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Passage d'un conte des mille et une nuit, Lectures de Français

C’est l’histoire d’un marchand qui c’est fait trair par son ami

Typologie: Lectures

2023/2024

Téléchargé le 21/02/2024

armelle-samuelle-safoux
armelle-samuelle-safoux 🇫🇷

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Télécharge Passage d'un conte des mille et une nuit et plus Lectures au format PDF de Français sur Docsity uniquement! 1 HISTOIRE D'ALI COGIA MARCHAND DE BAGDAD Sous le règne du calife Haroun-al-Raschid, dit la sultane, il y avait à Bagdad un marchand nommé Ali Cogia, qui n'était ni très riche ni non plus très pauvre. Il demeurait dans sa maison, sans femme ni enfants. Il vivait, libre de ses actions, content de ce que son commerce lui produisait. Trois jours de suite, il fit un rêve dans lequel un vieillard lui apparut avec un regard sévère, qui le réprimandait parce qu’il ne s'était pas encore rendu au pèlerinage de la Mecque. Ce songe troubla Ali Cogia et le mit dans un grand embarras. Comme tout musulman, il savait qu’il avait l’obligation de faire ce pèlerinage ; mais, comme il était seul pour s’occuper d'une maison, de ses meubles et d'une boutique, il avait toujours cru que c'étaient des raisons suffisantes pour s'en dispenser, essayant en échange de faire le bien autour de lui. Mais, depuis le songe, sa conscience le pressait si vivement et la crainte qu'il ne lui arrivât malheur le décida à ne pas retarder davantage ce pèlerinage. Pour pouvoir le faire cette année même, Ali Cogia commença par vendre ses meubles ; il vendit ensuite sa boutique et la plus grande partie des marchandises dont elle était garnie, en gardant celles qu’il emmènerait à la Mecque pour les vendre, et, pour ce qui est de la maison, il trouva un locataire à qui il fit un bail. Les choses ainsi réalisées, il se trouva prêt à partir dès que la caravane de Bagdad pour la Mecque se mettrait en route. La seule chose qui lui restait à faire était de mettre en sûreté une somme de mille pièces d'or qui l'aurait embarrassé dans le pèlerinage. Ali Cogia choisit un vase ; il y mit les mille pièces d'or, et il acheva de le remplir d'olives. Après avoir bien bouché le vase, il le porta chez un marchand de ses amis. Il lui dit : « Mon frère, tu sais que, dans peu de jours, je pars comme pèlerin à la Mecque avec la caravane ; je te demande de vouloir bien te charger d'un vase d'olives que voici et de me le conserver jusqu'à mon retour. » Le marchand lui dit obligeamment : « Tiens, voilà la clef de mon magasin ; portes-y toi-même ton vase, et mets-le où il te plaira ; je te promets que tu l'y retrouveras. » 2 Le jour du départ arrivé, Ali Cogia, se plaça dans la caravane avec un chameau chargé des marchandises qu’il emportait et qui lui servirait aussi de monture durant le voyage, et il arriva sans encombre à la Mecque. Il y visita, avec tous les autres pèlerins, le temple si célèbre et si fréquenté chaque année par toutes les musulmans qui y arrivent de tous les endroits de la terre où ils vivent. Quand il eut terminé des devoirs de pèlerin, il exposa les marchandises qu'il avait apportées, pour les vendre ou pour les échanger. Deux marchands qui passaient et qui virent les marchandises d'Ali Cogia les trouvèrent si belles qu'ils s'arrêtèrent pour les contempler, bien qu’ils n'en aient pas besoin. Quand ils eurent satisfait leur curiosité, l'un dit à l'autre en se retirant : « Si ce marchand savait le gain qu'il ferait au Caire sur ses marchandises, il les y porterait plutôt que de les vendre ici, où elles sont trop bon marché. » Ali Cogia entendit ces paroles ; et, comme il avait entendu parler mille fois des beautés de l'Égypte, il décida immédiatement de profiter de l'occasion pour faire le voyage. Ainsi, après avoir rempaqueté et remballé ses marchandises, au lieu de retourner à Bagdad, il prit le chemin de l'Égypte en se joignant à la caravane du Caire. Quand il fut arrivé au Caire, il ne regretta pas d’y être venu car en très peu de jours il avait vendu à très bon prix toutes ses marchandises. Il en acheta d'autres dans l’idée d’aller à Damas et, en attendant le départ d'une caravane qui devait partir dans six semaines, il visita tous les beaux endroits du Caire et il alla aussi admirer les pyramides ; il remonta le Nil, et il vit les villes les plus célèbres situées sur l'une et l'autre rive. Au cours du voyage pour Damas, la caravane passa par Jérusalem. Notre marchand en profita pour visiter le temple. Ali Cogia trouva la ville de Damas délicieuse par l'abondance de l’eau qui y coulait, par ses prairies et par ses jardins enchantés et il y fit un long séjour. Comme néanmoins il n'oubliait pas qu'il était de Bagdad, il en partit enfin. Il arriva à Alep, où il fit encore quelque arrêt ; et de là, après avoir passé l'Euphrate, il prit le chemin de Mossoul, pensant raccourcir son retour en descendant le Tigre. Mais, quand Ali Cogia fut arrivé à Mossoul, des marchands de Perse avec lesquels il était venu d'Alep, et avec qui il avait sympathisé, le persuadèrent de rester avec eux jusqu'à Schiraz, d'où il lui serait facile de retourner à Bagdad. Ils le menèrent par les villes de Sultanie, de Reï, de Coam, de Cachan, d'Ispahan, et de là à Schiraz, où il décida les accompagner encore aux Indes et de revenir à Schiraz avec eux. De la sorte, en comptant le séjour qu'il avait fait dans chaque ville, il y avait bientôt sept ans qu'Ali Cogia était parti de Bagdad, quand enfin il décida d’y revenir. 5 Ali Cogia alla au magasin du marchand, il en apporta son vase ; et, après lui avoir rendu la clef, l'avoir bien remercié, il retourna à son logement. Il découvrit le vase; et, en y mettant la main à la hauteur où les mille pièces d'or qu'il y avait cachées devaient être, il fut extrêmement surpris de ne pas les trouver. Il crut se tromper ; et, pour en être sûr, il versa tout le vase d'olives sans trouver une seule pièce d'or. Il demeura immobile d'étonnement, et, en élevant les mains et les yeux au ciel : « Est-il possible, s'écria-t-il, qu'un homme que je considérais comme un bon ami m'ait ainsi volé ! » Ali Cogia, alarmé d'avoir fait une perte si considérable, revint chez le marchand. « Mon ami, lui dit-il, ne sois pas surpris de ce que je revienne : j'avoue que j'ai reconnu le vase d'olives que j'ai repris dans ton magasin ; c’est bien celui que j'y avais mis ; mais, avec les olives, j'y avais mis mille pièces d'or que je n'y trouve pas. Peut-être en as-tu eu besoin, et que tu t’en es servi pour ton commerce. Si cela est, elles sont à ton service. Je te prie seulement de me tirer de peine et de m'en donner une reconnaissance, après quoi tu me les rendras dès que tu pourras. » Le marchand, qui s'était attendu à ce qu'Ali Cogia vienne lui dire cela, avait réfléchi aussi ce qu'il devait lui répondre. « Ali Cogia, mon ami, dit-il, quand tu as apporté ton vase d'olives, y ai-je touché ? Ne t’ai-je pas donné la clef de mon magasin ? Ne l'y as-tu pas porté toi-même, et ne l’as-tu pas retrouvé à la même place où tu l’avais mis, dans le même état et couvert de même ? Si tu y as mis de l'or, tu dois l'y avoir trouvé. Tu m’as dit qu'il y avait des olives, je l'ai cru. Voilà tout ce que j'en sais. Tu me croiras si tu veux, mais je n'y ai pas touché. » Ali Cogia utilisa tous les moyens amicaux pour que le marchand se trouve une solution à ce problème. « Je n’aime que la paix, dit-il et je serais fâché d'en venir à des solutions qui ne te feraient pas honneur, et dont je me servirais avec un regret extrême. Encore une fois, je serais au désespoir si ton entêtement m'obligeait de prendre les voies de la justice. — Ali Cogia, reprit le marchand, tu conviens que tu as mis chez moi un vase d'olives en dépôt ; tu l’as repris, tu l’as emporté, et tu viens me demander mille pièces d'or ! M’as-tu dit qu'elles étaient dans le vase ? J'ignore même s'il y avait des olives : tu ne me les as pas montrées. Je m'étonne que tu ne me demandes pas des perles ou des diamants plutôt que de l'or. Crois-moi, retire-toi, et ne fais pas assembler les gens devant ma boutique. » Quelques personnes étaient déjà arrêtées ; et ces dernières paroles du marchand, firent que non seulement il s'y en arrêta encore plus, mais que les marchands voisins sortirent de leurs boutiques et vinrent écouter la dispute et tâcher de les mettre d'accord. Ali Cogia leur expliqua le problème, certains demandèrent au marchand ce qu'il avait à répondre. Le marchand avoua qu'il avait gardé le vase d'Ali Cogia dans son magasin mais il nia l’avoir touché, et il fit serment qu'il ne savait qu'il y avait des olives que parce qu'Ali Cogia le lui avait dit, et qu'il les prenait tous à témoin de l'affront et de l'insulte qu'il venait lui faire jusque chez lui. « Tu t’attires toi-même l'affront, dit alors Ali Cogia en prenant le marchand par le bras ; mais, puisque tu persistes, je te cite à la loi de Dieu : voyons si tu auras le front de dire la même chose devant le cadi. » A cette sommation, à laquelle tout bon musulman doit obéir, le marchand n'eut pas la hardiesse de faire résistance. « Allons, dit-il, c'est ce que je demande : nous verrons qui a tort, toi ou moi. » 6 Ali Cogia amena le marchand devant le tribunal du cadi, où il l'accusa de lui avoir volé un dépôt de mille pièces d'or. Le cadi lui demanda s'il avait des témoins. Il répondit que c'était une précaution qu'il n'avait pas prise, parce qu'il avait cru que celui à qui il confiait son dépôt était son ami. Le marchand ne dit autre chose pour sa défense que ce qu'il avait déjà dit à Ali Cogia, et en présence de ses voisins ; et il acheva en disant qu'il était prêt à affirmer par serment non seulement qu'il était faux qu'il ait pris les mille pièces d'or mais même qu'il n'en avait aucune connaissance. Le cadi exigea de lui le serment ; après quoi il le renvoya innocenté. Ali Cogia, extrêmement vexé de perdre une somme aussi considérable, protesta contre le jugement, en déclarant au cadi qu'il irait se plaindre au calife Haroun-al-Raschid, qui lui ferait justice ; mais le cadi ne s'étonna point de la protestation, il la considéra comme l'effet de la rancune que ressentent ceux qui perdent leur procès. Pendant que le marchand retournait chez lui tout joyeux d'avoir mille pièces d'or à si bon marché, Ali Cogia écrivit une demande pour rencontrer le calife. Dès le lendemain, il se mit dans une rue et, au moment où le calife passa, il éleva le bras en tenant sa demande à la main. Un officier chargé de cette fonction, qui marchait devant le calife vint la prendre pour la donner au calife. Comme Ali Cogia savait que le calife Haroun-al-Raschid, en rentrant dans son palais, lirait lui-même les demandes qu'on lui présentait. Il suivit la marche, entra dans le palais, et attendit que l'officier ressorte de l'appartement du calife. En sortant, l'officier lui dit que le calife avait lu sa demande et, lui marqua l'heure de son rendez-vous pour le lendemain. 7 Le soir même, le calife, le grand-vizir Giafar et Mesrour, le chef des gardes, tous trois déguisés pour passer inaperçus, allèrent se promener dans la ville, comme ils avaient coutume de le faire de temps en temps. En passant par une rue, le calife entendit du bruit ; il pressa le pas, et il arriva à une porte qui fermait une cour et vit à travers une fente dix ou douze enfants qui jouaient au clair de lune. Le calife, curieux de savoir à quel jeu ces enfants jouaient, s'assit sur un banc de pierre qui se trouvait à côté de la porte ; et, comme il continuait à regarder par la fente, il entendit qu'un des enfants, le plus grand de tous, disait aux autres : « Jouons au cadi. Je suis le cadi : amenez-moi Ali Cogia et le marchand qui lui a volé mille pièces d'or. » A ces paroles de l'enfant, le calife se souvint de la demande qu’il avait lue quelques heures auparavant et cela le fit redoubler d’attention, pour voir quel serait le jugement. Comme l'affaire d'Ali Cogia et du marchand était nouvelle, elle faisait grand bruit dans la ville de Bagdad, les autres enfants acceptèrent la proposition avec joie, et décidèrent du personnage que chacun jouerait. Le plus grand prit le rôle du cadi. Quand se fut installé avec le semblant et la gravité d'un cadi, un autre enfant, comme officier du tribunal, lui Ali Cogia et le marchand contre qui Ali Cogia portait plainte. Alors le faux cadi prit la parole ; et, en interrogeant gravement le faux Ali Cogia : « Ali Cogia, dit-il, que demandez-vous au marchand que voilà ? » Le feint Ali Cogia, après une profonde révérence, informa le faux cadi des faits et, il conclut en le suppliant de juger pour empêcher qu'il perde une si grosse somme d’or. Le faux cadi, après avoir écouté le faux Ali Cogia, se tourna du côté du faux marchand, et lui demanda pourquoi il ne rendait pas à Ali Cogia la somme qu'il lui demandait. Le faux marchand donna les mêmes raisons que le véritable avait données au cadi de Bagdad ; et il demanda de même d’affirmer par serment qu'il disait était vérité. « N'allons pas si vite, reprit le faux cadi : avant d’en venir à votre serment, je serais content de voir le vase d'olives. Ali Cogia, ajouta-t-il en s'adressant au faux marchand, avez- vous apporté le vase ? » Comme il eut répondu qu'il ne l'avait pas apporté : « Allez le prendre, reprit-il, et apportez-le-moi. »
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