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les colchiques, Exercices de Poésie

La colchique est une fleur mauve ou violette, vénéneuse, qui pousse dans les prés humides en automne. Apollinaire reprend dans ce poème tiré.

Typologie: Exercices

2021/2022

Téléchargé le 03/08/2022

Laurent_BB
Laurent_BB 🇫🇷

4.5

(52)

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Aperçu partiel du texte

Télécharge les colchiques et plus Exercices au format PDF de Poésie sur Docsity uniquement! LES COLCHIQUES Le pré est vénéneux mais joli en automne Les vaches y paissant Lentement s’empoisonnent Le colchique couleur de cerne et de lilas Y fleurit tes yeux sont comme cette fleur-là Violâtres comme leur cerne et comme cet automne Et ma vie pour tes yeux lentement s’empoisonne Les enfants de l’école viennent avec fracas Vêtus de hoquetons et jouant de l’harmonica Ils cueillent les colchiques qui sont comme des mères Filles de leurs filles et sont couleur de tes paupières Qui battent comme les fleurs battent au vent dément Le gardien du troupeau chante tout doucement Tandis que lentes et meuglant les vaches abandonnent Pour toujours ce grand pré mal fleuri par l’automne Guillaume APOLLINAIRE, Alcools, 1913. Points de grammaire possibles : Valeurs du présent Participe présent Proposition relative Phrase simple / phrase complexe CONTEXTE / OEUVRE Alcools regroupe les poèmes les plus connus d’Apollinaire, composés de 1898 à 1912. Les poème qui y apparaissent sont d’inspirations très diverse et correspondent à des moments biographiques. « Les colchiques » suivent la rupture amoureuse avec Annie Playden, une gouvernante anglaise qui était devenue son amie lors de son séjour en Allemagne, où il était engagé en tant que précepteur. La colchique est une fleur mauve ou violette, vénéneuse, qui pousse dans les prés humides en automne. Apollinaire reprend dans ce poème tiré d’Alcools un motif poétique fréquent, l’assimilation d’une femme aimée à une fleur. Alors que le thème de la rose est fréquent et souvent utilisé avec des connotations tragiques (la vie de la fleur, comme celle de la femme, est brève, cf RONSARD au XVI es), Apollinaire inverse ici les connotations en rénovant le thème littéraire ainsi que l’écriture traditionnelle du sonnet. Cette remise en cause de la poésie traditionnelle s’exprime déjà par le titre choisi pour l’ensemble du recueil, Alcools, une substance enivrante ici métaphore de la création artistique sans limites. En effet, le poème « Colchiques » est, en rupture avec certains genres poétiques du XIX e s (le romantisme qui magnifiait les sentiments, le Parnasse qui ne jurait que par la Beauté pure), mais également avec des thèmes et formes traditionnels qui nous viennent de la Renaissance : le blason, le thème de la femme-fleur, le sonnet. Apollinaire dit lui-même qu’il veut être un « poète nouveau, autant dans la forme que dans le fond ». PB : Nous nous proposons d’étudier comment s’opère la rénovation des thèmes traditionnels ainsi que celle de l’écriture même du sonnet. MOUVEMENT DU POEME (plan du texte) Strophe 1 : dans un cadre naturel surgit le thème traditionnel de la femme-fleur, qui se mélange de manière audacieuse avec celui des yeux de la femme aimée, inaugurant un blason de forme nouvelle. Les colchiques sont ingérées par des vaches Strophe 2 : l’image bucolique est à présent centrée sur des enfants qui cueillent les colchiques, mais les thèmes amoureux restent présents en arrière-plan Strophe 3 : les vaches quittent le pré, qui se retrouve abandonné avec sa floraison de colchiques. En fait la structure narrative n’est que le discours apparent, et se mêle à celui que le poète adresse à Annie ; il est donc difficile – et c’est un des traits du renouveau poétique d’Apollinaire – de délimiter clairement le mouvement du poème. Nous verrons que la forme d’ensemble, qui s’abrège de strophe en strophe, est bien celle d’un sonnet, mais revisité. LE POETE POSE UN CADRE SPATIO-TEMPOREL NATUREL : LA FLORAISON AUTOMNALE ; MAIS LE CADRE REALISTE GLISSE AU FANTASTIQUE PAR SON CARACTERE INQUIETANT Le pré est vénéneux mais joli en automne Les vaches y paissant Lentement s’empoisonnent Le premier vers étonne par l’envoi immédiat d’une antithèse surprenante : VENENEUX MAIS JOLI. Le thème bucolique annoncé par le mot introducteur PRE est immédiatement nié : il ne s’agit pas comme dans les poèmes traditionnels de décrire une belle nature. Au contraire, les 3 premiers vers annoncent le thème de la mort, mais une mort particulière : par empoisonnement (VENENEUX/S’EMPOISONNENT), càd à la fois une mort lente (soulignée d’ailleurs par Si l’on observe la mise en page, très chère à Apollinaire (cf les Calligrammes, ou dans Alcools les reflets de l’eau dans « Le pont Mirabeau »), on pourrait deviner une flaque de poison qui progresse d’après la taille des vers de la strophe 1 (après l’introduction du v.1, le raccourcissement des v.2 et 3, puis le rallongement du vers 6 donnent cette impression…) LA STROPHE 2 COMMENCE PAR UNE PAUSE QUI ROMPT LE PROCESSUS DE L’EMPOISONNEMENT MORTEL DE L’AMOUR Les enfants de l’école viennent avec fracas Vêtus de hoquetons et jouant de l’harmonica La strophe 2 apporte une rupture totale de thème, surprenante : le thème de la vie envahit le poème sous la forme des ENFANTS. Ils transforment la musicalité du poème par leur apparition soudaine : en effet, si l’on fait le bilan sonore du poème, l’assonance en [an] est particulièrement fréquente dans le poème et crée une musique en demi-teinte propre à la voyelle nasale ( PAISSANT, LENTEMENT, S’EMPOISONNENT, LENTES, MEUGLANT ) ; un autre son est très représenté : le son [eu], assourdi lui aussi, qui évoque un monde peu net ; le 3e son est le [o] : ces trois sons créent la musique de fond, qui se répète inlassablement, une musique triste, mélancolique, sur laquelle éclatent quelques sons [i] (« joli, 2X fleuri(t) , filles 2X...») ou [a] qui créent une dissonance inquiétante (cf plus haut). Au contraire, le FRACAS de la jeunesse vient bousculer ce monde ralenti en train de s’éteindre ; le terme est faussement péjoratif, et suppose un regard tendre envers l’enfance. Le mot HARMONICA introduit une musique réelle, assez puissante, puisqu’il s’agit d’un groupe d’enfants sortant en même temps de l’ECOLE ; leur irruption est autant gaie que cacophonique : d’abord l’assonance en [A], son éclatant placé à la rime, puis l’incohérence volontaire des autres voyelles qui se succèdent : è-u-eu-o-eu-on-é-ou-an-a-o-i-a (on remarque que les sons les plus éclatants se retrouvent à nouveau en fin de vers, les A relevés par le i aigu et sonore). Les HOQUETONS portés par les enfants sont des vestes, des casaques, en fait des manteaux sans ceinture, que l’on laisse souvent ouverts. Il y a une antithèse sémantique entre la liberté des enfants et l’emprise du poison qui tient le poète. Les 14 syllabes du vers 10 débordent sur le poème, envahi cette fois par la vie. Ils cueillent les colchiques qui sont comme des mères MAIS LE THEME DE LA FEMME FATALE REVIENT EN BOUCLE, avec UNE GRADATION DANS LA VIOLENCE ET LA VISION GENERALE DE LA FEMME Filles de leurs filles et sont couleur de tes paupières Qui battent comme les fleurs battent au vent dément Et justement, les enfants ne subissent aucun dommage : ils arrachent ce qui est mortifère- le HOQUETON est aussi un vêtement militaire (ILS CUEILLENT LES COLCHIQUES) et brisent ainsi le maléfice. Le verbe CUEILLE a également des connotations tournées vers la vie : il est souvent employé dans les poèmes pour inciter à l’épicurisme, càd à profiter de la vie, selon la formule du poète latin Horace (disciple du philosophe grec Epicure) : « Cueille le jour ». Mais le maléfice n’est pas éradiqué pour tous : les 2 propositions relatives QUI…ET (QUI) SONT… données en expansion immédiate du mot COLCHIQUE , suivies d’une 3e prop relative liées aux yeux d’Annie (TES PAUPIERES QUI) complexifient et alourdissent la phrase en la rallongeant. Nous retrouvons la lenteur mortelle et mortifère (qui donne la mort). On remarque que le poison s’étale sur toute la zone du regard à présent : œil, cerne, paupières, comme une marée noire fantastique. Mais cette mort ne s’adresse qu’aux adultes, les enfants qui ne connaissent pas encore l’amour, y échappent encore. Le thème des générations est abordé par le champ lexical de la famille : MERES /FILLES DE LEURS FILLES (le CDN imite la chaîne des générations). Paradoxalement, les générations sont inversées : on a l’habitude de dire « telle mère, telle fille », ou « filles de leur mère », mais ici ce sont des MERES FILLES DE LEURS FILLES. On remonte donc les généalogies à l’inverse, et si l’on suit cette ligne, on arrive à la Mère de tous les vivantes, la fameuse Eve si décriée parce qu’elle a croqué la pomme, condamnant le monde à la souffrance, comme d’ailleurs Pandore dans la mythologie grecque, qui a ouvert la « boîte de Pandore » contenant tous les maux de l’humanité, qui se sont alors échappés. La vision négative traditionnelle de la femme est le référent sous- entendu du poème, ouvert à toute intertextualité : toutes les connotations sont permises : la femme-sorcière, vampire empoisonneuse....tentatrice (d’Eve avec sa pomme à la belle-mère de Blanche-Neige ou plus précisément à la Lorelei dans Alcools..., ou encore historiquement la Brinvilliers, l’empoisonneuse célèbre du XVII e s : le thème de la femme fatale est largement répandu dans les esprits et traité en littérature. D’ailleurs le thème des yeux (par lesquels arrive le « mauvais oeil », l’envoûtement), est significatif. De plus, le colchique doit son nom à sa provenance mythique, la Colchide, pays de Médée, la magicienne empoisonneuse et infanticide… Le féminin est l’ambigu, à la fois beauté, séduction et danger. L’intrication femme-fleur et l’inversion des comparés/comparants se retrouve, bouleversant la stabilité du sens, comme l’inversion généalogique : d’abord les COLCHIQUES (comparé) SONT COMME DES MERES (femmes - comparant) et sont COULEUR DE TES PAUPIERES (comme Annie - comparant) , puis LES PAUPIERES (métonymie du blason pour Annie – comparé) BATTENT COMME LES FLEURS (comparant). Il y a fusion entre les deux thèmes , malmenés tous deux par le VENT DEMENT : la passion amoureuse est une folie, elle finit par détruire, ce que traduit la répétition du verbe BATTENT imitant le vent destructeur. Le fantastique réapparaît après la parenthèse de la vie réelle, simple et gaie (enfants) : la météorologie redevient fantastique, le vent de la mort se lève, les vers perdent leur régularité : 13 syllabes pour les vers 10 et 12 (chiffre impair qui déstabilise la musique + chiffre maléfique), 14 pour le vers 11 comportant une assonance en [i] inquiétante, alors que le vers 12 imite le battement avec l’allitération en [T] (3x avec la liaison), sans compter les violence des [k]. Après le bruit cacophonique de la vie, la mort semble prendre de l’ampleur, comme si elle voulait gagner la partie malgré tout. LA STROPHE FINALE RENOUE AVEC LA REALITE NATURELLE ET APPORTE UN APAISEMENT, COMME SI LA DOULEUR DU POETE S’ELOIGNAIT AVEC LE DESIR DE TOURNER CETTE PAGE AMOUREUSE. CEPENDANT LE TRAUMATISME VECU RESTE INSCRIT DEFINITIVEMENT DANS LA STRUCTURE DU POEME, UN SONNET DESTRUCTURE Le gardien du troupeau chante tout doucement Tandis que lentes et meuglant les vaches abandonnent Pour toujours ce grand pré mal fleuri par l’automne Après ce paroxysme sonore, le poème se radoucit, s’apaise : l’adv DOUCEMENT mis à la rime et amplifié par l’intensif TOUT le met en évidence. On revient à une vision d’ensemble (paysage) comme au premier vers, l’intérieur du poème consistant en grande partie (sauf pour les enfants ) en gros plans des fleurs ou des yeux, voire en très gros plans (cernes). On retrouve LE PRE FLEURI, le vocabulaire se répète, et le poème forme une boucle et la fin du premier vers est la même que celle du vers final : AUTOMNE. Cependant sa structure circulaire comporte des variantes : le côté négatif l’emporte : VENENEUX MAIS JOLI devient MAL FLEURI, un oxymore enlevant toute beauté. Nous sommes toujours dans la saison de la mort, et le cercle vicieux, infernal n’a pas disparu, ni la lenteur pesante de sa progression (LENTES ET MEUGLANT, la conjonction de coordination ET servant encore de ralentisseur). D’ailleurs, conformément à ce monde de la mort, la musique semble s’éteindre à la fin du poème : le son [OU] très doux, répété 3X, revient en sourdine ( CHANTE TOUT DOUCEMENT ) et se retrouve au dernier vers (POUR TOUJOURS qui traduit l’éternité de la mort). Le poison continue de se distiller lentement (phrase complexe donc longue avec la subordonnée temporelle TANDIS QUE…) . A ce sujet on peut aussi noter les nombreux enjambements du poème, qui permettent une diffusion lente et douce du poison : 3-4 vers par strophe. L’absence de ponctuation procure un effet « liant », et l’absence de point final laisse au poison encore le temps de se distiller jusqu’à la mort définitive... (cf le titre destructeur en lui-même : Alcools...) Cependant, après le réveil cuisant de la souffrance (strophe précédente), le poète semble se résigner, s’accommoder de son sort. C’est peut-être lui le gardien du troupeau (de ses poèmes), - la métaphore du chant est fréquente pour qualifier la poésie – et les VACHES sont les poèmes, qui, dans un dernier sursaut de souffrance (MEUGLANT) quittent ce sujet (PRE) douloureux pour toujours : ABANDONNENT POUR TOUJOURS CE GRAND PRE MAL FLEURI PAR L’AUTOMNE… Le poète, après avoir chanté son mal d’amour, passe à autre chose…le vers de l’abandon (l’avant-dernier) s’étirant sur 14 syllabes, suggérant la lente cicatrisation de la peine d’amour… On sait qu’un de ses projets récurrents est de moderniser la poésie. Or le poème compte 15 vers, mais le v 2 est un alexandrin coupé en deux : originellement, c’était donc un sonnet , poème de 14 vers comportant 2 quatrains suivis de 2 tercets. La disposition d’ensemble a été modifiée, et l’on ne reconnaît plus que le 2e tercet. Cette nouvelle disposition peut s’expliquer par le fait que le poète ne voulait pas couper en deux une phrase (le 1er quatrain devrait s’arrêter à « lilas », en plein milieu de la phrase ; il en est de même pour le second. Mais le premier tercet aurait pu se mettre à part (il consiste en une seule phrase). Or le fait d’avoir choisi une telle disposition, avec 3 strophes de plus en plus courtes, traduit mieux l’effet mortel du poison, qui ralentit progressivement la vie…mais pas la poésie, qui par sa déstructuration même, innove. CE POEME SEMBLE PARTICULIEREMENT REPRESENTATIF D’ALCOOLS : COMME LE TITRE DU RECUEIL, IL MET EN SCENE LE LONG ET VOLONTAIRE EMPOISONNEMENT DU POETE, QUI NE PEUT S’EMPECHER DE BOIRE LE POISON MORTEL QUE DISTILLENT LES YEUX D’UNE FEMME. POEME DU MALAISE, POEME DE L’AMBIGUITE AU CHARME ENVOUTANT GRACE A LA REPETITION D’UN LEXIQUE REDUIT OU DE SONORITES RECURRENTES, OU ENCORE DE LA CIRCULARITE DU POEME. L’ECRITURE POETIQUE D’APOLLINAIRE HESITE ENTRE LA TRADITION ET LA MODERNITE, REPRENANT DES THEMES ET STRUCTURES TRADITIONNELLES POUR MIEUX LES DESTRUCTURER. ET L’ON PEUT SE DEMANDER SI LA LECTURE DU POEME ENTIER N’EST PAS AUSSI SOUS LE SIGNE DE L’AMBIGUITE COMME LA FEMME FATALE PRESENTEE : LA SYMBOLIQUE DU TEXTE CONCERNE-T-ELLE L’AMOUR, OU LA POESIE, MUSE FATALE QUI FASCINE LE POETE JUSQU’A L’EPUISER ? Le témoignage d'Apollinaire « « Aubade » n’est pas un poème à part mais un intermède intercalé dans « La Chanson du mal aimé » qui datant de 1903 commémore mon premier amour à vingt ans, une Anglaise rencontrée en Allemagne, ça dura un an, nous dûmes retourner chacun chez nous, puis ne nous écrivîmes plus. Et bien des expressions de ce poème sont trop sévères et injurieuses pour une fille qui ne comprenait rien à moi et qui m’aima puis fut déconcertée d’aimer un poète, être fantasque ; je l’aimais charnellement mais nos esprits étaient loin l’un de l’autre. Elle était fine et gaie cependant. J’en fus jaloux sans raison et par l’absence vivement ressentie, ma poésie qui peint bien cependant mon état d’âme, poète inconnu au milieu d’autres poètes inconnus, elle loin et ne pouvant venir à Paris. Je fus la voir deux fois à Londres, mais le mariage était impossible et tout s’arrangea par son départ à l’Amérique, mais j’en souffris beaucoup, témoin ce poème où je me croyais mal-aimé, tandis que c’était moi qui
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