Docsity
Docsity

Prépare tes examens
Prépare tes examens

Étudies grâce aux nombreuses ressources disponibles sur Docsity


Obtiens des points à télécharger
Obtiens des points à télécharger

Gagnz des points en aidant d'autres étudiants ou achete-les avec un plan Premium


Guides et conseils
Guides et conseils

LE 18 BRUMAIRE AN VIII : « RUPTURE » ET « CONTINUITÉ », Notes de Évolution

Il ajoute que ce régime « fut remplacé le 18 brumaire par une dictature militaire à peine camouflée, résultat du coup d'État d'un jeune militaire.

Typologie: Notes

2021/2022

Téléchargé le 03/08/2022

Clemence
Clemence 🇫🇷

4.4

(35)

100 documents

1 / 11

Toggle sidebar

Documents connexés


Aperçu partiel du texte

Télécharge LE 18 BRUMAIRE AN VIII : « RUPTURE » ET « CONTINUITÉ » et plus Notes au format PDF de Évolution sur Docsity uniquement! LE 18 BRUMAIRE AN VIII : « RUPTURE » ET « CONTINUITÉ » Introduction Gustave Le Bon, en 1912, écrivait dans La Révolution française et la Psychologie des Révolutions que « chacun sentait, y compris les Directeurs, que le régime républicain ne pouvait plus durer » (p.166). La vision de Le Bon, tardive, montre bien l'état d'esprit du moment, mais nullement la réalité, surtout lorsqu'il écrit, parlant du coup d'État, que « son exécution, le 18 brumaire, s'accomplit avec une extrême facilité » (p.168) Il convient donc de nuancer cette vision de l'évènement de brumaire. En 2007, dans son essai Aux armes historiens, Éric Hobsbawm est critique envers le Directoire, expliquant que le « régime a manqué d'un soutien politique ou de la capacité à restaurer les conditions de stabilité » (p.17). Il ajoute que ce régime « fut remplacé le 18 brumaire par une dictature militaire à peine camouflée, résultat du coup d'État d'un jeune militaire victorieux, Napoléon Bonaparte. » (p.17) Cette curieuse approche du coup d'État met en avant la décomposition d'un régime impopulaire et inefficace afin de montrer l'arrivée au pouvoir de Bonaparte comme étant inévitable. Or, sait-on comment se sont déroulées réellement les journées de brumaire ? Sait-on qu'au lieu d'un seul coup d'État nous pouvons aisément parler des « coups d'État » de brumaire ? Avant d'entrer dans le récit de ses journées de brumaire, replaçons assez vite le contexte politique et militaire. L'instabilité du régime était alors apparente, avec une forte poussée jacobine aux élections de l'an VII. Ajoutons à cela la reprise de la pression des « bandes » royalistes dans le Sud-Ouest et nous comprenons pourquoi les contemporains ont vu dans le Directoire un régime incapable de rétablir l'ordre. Thierry Lentz, dans Le 18 brumaire, en 2010, explique bien que « cette guérilla allait culminé à l'été [1799] » (p.157), ajoutant que « sur le plan militaire, la deuxième coalition ne cessait d'enregistrer des succès » (p.157). L'opinion générale, comme le note un rapport du Directoire, est que « tout se décompose ». Quant à Jean-Paul Bertaud, dans La Révolution française (2004), il nous dit que « les contemporains et, par la suite, les historiens accusent le régime d'engendrer et de perpétuer, avec l'instabilité et la banqueroute financière, le désordre à l'intérieur. » (p.313) Finalement, c'est Jacques-Olivier Boudon (2004) qui résume le mieux la situation en expliquant que « la France subit alors une grave crise politique. Les partis sont divisés. Tandis que les royalistes rêvent à la restauration de la monarchie, les jacobins, revigorés par leurs récent succès électoraux, souhaitent revenir sur le devant de la scène. » (p.43) L'impression générale est bien celle de l'instabilité du régime, mais aussi de l'insécurité intérieure. La diversité des point de vue concernant le contexte politique et militaire va accentuer la complexité des interprétations du coup d'État. I. Le « paradoxe » de brumaire. La question du « paradoxe » est d'une importance cruciale pour comprendre la portée des évènements de brumaire en se demandant si nous pouvons placer le coup d'État dans la « continuité » ou dans la « rupture » de la Ière République. Le 18 brumaire est placé essaie d'exprimer la fluidité avec la lumière qui semble baigner l'ensemble de la scène, la rendant plus apaisée qu'elle ne fut en réalité. Concernant cette journée, Stendhal, dans son Napoléon (1818), nous explique que « la gloire de cette grande révolution est restée au président du Conseil des Cinq-Cents qui monta à la tribune une forme de courage au moment où son frère faiblissait. Il eut la plus grande influence dans la Constitution que l'on bâtit à la hâte. » (chapitre 18) Même dans ses Mémoires, Bonaparte devenu Napoléon, minimise le rôle de son frère en ce jour de gloire. La maladresse du général, sa perte de contenance ne paraît pas dans les tableaux les plus connu, comme celui de Bouchot que je viens de décrire. Ainsi, les idées reçues que nous avons du 19, c'est le mythe des poignards et la force de caractère de Bonaparte, qui, comme il se plaît à le dire dans ses Mémoires, n'a eu qu'à se présenter devant les députés pour faire infléchir les choses en sa faveur. En réalité, certainement pas. « Il suffit (...) que Lucien, président du Conseil des Cinq-Cents, s'interpose pour que la position mal engagée de son frère soit retournée à son avantage » (p.46) Le tableau de Jacques Sablet Jacques Sablet (1749-1803) a représenté l’évènement alors qu’il touche à sa fin. Les députés des deux Conseils ont été rappelés dans la nuit. Ils pénètrent dans la salle de l’Orangerie sous la surveillance des militaires de Leclerc et de Murat. Les deux généraux se tiennent au centre de la salle. À leur côtés nous avons les trois consuls « provisoires ». Ils attendent que les pouvoirs leur soient remis. Les députés semble former des groupes et commenter le discours que Lucien prononce à la tribune. L’éclairage rudimentaire et la nudité du lieu dénotent le caractère improvisé de l’évènement. Seule la silhouette noire de Lucien émerge clairement à droite de cette composition. L'illustration de Jacques Sablet semble être la plus réaliste, car la mieux documentée. Le peintre était proche du clan Bonaparte grâce à son protecteur François Cacault qui était un membre des Cinq-Cents rallié à Napoléon. Le cardinal Fesh et Lucien sont même devenus ses clients. Si Sablet n'a peut-être pas été le témoin de la soirée, il ne fait aucun doute qu'il a vécu les journées de brumaire de très près. De fait son tableau n’a rien de commun avec les images contemporaines relayant l’épisode des poignards – auxquels le « sauveur de la France » aurait été exposé dans la soirée – inventé après coup par Lucien pour les besoins de la propagande – il s’agissait de rendre héroïque un moment qui l’avait été bien peu. Le peintre fait au contraire du jeune législateur, Lucien Bonaparte, qui a alors vingt-cinq ans, l’acteur principal de la soirée, celui qui a négocié le Consulat « provisoire » après avoir séduit par son éloquence une assemblée quelque peu ennuyée car de toute façon sous pression de l'armée. On comprend que la gravure ait été dérangeante pour le général Napoléon Bonaparte, puis pour le Premier Consul Bonaparte. En effet, Lucien est trop brillant, trop populaire et trop républicain pour plaire à son frère. D'après Bronislaw Baczo, Bonaparte place le coup d'État du 18 brumaire dans la continuité de cette fin du XVIIIe siècle dans laquelle s'inscrit la Révolution française. Bonaparte aurait donc fait preuve d'audace, le 19, en essayant de calmer les députés afin d'évité de faire des allusions marquées au passé monarchiste. Le texte votée le 19 au soir est la Loi du 19 brumaire an VIII. Son article 2 stipule : « Le Corps Législatif créé provisoirement une Commission consulaire exécutive, composée des citoyens Sieyès, Roger Ducos, ex-directeurs, et Bonaparte, général, qui porteront le nom de Consuls de la République française. » De plus, cette même journée du 20, tous les différents acteurs – députés, consuls – prête le serment qui suit : « Je jure fidélité à la République une et indivisible, à la liberté et à l'égalité et au système représentatif ». Le consulat provisoire est mis en place en attente de la rédaction d'une nouvelle constitution, en l'occurrence celle de l'an VIII, du 24 Frimaire, c'est-à-dire du 25 décembre 1799. Dans l'esprit, la « continuité » semblé être assurée. Pour les contemporains, ce n'est qu'un coup d'État comme les autres, une autre forme de la République, mais en aucun cas une « rupture », c'est-à-dire un changement de régime. Il suffit, pour s'en assurer, de constater la faible contestation des provinces. Toutefois, avant de tirer une conclusion sur la réception par l'opinion du coup d'État, nous allons revenir sur les deux principaux acteurs des journées de brumaire, à savoir Sieyès et Bonaparte. Nous l'avons vu, le coup d'état parlementaire est associée à Sieyès, celui militaire à Bonaparte. Qu'est-ce qui, dans l'évolution des deux hommes, entraîna certaines prise de position et cette « alliance » de circonstance le 18 brumaire ? Nous allons donc revenir dans la deuxième partie sur les conditions de la « rupture » entre Bonaparte et la République, mais également sur la « rupture » entre le général et Sieyès. II. Les « coup d'États » de Brumaire : le passé et l'avenir Nous avons vu le déroulement des journées des 18, 19 et 20 brumaire an VIII. Nous avons pu nous rendre compte d'une évolution perceptible, passant d'une armée certes là, mais ne servant qu'à faire « pression » sur les députés, puis nous l'avons vu jouer un rôle de premier plan le 19, chassant au dehors les députés des Cinq-Cents. La loi du 19, qui entre en application le lendemain, qui, en plus d'être un des trois consuls, en obtiendra le premier la présidence. Ainsi, nous assistons à un mouvement de bascule avec Bonaparte au second plan le 18 et Sieyès au second plan le 19. Je tenterais de vous montrer pourquoi nous pouvons parler des « coup d'États » de brumaire. Tout d'abord, l'homme du 18, c'est-à-dire Sieyès. 1/Sieyès, le « révisionniste » et Bonaparte, le « sauveur » Entré dans les ordres sans une véritable vocation religieuse, Sieyès, vicaire général à Chartres, s'intéressent très tôt aux questions sociales. Il est élu député du tiers état de Paris et accède à la notoriété avec une brochure de propagande révolutionnaire intitulée, Qu'est-ce que le tiers état ?, publiée en janvier 1789. Le 31 octobre 1795, Sieyès est nommé Directeur, mais il refuse le poste. Il siège aux Cinq-Cents et devient membre de l'Institut. Il soutient le coup d'État de Fructidor an V (septembre 1797) contre les royalistes. En 98, il est nommé ambassadeur à Berlin. Il revient l'année suivante et est de nouveau élu au poste de directeur en mai 1799. Cette fois, il accepte le poste. Cela s'effectue dans un contexte de guerre avec l'Angleterre, puis avec l'Autriche (mars 1799). De plus, en avril, la gauche est victorieuse aux élections. En juin, Treilhard est remplacé par Gohier pour siéger parmi les cinq directeurs. La Réveillière-Lépaux et Merlin démissionnent, remplacé par Roger Ducos et Moulin, aux tendance plutôt jacobines. Il a des contacts très influent dans les milieux savants de la capitale. Il côtoie Daunou, Boulay de la Meurthe, Marie-Joseph Chénier ou encore Roederer. Sieyès, c'est l'homme de 1789, le porteur des idées, d'une certaine philosophie de la Révolution. Sieyès reste assez favorable à un gouvernement représentatif et à un pouvoir constitutionnelle, complété par un aspect révolutionnaire. Sa conception d'une nouvelle Constitution n'est pas très claire, mais il y aurait un « Grand Électeur », sorte de magistrat suprême, ainsi que deux « consuls », chefs de l'exécutif, et enfin des individus choisit sur des « listes de notabilité » formeraient un corps inamovible. « Sieyès veut [donc] changer la Constitution, ce qui ne peut peut se faire que par un coup d'État. Il désire remplacer le Directoire par un exécutif resserré formé de trois consuls. L'un d'eux doit-être un général auréolé de gloire. » (Napoléon Bonaparte, 2008) Il sait que pour réussir il ne peut pas se passer d'un « sabre », et donc, plus largement, de l'armée. Il aurait porté son choix d'abord sur Joubert, mais celui-ci est tué à la bataille de Novi, en Italie, en août 1799. Bernadotte est pressentie, mais laissé de côté au profit de Moreau, qui refuse, sans pour autant dénoncer le complot. Thierry Lentz explique que « avec le recul, la présence de Bonaparte dans la conspiration de Brumaire va de soi. Or, Sieyès a tout fait pour se passer du conquérant de l'Égypte à la personnalité trop affirmée et aux soutiens autrement plus importants que ceux dont bénéficiaient les autres « épées » possible. » (p.157-158) Sieyès reste un conventionnel, attaché à une idée de la Constitution et de la République. Certes, il veut « terminer » la Révolution, mais pas nécessairement la République. L'accent est mis, peu avant le coup d'État, sur la « peur » d'une restauration monarchique. Les bourgeois libéraux, souvent détenteur de « biens nationaux » veulent un régime fort leur garantissant les conquêtes, l'ordre, la propriété. Il faut donc un « sauveur » de la République. Ce « sauveur » est tout trouvé. Bonaparte a une expérience révolutionnaire en Corse où il côtoie Paoli. Très vite, il va intégrer le cercle de Robespierre, puis, après Thermidor, sera finalement arrêté. Il est finalement relâché et se rapproche de Barras. En 1796, il est commandant en chef de l'armée d'Italie. Il va forger son mythe là bas. Il est ambitieux et influencé par une littérature classique qui en fait, incontestablement, un esprit du XVIIIe. Pour Furet, il serait dominé par deux choses : les intérêts et la grandeur de la nation. En effet, Bonaparte met en avant le héros soldat, et donc la gloire. Passionnés par la guerre, nous savons que Bonaparte écrivit un Précis de la guerre des Gaules. D'ailleurs, l'armée providentiel » et l'idée communément admise, résumé par Maria Gilli : « Ce coup d'État n'est donc pas comparable aux autres, il signifie la fin et l'échec de l'expérience révolutionnaire ». Cet épisode est donc perçu comme un moyen d'autodéfense entraînant un repli sur elle-même de la France et donc la fin du cosmopolitisme si brillamment décrit par Emmanuel Kant. Vu par un soutien jacobin de la Révolution française, le coup d'État est à la fois une « rupture » d'avec les idées de la Révolution, mais c'est aussi une « rupture » avec la République et le retour au pouvoir personnel en France. Au point auquel nous arrivons, le coup d'État fut-il une « rupture » ou s'inscrit-il dans la « continuité » ? Curieusement, il semble s'inscrire, par l'orientation que lui en a donné Bonaparte, dans la « continuité » de la Révolution – c'est-à-dire celle de 1789 – mais pas dans la « continuité » de la République. Ainsi, c'est un « rupture » d'avec la République, et donc l'émergence d'un nouveau régime, qui même en martelant les mots de « république française » cache en réalité un nouveau pouvoir personnel, dont les contemporains, mise à par peut-être, comme je l'ai dit, Benjamin Constant, n'ont pas eu conscience tout de suite. Dans ma conclusion je répondrais donc, en quelque sorte à ma problématique : « rupture » ou « continuité » finalement ? Conclusion Sur le moment, le coup d'État est perçu comme la « continuité » du régime précédent avec un énième coup de force. D'ailleurs, comme le dit Petiteau, « le consulat est globalement bien accueilli parce qu'il permet d'espérer la fin du « désordre » et de « l'anarchie », position d'autant plus affirmé qu'à Bordeaux la Révolution a entravé l'activité commerciale » (p.36). Par exemple, dans l'Eure, du fait du brigandage et de l'activisme royaliste, la population souhaite un retour au calme et surtout à la sécuritaire. Souvent, le besoin « sécuritaire », ou l'illusion de ce besoin, permet ou entraîne le durcissement du régime. Il important de signaler également que la bourgeoisie des milieux d'affaires notamment aspire à la reprise du développement économique et ils n'ont pas vu dans Bonaparte le « sauveur » tant espérer. Quant aux modérés, aux administrateurs locaux, ils souhaitent pouvoir enfin bénéficier des acquis de la Révolution, et surtout de leur argent pris sur les biens de l'Église. Les élites craignent un débordement populaire et répriment tout ce qui s'apparente à une contestation. Bonaparte est donc l'incarnation du durcissement du régime, en « rupture » - malgré les apparences – avec la République. La « continuité » avec la Révolution est plus nette, mais en fait tout aussi illusoire puisque les élites au pouvoir veulent « terminer » la période révolutionnaire, profitant d'un régime autoritaire pour développer leur richesse. Finalement, le coup d'État de brumaire souligne non seulement une rupture politique, mais aussi un retournement des élites qui se comportent déjà comme les nobles de l'Ancien Régime que certain dénonçait dix ans plus tôt. Sieyès sera même fait comte d'Empire. Donc, l'intelligence de Bonaparte fut de simuler une « continuité » pour mieux affirmer et préparer la véritable « rupture » que sera en 1802 le consulat à vie, puis en 1804 le couronnement.
Docsity logo


Copyright © 2024 Ladybird Srl - Via Leonardo da Vinci 16, 10126, Torino, Italy - VAT 10816460017 - All rights reserved