présents sur l'ensemble du territoire national, quitte à favoriser de nouvelles formes de coopération entre les services publics ou entre les services publics et les entreprises privées. La charte des services publics, définie en février 1992, présentée et confirmée au conseil des ministres du 18 mars 1992, énonce en particulier que « ces services publics de proximité pourront prendre la forme de mise en commun de moyens, de guichet unique, de formations communes, éventuellement de réorganisations fonctionnelles conduisant à des regroupements de service ou des redécoupages de circonscriptions d'action locale ». C'est donc à une interprétation renouvelée de l'accessibilité qu'invite la gratuité des services publics de transport. Permettre à chacun de bénéficier de cette prestation gratuitement crée une accessibilité facilitée à ce service mais aussi une accessibilité plus grande aux autres services publics - puisque les services publics de transport sont organisés afin de desservir les lieux de vie les plus importants correspondant à des sièges de service public tels que la mairie, les tribunaux, les établissements scolaires... Comme le concluait le rapport sénatorial relatif à la gratuité des transports collectifs, « l'exemple des villes françaises qui l'ont instaurée montre qu'elle permet à tous, notamment aux plus éloignés de la mobilité et aux plus démunis, d'accéder à toutes les fonctions sociales et économiques de la ville : en ce sens, par la facilité d'utilisation qu'elle permet, la gratuité des transports collectifs ouvre la voie à une révolution sociale des mobilités » (M. Vullien et G. Gontard, Rapp., préc.). B. Une gratuité correspondant à un coût pour l'autorité publique Imposer une telle mesure se répercute nécessairement sur le budget de la collectivité et, donc, sur le contribuable. Toutefois, comme le souligne le rapport du Sénat, pour « 2015, hors Ile-de-France, les recettes tarifaires finançaient 20 % des coûts d'exploitation des réseaux dotés de métro et tramway, 12 % des coûts d'exploitation des grands réseaux uniquement dotés de lignes de bus et 11 % des coûts des réseaux de transports des villes de 50 000 à 100 000 habitants ». Mais plus intéressant encore, « ces chiffres témoignent d'une forte baisse de la participation des usagers au financement des transports collectifs en quinze ans, puisqu'en 2000 les recettes tarifaires couvraient 23 % des coûts d'exploitation des réseaux dotés de métro et tramway, 25 % des coûts d'exploitation des grands réseaux uniquement dotés de lignes de bus et 23 % des réseaux de transports des villes de 50 000 à 100 000 habitants » (Rapp., préc.). Et si l'on s'intéresse aux recettes de la billettique dans les villes qui ont opté pour la gratuité, avant que celle-ci ne soit mise en oeuvre, il apparaît qu'elles ne couvrent pas plus de 15 % du coût du service public(4). Ainsi, les chiffres montrent que, même si elle implique un effort financier pour l'AOM, la gratuité ne représente qu'un poids relatif sur les finances publiques. Cependant, il ne faut pas ignorer un élément d'importance. La raison principale à la réduction du financement assuré directement par les usagers réside dans la forte augmentation des coûts d'exploitation des réseaux de transport. Dès lors, la question de la gratuité doit être nécessairement envisagée au regard de celle de la pérennité des offres de mobilité, surtout lorsqu'elle suppose de lourds investissements. Cela invite, à notre sens, à s'interroger sur l'adéquation de la gratuité avec le principe de continuité, lequel vise à garantir un fonctionnement régulier du service public. Protégé par le Conseil constitutionnel depuis 1979 (Cons. const. 25 juill. 1979, n° 79-105 DC, Continuité du service public de la radio et de la télévision en cas de cessation concertée du travail), ce principe permet à l'autorité de prévoir des mesures particulières d'organisation du service public, sous le contrôle du juge administratif (v. CE 7 août 1909, n° 37317, Winkell, Lebon). La doctrine a souligné « un déplacement de l'objet de la continuité : naguère principalement envisagée dans sa dimension temporelle, elle l'est désormais aussi dans sa dimension spatiale » (D. Truchet, Unité et diversité des « grands principes » du service public, AJDA 1997. 38, numéro spécial « Service public, unité et diversité »). Ici aussi, on invite le lecteur à une interprétation renouvelée de ce principe essentiel pour le fonctionnement des services publics qui, comme l'avait souligné Didier Truchet, « exprime une profonde revendication de solidarité : chacun doit pouvoir profiter des prestations fournies par le service public parce qu'il n'y a pas, en droit, de citoyens "mineurs" ni de citoyens privilégiés » (D. Truchet, préc.). Dans certains cas, la gratuité pourrait être un facteur permettant d'améliorer la régularité et l'efficacité non seulement du service public de transport mais aussi celles des autres services publics. En effet, pour un coût relativement minime pour la collectivité, on peut accroître la fréquentation des services publics et tirer avantage de tous les bénéfices induits par le développement des transports publics. Néanmoins, la gratuité ne présente pas toujours les caractéristiques d'un cercle vertueux. En d'autres termes, s'il y a des hypothèses où le renoncement aux recettes tarifaires n'obère pas le fonctionnement du service public de transport, cela n'est pas généralisable à toutes les situations. Dans ces autres cas, le principe de continuité pourrait alors se dresser contre la gratuité et constituer éventuellement un moyen d'annulation des décisions des AOM qui instaurerait la gratuité, en particulier la gratuité totale, sans en avoir pesé toutes les conséquences. Au terme de cette étude, il semble possible de conclure non seulement que les autorités publiques disposent des prérogatives pour organiser un service public de transport gratuit mais que cette formule peut également répondre aux exigences des lois de Rolland, ces principes communs à tous les services publics. Mais on souhaite souligner aussi que d'autres mesures peuvent se révéler aussi utiles que les services totalement ou partiellement gratuits. Tel est le cas, par exemple, d'une tarification solidaire fine. *** (1) Sur les principes de participation ou de simplicité, par exemple, voir Conseil d'Etat, Service public, services publics : déclin ou renouveau, Rapport public pour 1994, EDCE, n° 46, 1995, resp. p. 81 et s., et p. 92 et s. (2) Principes qui permettent « de mettre en valeur l'unité de régime des services publics » (v. M. Nicolas et S. Rodrigues, Dictionnaire économique et juridique des services publics en Europe, ASPE Europe, 1998, p. 185 et s. ; et L. Rolland, Précis de droit administratif, Dalloz, 11e éd., 1957, spéc. p. 18 et s). (3) Voir L. de Fournoux, Quelle signification pour l'égalité devant le service public ?, LPA 3 juin 2019, n° 144, p. 9 ; v. aussi CE, ass., 28 mars 1997, n° 179049, Société Baxter, Lebon ; RFDA 1997. 450, concl. J.-C. Bonichot ; et 460, obs. F. Mélin-Soucramanien : « [...] Le principe d'égalité n'implique pas que des entreprises se trouvant dans des situations différentes doivent être soumises à des régimes différents [...] ni l'institution de trois contributions différentes, ni l'existence de règles d'exonérations spécifiques à chacune d'entre elles ne méconnaissent le principe d'égalité devant l'impôt, dès lors
Docsity logo


Copyright © 2024 Ladybird Srl - Via Leonardo da Vinci 16, 10126, Torino, Italy - VAT 10816460017 - All rights reserved