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Lettres et billets de mythologie, Slides de Richesse

turels, plusieurs se distinguent comme de véritables figures mythologiques. D'abord deux personnages qui portent, avec un même préfixe, les noms du.

Typologie: Slides

2021/2022

Téléchargé le 03/08/2022

Christophe
Christophe 🇫🇷

4.2

(100)

488 documents

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Télécharge Lettres et billets de mythologie et plus Slides au format PDF de Richesse sur Docsity uniquement! LETTRES ET BILLETS DE MYTHOLOGIE de Bernard Fricker après la chasse, il exige que celui qu'il a favorisé nourrisse largement les pauvres du village, faute de quoi la prochaine randonnée sera infructueuse Donbettyr vif au fond de la mer, des eaux, don, qu'il patronne et qu'il porte dans son nom, comme, sur nos cartes encore, tant de fleuves tributaires de la mer Noire : Danube, Don, Dniepr, Dniestr. Mais Le second élément du nom vient de la vieille couche chrétienne : il est "le Petros, le Pierre des Eaux”. Il tient une chaîne, dit-on, avec laquelle il tire à lui ceux qui se baignent tard, mais, pour les Nartes, il n'est que bénéfique : des événements que raconteront nos premiers récits font qu'il est le beau-père et le grand-père des plus illustres. Car il a des filles, de ravissantes filles, que l'on a comparées aux Ruskali des Slaves, et qui dérivent sans doute de figures comme cette nymphe fille du fleuve Borysthène, avec laquelle, dans une légende que rapporte Hérodote (IV, 5), Zeus avait engendré le premier ancêtre des Seythes. Au siècle dernier, le samedi qui suit Pâques, les jeunes filles célébraient sur le bord des rivières le culte gracieux des filles de Donbettyr, assurant ainsi aux maisons et aux écuries les vertus que recèle l'essence puissante des eaux. Huyændon Ældar, le chef, "la tête” des poissons, kæfty sær, est d'un type original, que V. I Abaev vient seulement d'éclairer (Mélanges D. Detchev, Sofia, 1968, p. 183-189). “Esprit”, certes, et grand magicien, il n'en a pas moins une sorte de petit empire temporel et se comporte comme un ældar, un chef terrestre. Son nom veut dire : ‘le Seigneur du Détroit”, et Abaev donne des raisons de penser qu'il s'agit du “détroit poissonneux”, du Bosphore cimmérien : en scythique ‘“Panticapée”, la grande ville de ce détroit, l'actuelle Kertch, ne contient-elle pas “chemin” et “poisson” ? Hujædon Ældar est donc peut-être la mythisation d'anciens souverains de ces lieux. Tels sont les "Esprits et Génies” qui tiennent la vedette. I faut y joindre le monde des morts, fermé sur lui-même, dont la représentation est fort développée, avec son roi Barastyr, à la fois juge, gardien de prison, et mat- tre de maison hospitalier pour les innocents et les opprimés ; avec son por- tier Aminon aussi, esclave de la consigne, que nous n'observons guère ici que dans deux circonstances qui lui posent des problèmes de conscience : le voya- ge de quelques vivants audacieux au pays dont il ne doit pas leur ouvrir la porte, et la rentrée des morts permissionnaires, qui doit se faire avant l'extrême moment du coucher du soleil et qui se fait trop souvent après. Mais Dieu est bon et un miracle arrange l'affaire : il n'y a pas d'exemple qu'un retardataire ait été contraint de passer la nuit chez les vivants. Ces premiers rôles ne font pas oublier la multitude des génies mineurs, qui s'agitent familièrement autour de la colline des Nartes — comme autour des villages ossètes — et sur les longues routes de leurs expéditions. De bons observateurs indigènes et un admirable savant russe, Vs. Miller, ont recueilli et décrit ces représentations, lorsqu'elles étaient encore vives et fraîches, en sorte que la fantasmagorie populaire des Ossètes est l'une des mieux connues du Caucase. 135 Une autre catégorie de personnages surnaturels ne dépaysera pas l'ama- teur de contes européens, ni surtout le lecteur de l'Edda : les Géants, heu- reusement disparus de notre monde, étaient encore une calamité publique au temps des Nartes. Ils occuperont beaucoup de pages de ce livre. Aussi stupides que forts, maladroits autant que présomptueux, ils succomberont presque toujours, mais après avoir donné aux Nartes le frisson classique des Poucets. Exceptionnellement, Soslan entendra un utile sermon de la bouche d'un géant philosophe." Longue citation : sa richesse l'exigeait, couper l'eût altérée. Dumézil nous y dessine comme la “coupe géologique" d'un terrain extraordinai- rement fertile, celui de l'imaginaire ossète : ses strates. Les dépôts que les eaux des rêves successifs d'un vieux peuple ont laissés dans sa mémoire en se retirant tour à tour. Rêves successifs — et contradictoires ? Contradictoires, à mon estime, non. L'alliage est réussi. Si un vieil auteur, Duclos, parle quelque part d'un "monstrueux alliage de christianisme et d'idolâtrie”, ce n'est pas le cas en Ossétie. S'i y à amalgame, il faut exclure un mélange d'éléments hétérogènes dissonants. Je suis plutôt tenté de parler d'harmonie. Le tout me semble admirablement fondu, et fondé, malgré, certes, quelques disparates", À lire les Légendes sur les Nartes, traduites, réunies, annotées par Georges Dumézil, on resté sous le charme de maintes d'entre elles. Charme opéré par l'alliance (j'y reviens) du plus ancien paganisme et de deux monothéismes, l'islamique .et le chrétien, avec trace d'un christia- nisme spécifique, le byzantin. mais comme "perdu comme Eglise et com- me doctrine", ce qui, peut-être, lui ferait jouer le rôle d'un phantasme, d'une hantise, toujours présents et finalement positifs si l'on veut bien admettre que phantasme et hantise sont aussi à la source du merveilleux. "Dieu, Hutsan, est Allah ou le Dieu chrétien, Dieu unique, mais qui porte aussi le titre significatif de Dieu-des-dieux', Hustanty Hutsan”. Le monothéisme — selon une tendance innée?-—se scinde; une pluralité s'y glisse; les antiques croyances refont surface (ont-elles jamais disparu ?), malgré, désormais, le patronage, l'omniprésence d'un Dieu unique, l'islamique ou le chrétien. Seraïit-ce, cette confluence, une des sources, parmi d'autres, du merveilleux ? Source d'un imaginaire en mouvement, qui va, qui vient, qui oscille ? Une question néanmoins se pose: cet imaginaire-là est-il plus propre à la légende qu'au mythe proprement dit ? Disons aussi que si la foi en un Dieu unique s'affirme à un moment donné de l'histoire, les divinités anciennes ne sont pas pour autant définitivement condamnées. L'Iran en est un exemple, où, après la “réforme” zoroastrienne, plusieurs anciens dieux ont continué à être invogués. Un fait qui me paraît aussi significatif qu'admirable est que le nom géorgien de la "croix", djvari, soit devenu, sous la forme dzver, "l'appel- Iatif non seulement d'innombrables lieux sacrés de l'Ossétie, mais très 136 généralement de tous êtres surnaturels". Cette "évolution" ne révèle-t- elle pas une des tendances profondes de l'esprit, ancrée en Jui dès qu'il se fit une ou des représentations du monde, à savoir que le monde, d'abord, est magique ? que la "croix" elle-même ne saurait échapper à cette emprise ? Strates, toujours, celles d'une mémoire qui garde en elle non seule- ment vivant le passé, mais opère comme la fusion de ce qu'il peut avoir en lui d'apparemment contradictoire. Figures mythologiques qui revien- nent en scène après leur baptême Uacilla, Uastyrdji, Saint Elie et Saint Georges byzantins, le premier redoutable lanceur de foudre, animateur des orages et protecteur de l'agriculture, le second patron du sexe masculin, des voyageurs; Safa, Esprit de la chaîne du foyer domestique ; le forgeron Kurdalægon qui a son atelier dans le ciel et chauffe à blanc des héros dont le corps est métallique ; Tuëyr qui doit son nom à un Saint Théodore et à pouvoir sur les loups ; Æfasti qui gouverne les animaux sauvages, cerfs, sangliers, chèvres de montagne. Sans doute a-t-on pu parler des saints comme successeurs des dieux, mais n'apparaît-il pas qu'ici les figures mythologiques recensées par Dumézil ont conservé, malgré leurs noms de baptême, leur antique aura, un caractère sacré qui tient plus du paganisme que du christianisme, ou, si l'on préfère, du polythéisme que du monothéisme ? Donbettyr, lui, vit au fond de la mer, des eaux, Don, qu'il patronne, mais le second élément de son nom vient de la couche chrétienne : il est “le Petros, le Pierre des Eaux”. Pierre, le pêcheur, devenu pêcheur d'hommes, Pierre lié à l'eau, aux eaux qui jouent un rôle, un premier rôle dans l'économie du Nouveau Testament, comme, il est banal de le rappeler, dans (toutes ?) les reli- gions du monde et combien de mythes, folklores, contest, Pierre auquel Jésus, en Matthieu XVII, 24, 27, enjoint d'aller à la mer, d'y jeter l'hameçon, "Et le premier poisson qui montera, prends-le. Et lui ayant ouvert la bouche tu trouveras un statère". Certes c'était, statère miraculeux, pour payer le didrachme, le droit d'entrée à Caphar- naüm, et ne pas scandaliser ceux qui le percevaient. Mais Pierre qui sans broncher filera jusqu'à la mer pour y pécher le poisson au statère, n'apparaît-il pas, dans son zèle, comme une sorte de génie des eaux, leur “patron”, sa délégation divine ? Son assimilation à Donbettyr (ou vice- versa ?) n'aurait alors rien de fortuit. A cette différence près que par rapport au "dieu" ossète des eaux, Pierre, autant que nous le sachions, n'a jamais engendré de filles ravissantes… 1 Dans un de ses tout premiers livres : Ourancs - Varuna, Paris, 1934, G. Dumézil écrivait, p.94 : "sans doute parce que les eaux sont les grands agents rituels par excellence (..)". 187 Du jeu de Dieu ou des dieux, et de la recherche comme jeux de l'homme Gagner, perdre encore... Gagner toujours. Risquer. Donner. Prendre. Vivre. Un bel aventurier risque le tout pour le tout. Un coup de dé. Cet aventurier-là c'est Dieu que voilà qui enseigne maintenant les beaux artifices qui lui ont permis de créer le monde, cette illusion. Et Dieu et les dieux sont heureux quand l'homme, à son tour, imagine, quand le mécanisme se complique, qu'il s'augmente de nou- veaux engrenages, plus parfaits mais jamais complètement, car Dieu ou les dieux n'auraient alors plus rien à faire, et ils ont terriblement besoin de s'activer, et rien sans doute ne leur est plus agréable que la multiplication des hommes et l'apparition conséquente de perpétuelles nouveautés. L'avaient peut-être compris les Indiens de la Côte Nord-Ouest de l'Amérique pour qui le corbeau était à la fois le dieu et un aventurier facétieux, se divertissant par des inventions et des strafagèmes, édifiant une civilisation toujours plus compliquée. C'est la création en tant que récréation de l'esprit, divertissement, jeu. C'est la création pour faire plaisir, rendre service, la création pour se détendre et sourire... C'est une création qui, vraiment, ne peut “engager” celui qui, pour son plaisir, s'y livre ; elle l'engage, malgré tout, mais relativement. L'homme, quand il s'exprime et quelle que soit la forme donnée à l'expression, ne peut traduire complètement ce qui l'invite à s'exprimer, ni ce qu'il entend précisément exprimer. Quand il parvient tout de même à s'exprimer librement, réellement, il dissimule alors par l'artifice de la création sa personnalité véritable, profonde, secrète. Îl s'esquive. par un pas en avant. Se traduire intégralement équivaudrait, pour lui, à se trahir, se profaner. Révéler c'est, d'une certaine manière, s'offrir, se détruire. Il existe comme une pudeur de la création, de l'acte créateur. Celui-ci doit échapper aux regards indiserets. Son souvenir se dissimule sous l'enveloppe du mythe. C'est pourquoi aucune des annales de l'humanité ne nous livre le véritable secret du commencement. L'œuvre achevée, l'œuvre manifeste et manifestée doit porter un voile. 141 Las, nous n'avons de cesse de soulever le voile! Dans ce jeu nous trouvons notre repos. Divertissement au sens pascalien ? Peut-être. C'est aussi notre liberté. La liberté de l'aventurier facétieux que chaque chercheur porte en lui. Grâce à cette liberté, à ce jeu, qui comme tout jeu a ses règles, la recherche s'ennoblit. C'est pourquoi il nous faut "déca- cheter l'enveloppe" : celle du mythe. Pour y trouver réponse à Ia lettre que notre inconscient a adressée à Dieu ou aux dieux ; réponse sous la forme parfois d'une page blanche, ou de signes difficiles à déchiffrer. Soudain, ce peut être, en haut, au centre ou en bas de la page, une étymologie oubliée, stupéfiante de révélation, ou une image, non moins révélatrice. Nous voici heureux. Mais d'autres enveloppes suivent, innombrables, postées des cinq continents de la Terre où ont régné des centaines de dieux... À moins qu'elles ne soient tombées du Ciel, comme autrefois, en Scythie, la charrue avec le joug, la hache, la coupe tombées ensemble. Le jeu n'a point de fin, du moins ne cesse-t-il avec la longue succes- sion des générations de chercheurs... Les lettres, l'enveloppe décachetée, souvent signifient peu, elles peuvent être gratuites. À nous d'échafauder mille suppositions, elles-mêmes gratuites, récréations de notre esprit. La flèche, tirée en direction de la cible que nous voulons atteindre, parfois fait mouche... Bon tour joué aux dieux !.… Mais sachons rester prudents, et prudes : sous le voile enfin soulevé, il serait téméraire de vouloir abuser de la déesse enfin nue : ce serait, qui sait, notre castration, ou notre dangereuse transformation en cerf... Etude et recherche comme jeu du frikster, du corbeau aventurier et facétieux dont chacun de nous emprunte le plumage ? 142
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