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PROFIL DE L'INDUSTRIE DU SPECTACLE DE CHANSON ..., Schémas de Histoire de la Musique

francophone pour l'année 2015 sur les revenus des gouvernements provinciaux et ... être difficile pour un artiste de vendre des billets dans un marché dans.

Typologie: Schémas

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Télécharge PROFIL DE L'INDUSTRIE DU SPECTACLE DE CHANSON ... et plus Schémas au format PDF de Histoire de la Musique sur Docsity uniquement! PROFIL DE L’INDUSTRIE DU SPECTACLE DE CHANSON FRANCOPHONE AU CANADA Rapport final / janvier 2016 Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . RÉALISATION DE L’ÉTUDE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. I RÉALISATION DE L’ÉTUDE Direction de l’étude Pierre-Olivier Saire associé Conseillers senior Pascale Daigle associée Danielle Desjardins conseillère et directrice d’enquête George Krump conseiller DAIGLE / SAIRE Conseil en management, stratégie et économie 6925, 9e avenue, Montréal (Québec) H1Y 2L1 www.daiglesaire.ca contact : 514 509 1143 Les auteurs tiennent à remercier toutes les personnes qui ont accepté de participer aux travaux de consultation au cours de cette démarche et en particulier les membres du comité de suivi de l’étude : – Natalie Bernardin, Directrice générale, Association des professionnels de la chanson et de la musique (APCM) – Colette Brouillé, Directrice générale et vice-présidente aux affaires publiques, Réseau indépendant des diffuseurs d’événements artistiques unis (RIDEAU) – Louise Chenail, Directrice générale, Musicaction – Jacinthe Comeau, Directrice générale, Réseau atlantique de diffusion des arts de la scène (RADARTS) – Solange Drouin, Vice-présidente aux affaires publiques et directrice générale, Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ) Cette étude a été commandée par Patrimoine canadien. Elle a pour but principal de donner une vue d’ensemble de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada. Les opinions, les résultats et les conclusions présentés sont ceux des auteurs. Ils ne reflètent pas nécessairement le point de vue de Patrimoine canadien. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . TABLE DES MATIÈRES DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. IV IMPORTANCE ÉCONOMIQUE DE L’INDUSTRIE DU SPECTACLE DE CHANSON FRANCOPHONE AU CANADA 77 4.1 PRINCIPAUX FLUX FINANCIERS 77 4.2 ESTIMATION DES IMPACTS ÉCONOMIQUES 80 4.2.1 Note méthodologique 80 4.2.2 Modélisation des dépenses 80 4.2.3 Impacts économiques 81 ÉLÉMENTS DE CONCLUSION 84 5.1 FAITS SAILLANTS 84 5.2 PERSPECTIVES D’AVENIR 90 BIBLIOGRAPHIE 92 ANNEXE 1 - LISTE DES PERSONNES CONSULTÉES 94 ACTEURS INSTITUTIONNELS 94 ACTEURS DE L’INDUSTRIE 94 ANNEXE 2– CANEVAS D’ENTREVUE 97 ANNEXE 3– DONNÉES DE L’OCCQ SUR LA PERFORMANCE DU SPECTACLE DE CHANSON AU QUÉBEC 99 Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . TABLE DES FIGURES DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. V TABLE DES FIGURES fig.1 Revenus des compagnies de musique selon leurs activités en 2012 7 fig.2 Principales composantes de la structure de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada 17 fig.3 Répartition des revenus des entreprises de la musique en 1996-1997 et en 2013-2014 26 fig.4 Évolution entre 2004 et 2014 du nombre de représentations et de spectacles de chanson francophone au Québec 34 fig.5 Nature du spectacle le plus susceptible d’être fréquenté par les personnes ayant assisté à au moins un spectacle gratuit ou payant dans le Quartier des spectacles en 2012 38 fig.6 Nombre de représentations, assistance totale et revenus des spectacles de chanson francophone, de chanson anglophone et d’humour au Québec en 2014 56 fig.7 Évolution entre 2004 et 2014 de l’assistance totale aux spectacles de chanson francophone, de chanson anglophone et de chanson dans une autre langue au Québec 57 fig.8 Évolution entre 2004 et 2014 du nombre de représentations des spectacles de chanson francophone, de chanson anglophone et de chanson dans une autre langue au Québec 57 fig.9 Évolution entre 2004 et 2014 des revenus totaux de billetterie des spectacles de chanson francophone, de chanson anglophone et de chanson dans une autre langue au Québec 58 fig.10 Évolution entre 2004 et 2014 des revenus totaux de billetterie des spectacles de chanson francophone en dollars de 2014 (indexation selon IPC du Québec) 58 fig.11 Évolution entre 2004 et 2014 de l’assistance totale aux spectacles de chanson francophone au Québec selon la taille des salles 59 fig.12 Évolution entre 2004 et 2014 du nombre de représentations des spectacles de chanson francophone au Québec selon la taille des salles 60 fig.13 Évolution entre 2004 et 2014 de revenus totaux de billetterie des spectacles de chanson francophone au Québec selon la taille des salles 60 fig.14 Évolution entre 2004 et 2014 de revenus totaux de billetterie des spectacles de chanson francophone en dollars de 2014 (indexation selon IPC du Québec) au Québec selon la taille des salles 61 fig.15 Évolution entre 2004 et 2014 du revenu moyen de billetterie par spectateur payant de chanson francophone, selon la taille de la salle et l’indice des prix à la consommation du Québec (base 100 en 2004) 61 fig.16 Répartition de l’enveloppe globale en musique vocale francophone du volet Commercialisation internationale de Musicaction, de 2008 à 2012 68 Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . TABLE DES FIGURES DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. VI fig.17 Répartition du total des enveloppes destinées aux activités de promotion, tournée et vitrines de musique vocale francophone en 2008-2009 et 2011-2012 69 fig.18 Répartition schématique des principaux flux financiers de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada 79 Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada. INTRODUCTION DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 1 INTRODUCTION 1.1 MANDAT D’ÉTUDE Au Canada, comme dans le reste du monde, l’industrie musicale est confrontée à de multiples défis. Le marché de l’enregistrement sonore a subi de façon accélérée de profondes transformations qui ont conduit ses acteurs à revoir leurs modes de production, de diffusion, de promotion et de distribution des uvres musicales. La vente de CD qui était à la base même de l’économie de l’industrie de la musique depuis les années 80 décroît de façon tendancielle depuis le tournant du millénaire sous l’effet de la montée en puissance de la distribution numérique, légale et illégale. Les nouveaux revenus provenant de ces formats numériques n’ont malheureusement pas compensé la diminution de ceux tirés des CD. Les ventes de musique sous format physique et numérique sont en décroissance au profit des services de musique en continu. Or, bien qu’en progression, les revenus tirés de ces services sont encore modestes. La consommation de musique canadienne tendrait à diminuer avec l’adoption des nouvelles plateformes numériques. Dans ce contexte, le spectacle se présente comme une avenue pour donner de la visibilité aux artistes. Le spectacle est souvent considéré comme faisant partie de la solution pouvant pallier la baisse globale des revenus. Quelques artistes ou groupes à la réputation internationale parviennent à générer des revenus significatifs grâce aux tournées. Mais la réalité du marché francophone, sa petitesse au Canada, font que les revenus tirés des spectacles et des tournées permettent difficilement à tous d’atteindre un seuil de rentabilité acceptable. On ne peut non plus parler ici d’une activité qui compense totalement le déclin économique du secteur de l’enregistrement sonore. Du point de vue de la promotion des artistes, avec la baisse des ventes d’albums observée au cours des dernières années, le spectacle joue un rôle de plus en plus central dans le développement des carrières des artistes de la chanson francophone. D’un point de vue stratégique, plusieurs entreprises dont les activités étaient centrées sur la production d’enregistrements sonores ont dû diversifier leurs activités, notamment en devenant actives en production de spectacles. C’est dans cette conjoncture déjà difficile que les producteurs de spectacles opèrent au Canada. La production de spectacles s’avère un exercice à haut risque où les niveaux moyens de rentabilité sont généralement faibles. Les cachets stagnent depuis plusieurs années et la présence des productions étrangères (essentiellement anglophones) s’amplifie, accentuant une concurrence déjà féroce. On observe également plusieurs phénomènes qui, individuellement ou conjugués, sont en lien avec les changements observés dans le secteur des spectacles de chanson francophone. Parmi ceux-ci, on noterait le déclin de l’intérêt pour la chanson francophone1, le vieillissement de la population, les modifications aux habitudes de consommation culturelle, la sursegmentation des publics, l’accroissement de la concurrence, les effets de la gratuité des spectacles, l’étalement urbain, le développement d’une offre de spectacles en banlieue, la fin du cycle des grandes comédies musicales francophones, etc. 1 En la matière, certaines perceptions sont difficiles à corroborer par des données factuelles. Ainsi, les données statistiques issues du Guide de mise en marché de la musique québécoise francophone au Québec (www.guidemqf.ca, une initiative conjointe de l’Association canadienne des radiodiffuseurs (ACR) et de l’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ) appuyée par le Fonds RadioStar, selon les résultats d’une étude réalisée par la firme Ipsos) tendent à montrer qu’entre 2012 et 2015, le pourcentage de la population du Québec ayant assisté à un spectacle de chanson francophone est demeuré stable (environ une personne sur quatre), ce qui va à l’encontre d’autres sources d’informations (section 3.1). Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada. INTRODUCTION DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 2 Alors que le spectacle est vu par plusieurs comme une façon de diversifier ses sources de revenus, la situation du spectacle de musique francophone au Canada apparait plutôt inquiétante — certains parlent même de crise. L’industrie du spectacle de chanson francophone s’adapte comme elle peut. Or, on dispose de peu d’information pour rendre compte complètement et mesurer précisément les transformations que subit le secteur. Ce déficit d’information est particulièrement évident si on prend comme point de repère la dynamique de l’enregistrement sonore où des statistiques et des études récentes sont accessibles. C’est dans ce contexte que Patrimoine canadien a souhaité mieux connaitre le profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada et de ses divers marchés, ici et à l’étranger. Les objectifs de l’étude sont de dresser un portrait analytique de la situation de l’industrie du spectacle de chanson francophone à l’échelle du pays et, plus spécifiquement :  Décrire cette industrie : sa structure, son fonctionnement, le rôle des différents acteurs et la circulation du flux monétaire.  Tracer un portrait de ses différents marchés au Canada et à l’étranger : leur fonctionnement, les opportunités de développement, etc.  Établir l’importance économique du secteur et estimer ses impacts économiques. L’étude vise à construire un portrait éclairant de la situation pour élargir la compréhension de la situation de l’industrie du spectacle de chanson francophone et les transformations qui l’animent. 1.2 APPROCHE PRIVILÉGIÉE L’étude constitue une démarche intégrée axée principalement sur l’établissement d’un portrait de la situation de l’industrie du spectacle de chanson francophone et ses transformations à l’échelle du Canada tout en tenant compte de la dynamique internationale. Le mandat comporte trois volets spécifiques :  Une description de l’industrie du spectacle de chanson francophone et de ses composantes au Canada.  Un portrait des marchés pour les spectacles de chanson francophone, au Canada et à l’étranger.  Une estimation de l’importance économique du secteur et de ses impacts économiques. L’étude des sources secondaires d’information a permis de mieux comprendre la dynamique de l’industrie. L’analyse des informations statistiques disponibles a aidé à dresser les paramètres généraux notamment sur le plan économique. Toutefois, le gros du travail a reposé sur un travail d’enquête auprès des principaux acteurs du secteur, c’est-à-dire les producteurs, les agents, les diffuseurs, les locateurs de salles, les festivals et événements, les gérants et les artistes, mais aussi d’autres personnes clés uvrant auprès des partenaires institutionnels, des associations et des divers groupes d’intérêt de cette industrie. Une cinquantaine d’entrevues ont ainsi été réalisées (voir la liste à l’annexe 1). La méthode a privilégié la transmission d’un canevas d’entrevue accompagné d’une prise d’un rendez-vous téléphonique systématique suivi d’une entrevue (voir annexe 2). Les questions d’enquête étaient adaptées selon les acteurs ciblés, mais elles conservaient une structure commune pour assurer une cohérence à l’enquête. Les entrevues comprenaient un volet qualitatif et un volet quantitatif notamment pour estimer les flux financiers entre les acteurs. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada. INTRODUCTION DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 3 Pour faciliter les échanges, les documents suivants pouvaient être transmis préalablement à l’entrevue :  Une représentation schématique des principales composantes de la structure de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada.  3 budgets types de production de spectacles.  3 budgets types de diffusion de spectacles. Pour dresser un portrait éclairant de la situation, une cartographie fonctionnelle et économique du secteur a été dressée. Cette méthode, plus connue sous son vocable anglais de mapping, vise à :  identifier et dépeindre les composantes de l’industrie;  établir la dynamique des relations entre les composantes;  estimer les flux financiers entre ces composantes. L’information secondaire actuellement disponible ne permet cependant pas de dessiner avec exactitude ce portrait, ni sur le plan fonctionnel, ni sur le plan économique. La raison étant que les sources d’information sont partielles tant dans la nature des éléments comptabilisés que dans leur portée géographique notamment. Par exemple, parmi les sources d’information les plus complètes, les informations produites par la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) ou l'Observatoire de la culture et des communications du Québec (OCCQ) ne permettent pas de représenter les flux financiers entre les acteurs et seule l’industrie francophone québécoise du spectacle est prise en compte. Pour réussir à obtenir ce portrait global, il a donc fallu combiner trois approches méthodologiques :  Extraire les données globales significatives des sources secondaires d’information (OCCQ, SODEC, Statistiques Canada, etc.).  Paramétrer les relations entre les acteurs par une enquête directe auprès de ceux-ci.  Estimer et calibrer les flux financiers en combinant les informations générales obtenues auprès des sources secondaires d’information et les paramètres déduits de l’enquête auprès des acteurs. Si les trois approches réclament de la rigueur, l’estimation finale s’appuie sur une recherche de cohérence et un « sens des proportions » tirés de la synthèse de l’information disponible. Un comité de suivi de l’étude composé de représentants de différents segments de l’industrie a été associé à ce travail de validation des hypothèses. Les portraits des marchés des spectacles de chanson francophone au Canada et à l’étranger combinent des informations secondaires et primaires. Le travail d’enquête (une dizaine d’entrevues) auprès des acteurs s’est toutefois avéré la méthode la plus riche d’enseignement. Pour le marché français, la collaboration de sources institutionnelles comme la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) ou encore le Centre National de la Chanson, des Variétés et du Jazz (CNV) a permis d’obtenir des informations et des éléments d’analyse de bonne qualité. Finalement, l’estimation de l’importance économique du secteur a découlé des informations économiques obtenues lors de la cartographie économique du secteur. Pour le calcul des impacts économiques, il a été nécessaire de recourir à une simulation. Le modèle intersectoriel de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) a été utilisé puisque la majorité des retombées économiques concerne le Québec. Une estimation des Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 6 DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE 2.1 INFORMATIONS DISPONIBLES 2.1.1 Une industrie peu documentée Les études récentes qui s’intéressent uniquement à l’industrie de la chanson en français au Canada sont très peu nombreuses. Une des rares est celle réalisée par POLLARA/Omnia Communications en 2005, pour le compte de Patrimoine canadien. Son intérêt vient de ce qu’elle porte précisément sur le spectacle de chanson. L’analyse de cette étude, Étude portant sur le secteur de la musique en direct, des festivals et du spectacle au Canada français3, de même que d’autres études portant sur l’industrie de la musique au Canada, nous permettent tout de même de dresser un premier portrait sommaire du secteur du spectacle de chanson en français et de son évolution au cours des dernières décennies. Elles permettent également de parler des difficultés à compiler des données quantitatives fiables et normatives du secteur. Outre les études sur l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada à proprement parler, mentionnons deux importantes études qui portent sur l’industrie du spectacle à l’échelle canadienne (sans distinction linguistique). La première, réalisée en 2012 par PricewaterhouseCoopers (PwC)4 fut commandée par Music Canada, 3 Pollara Inc. et Omnia Communications Inc. Décembre 2005, Étude portant sur le secteur de la musique en direct, des festivals et du spectacle au Canada français 4 PriceWaterhouseCoopers. 12 avril 2012, Economic Impact of the Sound Recording Industry in Canada, Music Canada une association sectorielle du Canada anglais dont les membres regroupent notamment les filiales canadiennes des majors de la musique (Sony Music, Universal et Warner). La seconde, complétée en 2013 par Nordicity5, fut réalisée à la demande de la Canadian Independent Music Association (CIMA). Nous avons aussi porté notre attention sur une étude rédigée pour le Conseil des arts et des lettres du Québec en 2013 qui dresse le portrait de la chanson québécoise. Finalement, nous avons consulté une étude réalisée en 1998 par Marc Ménard pour le compte de la SODEC : Le spectacle de chanson au Québec – Portrait économique.6 5 Nordicity. Février 2013, Sound Analysis, An examination of the Canadian Independent Music Industry, Canadian Independent Music Association 6 Marc Ménard. Octobre 1998, Le spectacle de chanson au Québec, Portrait économique, Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 7 Apport financier du spectacle à l’industrie de la musique — au Canada Nordicity, dans son étude qui aborde le secteur indépendant de la musique, évaluait qu’en 2012 les spectacles avaient représenté environ 15 %7 des revenus des entreprises indépendantes de musique, tandis que les ventes d’enregistrements en constituaient 25 %.8 En raison de la petite taille des échantillons pour certains des secteurs de l’industrie musicale, notamment ceux des musiciens et des producteurs de spectacles, Nordicity a dû les regrouper en des catégories plus larges pour obtenir des résultats significatifs. La ventilation des revenus permet d’obtenir une vue globale du secteur, mais pas d’isoler une composante précise comme les entreprises seulement engagées dans la production de spectacles. La nature de la cueillette des données ne permet pas non plus de distinguer les activités de spectacle menées par les maisons de disques de celles des producteurs spécialisés. 7 La situation semble différer au Québec où le pourcentage des revenus de spectacles représentait environ 40% des revenus totaux des bénéficiaires du Programme d’aide aux entreprises en musique et variétés (PADISQ) pour la même période. La différence dans la composition des échantillons fait en sorte qu’il est toutefois difficile de comparer ces deux sources de données. Source : Mathieu Perreault. Avril 2015, Situation financière des entreprises du PADISQ, SODEC. 8 Nordicity. Février 2013, Sound Analysis, An examination of the Canadian Independent Music Industry, Canadian Independent Music Association, p.16 fig.1 Revenus des compagnies de musique selon leurs activités en 2012 Source : Nordicity, février 2013, Sound Analysis, An examination of the Canadian Independent Music Industry, Canadian Independent Music Association 25% 16% 15% 9% 6% 5% 5% 4% 3% 2% 2% 2% 2% 2% 2% 1% Ventes d'enregistrements sonores Autre Spectacle en direct Honoraires professionnels Revenus de l'édition de musique Redevances pour uvres antérieures Programmes de soutien nationaux Revenus de l'octroi de licences pour les bandes maîtresses Honoraires d'enseignement et de formation Produits dérivés Commandite Autres subventions, bourses et aides publiques directes (excluant les crédits d'impôt) Travail en studio Aides publiques provinciales et territoriales Crédits d'impôt (provinciaux et fédéraux) Duplication et fabrication de CD et/ou services de duplication Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 8 Dans son étude réalisée pour Music Canada en 2012, portant sur les retombées économiques de l’industrie de l’enregistrement sonore canadienne, PwC9 indique que si les spectacles en tant que tels ne font pas partie de ce secteur, ils constituent tout de même un élément de plus en plus important de l’industrie dans son ensemble. Les spectacles sont intégrés aux plans marketing et permettent d’augmenter le rayonnement des artistes. PwC a évalué les retombées économiques des spectacles, en utilisant, entre autres, les données de Statistiques Canada sur les dépenses des ménages consacrées aux spectacles des arts de la scène. 9 PriceWaterhouseCoopers. 12 avril 2012, Economic Impact of the Sound Recording Industry in Canada, Music Canada tab.1 Impact économique des concerts de musique au Canada en 201010 Impact direct Impact indirect Impact économique total Production (en millions de dollars) 302,0 153,2 455,2 PIB (en millions de dollars) 170,5 81,2 251,7 Traitements et salaires (en millions de dollars) 135,2 52,3 187,5 Revenus gouvernementaux (en millions de dollars) 37,1 16,4 53,5 Main d' uvre (nombre d'emplois) 6 102 1 318 7 420 Source : PriceWaterhouseCoopers, 12 avril 2012, Economic Impact of the Sound Recording Industry in Canada, Music Canada Ainsi, selon PwC, l’industrie du spectacle canadienne dans son ensemble représentait en 2010 des retombées économiques directes et indirectes de 455 millions de dollars et sa contribution au PIB était de 252 millions de dollars. 10 PriceWaterhouseCoopers. 12 avril 2012, Economic Impact of the Sound Recording Industry in Canada, Music Canada, p. 26 Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 11 Les festivals Dans toutes les études consacrées à la chanson, on mentionne l’importance stratégique des festivals pour les artistes, mais également leur importance grandissante comme sources de revenus. L’étude POLLARA/Omnia16 rapporte que plusieurs acteurs clés du secteur de la musique soulignent justement l’aspect crucial de ces festivals qui sont parfois le seul moyen dont disposent les artistes francophones pour rayonner en dehors de leur marché de proximité. Parce que ces évènements réunissent de larges auditoires dont les goûts sont diversifiés, ils jouent le rôle unique de passeurs de nouveaux talents dans tel ou tel autre marché. Tant l’étude de Ménard17 que celle de POLLARA/Omnia18 font valoir que les festivals, comme les fêtes et les évènements spéciaux, sont davantage en mesure d’offrir aux artistes une rétribution plus substantielle et intéressante pour l’accueil de leur spectacle que celle consentie par les salles de spectacles régulières. D’une part, les cachets sont souvent fixes, d’autre part, cette rémunération peut atteindre le double, même le triple, de ce qui est offert par les autres types de diffuseurs, notamment pour les spectacles d’artistes capables de déplacer les foules. Pour les producteurs de spectacles, le modèle économique des festivals apparaît d’autant plus intéressant que ces évènements permettent d’attirer généralement davantage de commandites importantes que les 16 Pollara Inc. et Omnia Communications Inc. Décembre 2005, Étude portant sur le secteur de la musique en direct, des festivals et du spectacle au Canada français 17 Marc Ménard. Octobre 1998, Le spectacle de chanson au Québec, Portrait économique, Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) 18 Pollara Inc. et Omnia Communications Inc. Décembre 2005, Étude portant sur le secteur de la musique en direct, des festivals et du spectacle au Canada français, p.29 tournées, parce que les commanditaires s’intéressent d’abord aux foules, voire aux produits de masse. Plusieurs des répondants de l’étude de POLLARA/Omnia19 soulignent également que les coûts de production dans le cadre d’un festival sont dans la plupart des cas moindres que ceux d’un spectacle dit régulier. Considérant que dans le contexte des festivals, l’équipement de scène y serait fourni dans une plus grande proportion et que les frais de promotion et de publicité sont aussi assumés par les organisateurs de ces évènements, le seuil de rentabilité y devient beaucoup plus alléchant pour l’artiste et pour le producteur du spectacle, selon Ménard.20 Pour d’autres acteurs de l’industrie, les festivals ont par contre aussi des répercussions négatives telles que l’incapacité pour un artiste de générer des recettes tirées de spectacles pendant le reste de l’année. Les auteurs de l’étude de POLLARA/Omnia21 notent à cet effet qu’il peut être difficile pour un artiste de vendre des billets dans un marché dans lequel il aurait été présenté gratuitement, lors d’un festival notamment. Ce phénomène serait cependant difficile à quantifier, selon les mêmes auteurs. 19 Pollara Inc. et Omnia Communications Inc. Décembre 2005, Étude portant sur le secteur de la musique en direct, des festivals et du spectacle au Canada français, p.29 20 Marc Ménard. Octobre 1998, Le spectacle de chanson au Québec, Portrait économique, Société de développement des entreprises culturelles (SODEC), p.51 21 Pollara Inc. et Omnia Communications Inc. Décembre 2005, Étude portant sur le secteur de la musique en direct, des festivals et du spectacle au Canada français, p.29 Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 12 Nécessité de l’aide publique Toutes les études consultées font ressortir d’une manière ou d’une autre le rôle important que jouent les fonds publics dans le financement du secteur du spectacle de la chanson. L’étude de POLLARA/Omnia22 a recueilli de nombreux commentaires auprès de ses participants qui tendent à confirmer le caractère essentiel de ces investissements publics, particulièrement pour les artistes francophones. La grande implication des deux niveaux de gouvernement, fédéral et provincial, y est d’ailleurs abondamment évoquée. Pour ce qui est du Québec plus spécifiquement, Ménard souligne que l’aide à ce secteur est — au moment de la réalisation de ses travaux — proportionnellement inférieure à celle que l’on retrouve dans le secteur du disque et dans la majorité des autres industries culturelles. Il propose donc de hausser les deniers publics attribués au spectacle de chanson « non pas pour couvrir le manque à gagner actuel, mais pour servir d’incitatif au réalignement nécessaire de l’offre de spectacle. »23 Ce type d’aide, à effet structurant, pourrait prendre diverses formes dont celle d’un crédit d’impôt automatique lié au nombre de représentations ou aux coûts de production24. Philippe Renaud, pour sa part, s’interroge sur le niveau de l’aide publique destinée à la culture en général, et à la chanson en particulier. Il rappelle les débats qui se déroulent régulièrement à ce sujet au Québec, particulièrement lors d’affrontements entre vision industrielle et vision culturelle. Il constate aussi que l’industrie de la musique ne profite pas 22 Pollara Inc. et Omnia Communications Inc. Décembre 2005, Étude portant sur le secteur de la musique en direct, des festivals et du spectacle au Canada français, p.29 23 Marc Ménard. Octobre 1998, Le spectacle de chanson au Québec, Portrait économique, Société de développement des entreprises culturelles (SODEC), p.58 24 Depuis l’étude de Ménard, un crédit d’impôt provincial a été mis sur pied. d’un soutien aussi important que d’autres industries, notamment celles du cinéma et de la télévision.25 Selon Renaud, le débat doit porter sur bien plus que le niveau des soutiens publics. Il faut se questionner aussi sur l’efficacité même des modes de financement traditionnels et réfléchir à leur actualisation. Comment peuvent-ils être des leviers pour soutenir plus efficacement le développement des industries culturelles et la chanson en particulier? Il considère qu’en cette ère de révolution numérique et technologique, on doit « envisager un financement reflétant les nouveaux modèles d’affaires développés et expérimentés au courant des dernières années »26 25 Philippe Renaud. Janvier 2013, Un portrait de la chanson québécoise, présenté dans le cadre du Forum sur la chanson québécoise organisé par le Conseil des arts et des lettres du Québec, pp.49-50 26 Philippe Renaud. Janvier 2013, Un portrait de la chanson québécoise, présenté dans le cadre du Forum sur la chanson québécoise organisé par le Conseil des arts et des lettres du Québec, p.51 Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 13 La concurrence des autres formes de spectacles Comme partout ailleurs, la chanson est en concurrence avec d’autres formes de divertissement, mais à ce chapitre, au Québec, l’humour occupe une position particulière. Dans son rapport de 1998, Ménard27 mentionne que le spectacle de variétés est surtout l’affaire de la chanson (47 % des recettes de guichet) et de l’humour (33 % des recettes). Le cirque, quant à lui, accapare 9 % des recettes en variétés. Il souligne que l’émergence de l’humour sur une telle échelle, et, dans une moindre mesure, la place du cirque, sont des phénomènes qui sont particuliers au Québec. Cette tendance semble s’être intensifiée puisque Philippe Renaud, dans son rapport de 2013, constate grâce à des données de l’OCCQ sur la répartition de l’assistance aux 50 spectacles les plus fréquentés en arts de la scène, le faible poids relatif des spectacles de chanson francophone et anglophone par rapport aux spectacles d’humour. En 2011, il était respectivement de 7 % et 19,7 % de l’assistance totale, comparé à 33,7 % pour l’humour.28. 27 Marc Ménard. Octobre 1998, Le spectacle de chanson au Québec, Portrait économique, Société de développement des entreprises culturelles (SODEC), p.7 28 Philippe Renaud. Janvier 2013, Un portrait de la chanson québécoise présenté dans le cadre du Forum sur la chanson québécoise organisé par le Conseil des arts et des lettres du Québec, p.26 Difficultés à compiler des données quantitatives fiables et normatives pour le secteur Plusieurs études soulignent que de nombreuses salles de spectacles échappent aux enquêtes statistiques. Dans POLLARA/Omnia, on déplorait la quasi-absence de données à ce sujet — une situation corrigée depuis par l’OCCQ qui a commencé à compiler les données de fréquentation des arts de la scène en 2005. Philippe Renaud signale pour sa part qu’il existe tout un réseau de salles de spectacles de petite taille qui programment des musiciens québécois, souvent de la relève qui échappent à l’enquête de l’OCCQ. On trouve beaucoup de ces salles à Montréal, mais aussi partout ailleurs au Québec. Or, les données liées à leurs recettes, leur fréquentation et même le nombre de représentations qui s’y tiennent ne sont compilés nulle part. Il est ainsi difficile d’évaluer leur poids relatif au sein de l’industrie.29 29 Philippe Renaud. Janvier 2013, Un portrait de la chanson québécoise présenté dans le cadre du Forum sur la chanson québécoise organisé par le Conseil des arts et des lettres du Québec, p.28 Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 16 2.2 CARTOGRAPHIE FONCTIONNELLE ET ÉCONOMIQUE La représentation schématisée de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada s’appuie sur une grille de lecture qui distingue trois éléments : l’infrastructure, la superstructure et la structure. Cette classification des composantes correspond aux modèles mis en lumière par le courant dit matérialiste en sociologie et en économie. La série de définitions suivantes permettra de clarifier notre compréhension des termes dans le cadre du présent rapport. L’infrastructure correspond aux composantes qui portent l’action des acteurs du secteur. Par exemple, les immeubles et les équipements font naturellement partie des infrastructures matérielles. Il en est de même pour les facteurs de dispersion géographique. Sont également pris en compte les facteurs de densité démographique ainsi que la nature des populations dans le cadre d’une réflexion sur l’infrastructure. À titre d’exemple, les productions sont dépendantes de l’état de l’infrastructure de diffusion et de l’importance des marchés. Parmi les éléments qui relèvent le plus manifestement de l’infrastructure, on identifiera la jauge et les types de salles, le nombre et la diversité des lieux de diffusion, la qualité et la vétusté des équipements, leur dispersion géographique, etc. La superstructure est formée de l’ensemble des modèles et des modalités qui conditionnent le développement de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada. Ceux-ci peuvent être de différents ordres : économique (modalité d’accès aux différents marchés et publics, commanditaires, fondations), légal ou réglementaire (environnement juridique, forme légale accessible aux organisations, syndicats, sociétés de gestion des droits) ou encore politique (ministères, organismes subventionnaires). La superstructure a donc une influence sur le développement. Elle peut encourager certaines stratégies ou encore en sanctionner d’autres. Ainsi, elle est amenée à contribuer au succès de certaines organisations ou à interdire certaines pratiques. La structure est l’outil fondamental de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada. Elle regroupe l’ensemble des organisations qui ont pour mandat premier de soutenir la production de spectacle de chanson à travers sept fonctions principales : – la création; – la préproduction; – la production; – la diffusion; – la promotion et la mise en marché; – les services techniques; – la représentation, la concertation et la défense des intérêts. Pour obtenir un portrait complet de l’écosystème de l’industrie, nous intégrons les fonctions de gestion des droits (qui fait le lien avec l’infrastructure), de gérance, d’édition, de billetterie et de médiation. Cette représentation schématique vise à illustrer la richesse et la diversité du secteur. Toutefois, nous voulons souligner que la représentation retenue intègre des composantes peu développées, mais qui ont été identifiées lors des consultations. Cet exercice de schématisation est réducteur et il ne peut pas prétendre illustrer toutes les situations. C’est avant tout un outil pour comprendre la dynamique et l’organisation du secteur. Un tel exercice permet également de fournir un système de représentation qui facilite l’illustration des contributions, des relations, des problématiques et, plus généralement, de l’organisation de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 17 fig.2 Principales composantes de la structure de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada Diffusion Fêtes, festivals, événements, concours, etc. Corporative NumériqueSalles en location Diffuseurs pluridisciplinaires Diffuseurs spécialisés Lieux inusités & Bars-spectacles Création Interprètes Auteurs & Compositeurs Créateurs Services techniques Location d'équipement, transport, etc. Éclairagistes, ingénieurs du son, techniciens, etc. Gérance Édition Billetterie Représentation, concertation et défense des intérêts Réseaux de diffusion Syndicats Associations & regroupements Gestion des droits Médiation Agents de spectacle Promotion & mise en marché Diffuseurs Marchés / Vitrines Producteurs, agences de spectacles Promotion collective Production Majors Indépendants Producteurs Majors Indépendants Producteurs Préproduction Marchés / publics Europe francophone Reste du monde Centres urbains Banlieues Régions Québec Milieux urbains Milieux ruraux Autre provinces canadiennes Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 18 2.3 PRINCIPALES COMPOSANTES DE LA STRUCTURE DE L’INDUSTRIE DU SPECTACLE DE CHANSON FRANCOPHONE AU CANADA 2.3.1 La création La fonction création couvre les périodes de ressourcement, de recherche, d’expérimentation et d’élaboration d’un spectacle, des premières idées à la mise en place des composantes scéniques en passant par la composition et l’écriture36. On peut distinguer les périodes de recherche qui n’ont pas pour finalité le spectacle de celles qui visent l’exploration de nouvelles avenues avec des interprètes pour la présentation sur scène d’un spectacle. On retrouve plusieurs composantes au chapitre de la création, dont certaines peuvent être assumées par la même personne : auteur des paroles, compositeur de la musique, directeur artistique, metteur en scène, concepteur d'éclairage, arrangeur, sonorisateur, directeur musical, artistes (interprètes, musiciens), etc. Comme la création d’un spectacle n’est une activité désincarnée, le producteur est associé à la fonction. 36 Dans bien des cas, la création d’un spectacle a été précédée par la production d’un enregistrement sonore. 2.3.2 La gérance La gérance37 d’un artiste de la chanson est le point de contact entre l’artiste et les marchés du disque et du spectacle. C’est le représentant des artistes de la chanson auprès de tous les autres acteurs de la filière. Le gérant peut aussi agir comme directeur artistique ou producteur de spectacles. Sa rémunération provient généralement d’un pourcentage des revenus de l’artiste (entre 5 % et 50 % des revenus, le plus souvent entre 15 % et 20 %). La gérance, en complicité avec l’artiste, contribue à l’élaboration des choix stratégiques globaux en termes de développement de carrière, de projets de tournée, etc. 2.3.3 L’édition L’éditeur musical se voit confier par contrat la charge d’administrer, commercialiser et promouvoir des uvres musicales, dans ce cas-ci des chansons, au nom des auteurs, compositeurs ou d’autres titulaires de leurs droits. À titre de détenteur des droits d’exploitation, il accorde contre rémunération des licences permettant toute forme d’utilisation ou de diffusion de ces uvres, incluant le contexte des spectacles. Les revenus sont ensuite partagés entre les ayants droit sous forme de redevances. Sa propre part ne dépasse pas en principe 50 % de ces revenus et tient lieu de rémunération pour ses services. Parmi ses responsabilités, il y a celle d’inscrire les uvres et d’assurer les suivis auprès des diverses sociétés de gestion collective des droits comme la SOCAN, le CMRRA ou la SODRAQ pour bénéficier de toutes les redevances liées à l’utilisation de la musique pour laquelle il est mandaté. 37 La fonction de gérance renvoie directement à la dénomination de «gérant d’artistes» une terminologie qui a plusieurs équivalents quasi synonymes : imprésario, agent artistique ou encore manager. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 21 du spectacle en obtenant du producteur (directement ou par l’entremise d’un agent de spectacle) le droit de présenter le spectacle pour un nombre déterminé de représentations. Il négocie et signe un contrat de diffusion du spectacle, organise localement sa mise en marché, sa promotion et la vente de billets, et accueille le spectacle dans son lieu de diffusion en contrepartie du paiement d’une somme forfaitaire au producteur, et parfois aussi d’un partage des ventes de billets. Il a la charge de l’accueil du public, de la billetterie, de la sécurité, de la promotion et de la technique. Il veille également à ce qu’il y ait sur le site, tout le personnel supplémentaire nécessaire au spectacle tel que machinistes, placeurs, concierges, traiteurs, etc. Selon les termes du contrat négocié, le diffuseur peut fournir une partie de l’équipement et une équipe technique travaillant avec celle du producteur. Il est en outre responsable de la sécurité, de son propre personnel et du paiement des droits d’exécution publique (tarifs concerts SOCAN). – La location de salle peut se faire auprès de n’importe quels propriétaires ou gestionnaires de salle. En contrepartie d’un coût de location, le producteur-diffuseur du spectacle dispose de la salle et de services de base. Si ces services ne comprennent pas la technique, la promotion, la billetterie, la sécurité, l’accueil du public, etc., c’est le producteur-diffuseur du spectacle qui les prend en charge directement. – De plus en plus de lieux inusités ou de bars proposent des spectacles de chanson. Ce phénomène peut s’expliquer par la recherche d’un nouveau type d’expérience pour les publics ou pour rapprocher l’art du citoyen. C’est aussi une avenue pour des producteurs lorsque la représentation de leur spectacle ne trouve pas preneurs dans d’autres réseaux. Certains de ces lieux jouent le rôle de producteur-diffuseur, tandis que d’autres se contentent du rôle de diffuseur, comme dans les cas où les musiciens se produisent eux-mêmes dans les bars. L'Observatoire de la culture et des communications du Québec (OCCQ) comptabilise la fréquentation dans un bar si les représentations font partie d’une programmation annoncée et s’il y a un prix d’entrée. – De nombreuses fêtes, festival, événements ou concours diffusent de la chanson francophone. Dans ce cadre, on distinguera les événements artistiques spécialisés ou non en chanson qui s’apparentent à des diffuseurs, des événements festifs qui proposent le spectacle de chanson pour enrichir l’expérience des publics. Toutefois, dans un cas comme dans l’autre, il existe souvent un volet de spectacles de chanson présenté gratuitement aux publics. – La diffusion corporative peut prendre plusieurs formes allant de la musique d’ambiance, au spectacle pour un événement philanthropique en passant par le spectacle privé ou des interventions lors d’événements solennels. Certaines agences de spectacles pour événements corporatifs ou privés possèdent une offre de spectacles de chanson francophone. – La diffusion numérique de spectacles de chanson francophone en salle est presque inexistante. Le principal exemple en la matière date de 2014 où la diffusion du film Timeless — consacré à la tournée 2013 de Mylène Farmer — simultanément dans plus de 200 salles de cinéma Gaumont-Pathé, a attiré 100 000 spectateurs pour une séance unique. Contrairement à un genre comme l’opéra qui connait une large diffusion numérique (Metropolitan Opera : en direct et en haute définition, Opéra Paris Cinéma, etc.), la diffusion de spectacles de chanson est encore peu développée y compris pour son volet anglophone. La diffusion en différé sur les services de vidéo en ligne et sur demande (pay per view) est peu développée et elle conserve souvent un caractère amateur ou promotionnel. La plupart des vidéos accessibles sont des captations partielles de spectateurs souvent de piètre qualité. Les capitations professionnelles sont Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 22 très peu nombreuses : rendre compte d’un spectacle en vidéo est un exercice difficile et onéreux. Quant à la diffusion en direct (live streaming), elle représente pour certains43 un marché prometteur au potentiel encore peu exploité, mais les expériences en la matière demeurent pour l’instant anecdotiques. 2.3.7 La représentation, la concertation et la défense des intérêts Un secteur d’activité a besoin pour favoriser son développement de structures de représentation, de concertation, de promotion collective et de défense des intérêts. Ce seront des associations ou des regroupements comme l’Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ), une association professionnelle qui regroupe 250 membres qui uvrent, directement ou indirectement, dans tous les secteurs de la production de disques, de spectacles et de vidéo, l'Alliance nationale de l’industrie musicale (ANIM) qui représente l’industrie musicale des communautés francophones et acadiennes, le Réseau indépendant des diffuseurs d’événements artistiques unis (RIDEAU), une association nationale de diffuseurs de spectacles dont les membres sont répartis sur le territoire québécois et en francophonie canadienne, ou encore l’Association canadienne des organismes artistiques (CAPACOA) qui cherche à consolider le secteur de la diffusion et de la tournée au Canada et représente plus de 150 réseaux de diffusion, diffuseurs, agents et autres intervenants du milieu. 43 « En direct sur le Web : Comment la diffusion en continu peut améliorer l’expérience en concert pour les spectateurs », 14 septembre 2015, Bulletin, Music Canada Live. Source : www.musiccanadalive.ca/fr/newsletter/915/ Encadré 1 Principaux réseaux de diffuseurs au Canada ATLANTIQUE : ACADIE – RADARTS — Réseau atlantique de diffusion des arts de la scène et la Francofête en Acadie ONTARIO – Ontario Council of Folk Festivals (OCFF) – Réseau Ontario et Contact Ontarois OUEST CANADIEN – Réseau des grands espaces – Contact Ouest – Chemin Chez Nous QUÉBEC – Réseau des Organisateurs de Spectacles de l'Est du Québec (ROSEQ) – Réseau Scènes – Réseau Centre – RIDEAU – Accès Culture – Diffusion Inter-Centre – Objectif Scène – Association des diffuseurs culturels de l'Île de Montréal (ADICIM) – Festivals et Événements Québec (FEQ) CANADA – Canadian Arts Presenting Association/Association canadienne des organismes artistiques (CAPACOA) – Coup de c ur francophone (réseau pancanadien) Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 23 Les syndicats comme l’Association des professionnels des arts de la scène (APASQ), l'Union des artistes (UDA), le Canadian Federation of Musicians (CFM) ou encore la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec (GMMQ) influencent le développement du secteur à travers notamment la négociation des conditions de travail et de rémunération et l’élaboration d’ententes collectives qui prévoient principalement les conditions minimales d’engagement des créateurs ou des interprètes. Une des particularités de la diffusion des spectacles à l’échelle du Canada est la présence de plusieurs réseaux de diffuseurs (encadré 1) qui structurent la circulation des spectacles notamment sur une base géographique. En tant qu’organisations, ces réseaux ne jouent pas à proprement parler de rôle transactionnel dans la relation entre les diffuseurs qu’ils représentent et les producteurs. Ils peuvent cependant agir comme facilitateurs pour leurs membres en organisant des vitrines musicales où sont conviés les producteurs ou les artistes. 2.3.8 Les services techniques La production et la diffusion de spectacles mobilisent toute une série de ressources et de services spécialisés qui interviennent à différentes étapes d’un spectacle ou d’une tournée pour rendre possibles les prestations des artistes. Leur importance parfois capitale fait en sorte qu’ils sont des contributeurs non négligeables à l’économie du spectacle. – Logistique de tournée : location de véhicules pour le transport du personnel, des équipements, des décors, services de traiteur, cabinets d’assurances, firmes d’avocats, etc. – Équipements : location d’instruments de musique, d’équipements d’éclairage et de son, de chapiteaux, de scènes, de gradins, etc. – Services techniques : éclairagistes, ingénieurs de son, projectionnistes, gréeurs, artificiers, régisseurs, etc. Certaines entreprises ont développé une expertise qui fait d’elles des partenaires d’affaires de longue date des producteurs et des diffuseurs. L’efficacité du secteur s’appuie sur ces services de soutien qui permettent l’accès à des expertises et à des services professionnels. 2.3.9 Les agents de spectacle L’agent de spectacle, parfois appelé ́ tourneur44, booker ou chargé de diffusion est un individu ou une agence dont le mandat est de mettre en place les tournées ou les sorties d’un spectacle. Son travail couvre les trois aspects suivant : la prospection, la négociation, la contractualisation et son suivi. L’agent de spectacles représente le producteur auprès des diffuseurs. Fréquemment, il cumule deux fonctions en vendant lui-même le spectacle dont il détient les droits d’exploitation. Il peut aussi être salarié du producteur. L’agent en tant que tel ne détient aucun droit sur le spectacle et n’en assume aucun risque. En vue de permettre la rentabilité de la production, l’un de ses défis est de convenir de dates de représentations, avec des diffuseurs, avec la plus grande cohérence possible au niveau chronologique et territorial. En d’autres mots, il tente de regrouper les dates et d’optimiser les déplacements selon un circuit logique, en travaillant le plus étroitement possible avec les réseaux de diffuseurs. Sa rémunération est généralement basée sur un pourcentage des cachets bruts obtenus pour les ventes de représentations du spectacle. Un taux variant entre 10 % et 20 % semble être la norme dans l’industrie. Étant donné que la compétence d’un agent de spectacle est notamment basée sur son réseau de contacts et sa connaissance du marché de la diffusion, son action est le plus souvent territoriale. Un producteur peut ainsi travailler avec des agents de spectacle différents 44 Le tourneur est la dénomination retenue pour désigner un agent de spectacle en Europe francophone. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 26 2.4 LA DYNAMIQUE DES ÉCHANGES SECTORIELS 2.4.1 La fin du modèle traditionnel En 1996-1997, selon l’étude de Marc Ménard45, le spectacle et les ventes de disques représentaient respectivement 20 % et 54 % des revenus des entreprises qui déclaraient des revenus de diverses sources du secteur de la musique (enregistrements, spectacles, gérance, etc.). En 2013-2014, les données de la SODEC46 montrent que cette proportion s’est inversée, passant à 50 % pour le spectacle et à 14 % pour l’enregistrement sonore47. Les changements profonds dans la structure des revenus ne s’apparentent toutefois pas à un simple rééquilibrage. Les pertes de revenus liés à l’enregistrement sonore n’ont pas été compensées, en chiffres absolus, par l’accroissement des revenus liés aux spectacles. Au contraire, les données de l’OCCQ analysées de manière plus détaillée à la section 3.1.1 montrent qu’entre 2004 et 2014, les revenus de billetterie en dollars constants des spectacles de chanson francophone ont diminué de près de la moitié au Québec. Les entreprises du secteur de la musique ont donc subi à la fois les répercussions de cette décroissance des recettes de spectacles et celles de la baisse des revenus liés aux enregistrements sonores. 45 Marc Ménard. Octobre 1998, L’industrie du disque au Québec, Portrait économique, Société de développement des entreprises culturelles (SODEC). 46 SODEC, avril 2014, Situation financière des entreprises du PADISQ. 47 Cette redistribution des revenus ne doit pas être interprétée comme un rééquilibrage global de l’assiette des revenus. C’est l’effondrement des revenus liés à l’enregistrement sonore qui explique la progression en pourcentage des revenus de spectacle. fig.3 Répartition des revenus des entreprises de la musique en 1996-1997 et en 2013-2014 Un changement structurel aussi important et aussi rapide semble avoir pris beaucoup d’acteurs au dépourvu. Malgré cette profonde transformation, pour plusieurs, le modèle dit traditionnel — celui qui prévalait avant l’émergence d’internet et le partage de fichiers musicaux — reste la référence implicite à partir de laquelle ils tentent de comprendre la situation actuelle. Ce faisant, ils font peut-être abstraction d’un possible changement de paradigme plus complet. 54% 14% 20% 50% 22% 22% 4% 17% 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100% 1996-1997 2013-2014 Aides publiques Autres revenus Spectacle Enregistrement sonore Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 27 Aujourd’hui, plusieurs acteurs de l’industrie avancent que la chanson francophone va mal. Elle ne remplit effectivement plus les grandes salles, même s’il y a parfois des exceptions qui viennent «fausser» les statistiques48. En 2013 par exemple, les succès des tournées de Marie Mai et de Ginette Reno, conjugués à un spectacle unique de Céline Dion, ont suffi à eux seuls à redresser momentanément les statistiques de fréquentation. En dehors de ces situations exceptionnelles, les chiffres de l’OCCQ confirment plutôt que l’assistance totale aux spectacles de chanson francophone a diminué de moitié dans les grandes salles depuis 2005 (figure 11). Dans ce contexte, le modèle traditionnel qui s’est développé au Québec au cours des années 80, et qui a permis à l’industrie locale de contrôler la presque totalité de son marché, est en profonde restructuration. Selon Marc Ménard49, le modèle traditionnel est né de l’émergence de maisons de disques et de productions locales, de réseaux de distribution efficaces et de réseaux de diffuseurs soutenus par l’État. Ce modèle était le résultat de la mise en place de stratégies appropriées pour occuper la place laissée libre par le retrait des firmes 48 Les performances remarquables de quelques artistes certaines années créent un effet en «dents de scie». Cette situation est intrinsèque au secteur de la musique tant au niveau local qu’international : un faible nombre d’artistes s’accapare une large proportion des ventes. 49 À partir de 1979, « l’industrie mondiale du disque fut confrontée à sa pire crise depuis la fin de la guerre. Parmi les facteurs les plus couramment mentionnés pour expliquer le déclenchement de cette crise (Vogel, 1994), signalons la sévère récession économique de 1981-1982, la hausse rapide du prix des microsillons vinyle suivant le second choc pétrolier, la dégradation de la qualité du pressage des disques, l’augmentation de la copie privée résultant de la pénétration rapide de la cassette et l’étiolement de la vague du disco, qui avait porté l’industrie à un sommet en 1978. » Source : Marc Ménard. Octobre 1998, L’industrie du disque au Québec, SODEC. multinationales — les majors50 — peu intéressées, dans un contexte de crise économique, par un petit marché francophone. L’industrie de la chanson francophone au Canada est aujourd’hui le fait d’entreprises indépendantes canadiennes. Les majors qui dominent l’industrie de la musique à l’échelle mondiale et qui captent à elles seules près de 85 %51 des ventes d’enregistrements sonores au Canada, sont peu présents sur le marché de la chanson francophone depuis les années 80. 2.4.2 Une référence obsolète, mais omniprésente Dans l’industrie du spectacle de chanson francophone, le modèle traditionnel reste, comme nous l’avons mentionné, la référence implicite de certains acteurs tant en matière de production que de diffusion. Il repose sur une série de paramètres établis à une époque où le public se déplaçait massivement pour remplir de grandes salles, ce qui favorisait certainement la planification de grandes tournées à travers le territoire et permettait d’espérer multiplier les représentations dans les grands centres urbains. Ce modèle intégrait notamment la vente de saisons complètes (de septembre à mai, dans la plupart des cas) par les diffuseurs, ce qui nécessitait d’établir la programmation longtemps d’avance. Les producteurs pouvaient s’accommoder de cette planification à long terme tant que le cycle des carrières suivait un parcours relativement stable: production et mise en vente d’un album, préparation d’un spectacle, rodage du spectacle, rentrée montréalaise; en cas de succès, 50 Universal Music Group (UMG), Sony Music et Warner Music Group (WMG). 51 Ce pourcentage varie légèrement d’une année sur l’autre. Il est établie sur la base des statistiques des ventes annuelles au Canada établies par la firme Nielsen : Nielsen music Canada report. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 28 tournée majeure pouvant occuper une année entière et conclusion par une tournée des événements et des festivals. Toutefois, dans un contexte où l’album n’est plus la pierre angulaire du développement de la carrière d’un artiste, et où l’on constate une augmentation de l’offre de spectacles de chanson, ces étapes se chevauchent ou s’inversent, tandis que la durée de vie des albums comme des spectacles tend à se raccourcir. Des acteurs du secteur semblent étourdis par le bouillonnement souvent jugé anarchique de l’offre : des spectacles sont offerts simultanément en différents formats, du plus léger (« seul en scène ») au plus lourd (avec scénographie et plusieurs musiciens). On retrouvera presque simultanément les artistes en prestation gratuite dans le cadre de grands évènements extérieurs et tarifée chez des diffuseurs en salle. Des producteurs et des artistes soulignent qu’ils n’ont parfois d’autres choix que de maximiser les revenus de diffusion dans un court laps de temps, car l’espérance de vie de certains spectacles n’est plus que de quelques mois. À une autre échelle, il semble de plus en plus difficile de bénéficier d’une couverture médiatique adéquate pour soutenir la mise en marché des spectacles. La diversité de la scène musicale francophone est moins bien représentée dans les médias traditionnels qu’il y a quelques années. Les producteurs et les artistes doivent nécessairement passer par les nouveaux médias — les blogues, les réseaux sociaux, la vidéo en ligne, etc. — pour la promotion et le marketing et les utiliser pour assurer une présence continue de l’artiste auprès de ses fans. Lorsque les acteurs font référence au modèle traditionnel, ils ne font pas qu’invoquer une période faste où les albums se vendaient par milliers. Ils se réfèrent à un modèle structuré qui permettait une mise en marché efficace des spectacles, à une période où de nombreux artistes étaient en mesure de remplir de grandes salles et de servir de tête d’affiche aux événements populaires, et à une ère où la couverture informationnelle des médias de masse permettait de populariser les artistes et d’entretenir un régime de vedettariat national. 2.4.3 À la recherche du nouveau modèle Une nouvelle génération d’acteurs de l’industrie du spectacle de la chanson francophone, qui n’a pas connu l’âge d’or du modèle traditionnel, a appris à composer avec sa transformation tandis que la majorité des producteurs qui ont connu cette période ont su s’adapter pour survivre. Sans avoir trouvé le nouveau modèle qui garantira la viabilité du secteur, les producteurs, les diffuseurs et les artistes mettent à l’essai des modèles d’affaires plus ou moins complexes dont l’efficacité pourra être évaluée dans le long terme. À l’échelle internationale, plusieurs entreprises ont développé des stratégies centrées sur les artistes, regroupant presque tous les services — production de disque, de spectacle, gérance d’artiste, agence de spectacle, édition — sous un même toit, avec pour résultat des économies d’échelle et, surtout, une diversification des sources de revenus. Au Canada, dans l’espace francophone, cette stratégie a toujours existé en raison de l’étroitesse du marché. Toutefois, avec la crise du disque, les compagnies de disque se sont depuis aussi mises à produire des spectacles. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 31 d’échecs, selon ce qui nous a été rapporté dans le cadre des mêmes entrevues. Par ailleurs, l’étude de la SODEC sur la situation financière des entreprises du PADISQ révèle un autre aspect de la question du soutien public. Même s’il y a eu croissance relative de l’aide publique par rapport aux revenus des entreprises, cette hausse s’explique par l’importance grandissante des crédits d’impôt au Québec. Les autres formes d’aides de la SODEC et les soutiens du gouvernement fédéral se sont maintenus pratiquement aux mêmes niveaux proportionnellement aux revenus de ces mêmes entreprises.56 Il faut également souligner que la situation décrite plus haut par l’étude de la SODEC ne reflète pas celle qui prévaut à l’extérieur du Québec. Bien que les entreprises dans les autres provinces bénéficient du support du gouvernement fédéral, elles ne bénéficient pas du même niveau de support provincial. Toutefois, dans tous les cas de figure, l’intervention publique, fédérale et provinciale (au Québec comme ailleurs), a été décrite comme non seulement désirable, mais incontournable pour assurer le maintien d’une industrie du spectacle de chanson francophone à l’échelle du Canada. En la matière, les conclusions de l’étude de la SODEC sont sans appel : non seulement ces aides publiques sont-elles nécessaires, mais plusieurs entreprises n’atteindraient même pas le seuil de la rentabilité. 56 Mathieu Perreault, Avril 2015, Situation financière des entreprises du PADISQ, SODEC. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 32 tab.3 Structure des revenus et des dépenses de 86 entreprises du PADISQ (Québec) selon leur spécialisation en 2013-2014 Spectacle Enregistrement sonore Gérance Diversifiées Total Revenus Enregistrement sonore 7,1% 45,8% 0,3% 20,5% 13,7% Spectacle 69,7% 14,6% 5,7% 21,6% 49,5% Gérance 2,6% 1,2% 69,5% 2,5% 4,5% Autres revenus 7,6% 4,5% 6,7% 36,5% 15,9% Aide publique 13,0% 34,0% 17,7% 18,9% 16,4% SODEC 2,9% 6,0% 9,0% 4,4% 3,7% Crédit d'impôt et autres subventions du Québec 7,0% 6,1% 2,2% 5,1% 6,2% Subventions canadiennes et autres aides 3,1% 21,9% 6,5% 9,4% 6,4% Total des revenus 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% Dépenses Coûts des marchandises vendues 69,9% 53,2% 50,6% 45,5% 60,9% Frais d'exploitation totaux 27,3% 38,9% 38,2% 39,3% 32,0% Frais de vente 6,0% 17,2% 4,2% 7,4% 7,2% Frais d'administration 16,7% 17,7% 32,6% 12,6% 16,0% Frais financiers 0,9% 0,5% 0,7% 0,3% 0,7% Amortissement 0,8% 3,5% 0,5% 2,2% 1,4% Intérêts sur la dette à long terme 0,1% 0,1% 0,1% 0,1% 0,1% Autres Frais 2,8% 0,0% 0,0% 16,8% 6,7% Total des dépenses 97,2% 92,2% 88,8% 84,9% 92,9% Marge bénéficiaire avant impôt 2,8% 7,8% 11,2% 15,1% 7,1% Sources : Mathieu Perreault. Avril 2015, Situation financière des entreprises du PADISQ, SODEC. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 33 En matière de diffusion, les aides publiques jouent un rôle très important. Dès 2009, l’étude57 sur les coûts de la diffusion des diffuseurs pluridisciplinaires au Québec montrait que le spectacle de chanson ne pouvait pas être diffusé sans aides publiques. Depuis, selon les professionnels consultés, la situation se serait aggravée. Lorsqu’il est question d’aides publiques en matière de diffusion, les trois paliers de gouvernement interviennent de manière significative. Toutefois, les municipalités s’avèrent souvent l’acteur prédominant. Dans les cas particuliers des fêtes, des festivals et des grands événements, les sources de financement s’enrichissent de commandites, mais également de programmes soutenant le développement économique local ou touristique. Les autorités municipales et régionales soutiennent souvent de manière importante ce type d’événements. 2.4.6 Une industrie sous haute tension Transformation majeure de l’industrie de la musique, baisse marquée de l’achalandage et des revenus autonomes pour le spectacle de musique francophone, il est clair que les dernières années ont été particulièrement difficiles pour les différents acteurs de l’industrie du spectacle de chanson francophone. Dans ce contexte, les antagonismes entre les artistes, les producteurs et les diffuseurs sont exacerbés. Lors de nos entrevues, plusieurs acteurs ont eu le réflexe d’imputer la responsabilité des difficultés éprouvées aux autres intervenants de la chaîne création, production, diffusion. À titre d’exemple, on aura entendu des artistes accuser les producteurs et les 57 Étude sur les coûts de la diffusion chez les diffuseurs pluridisciplinaires membres de RIDEAU, septembre 2009, DS 20|07 diffuseurs de ne plus prendre de risques, ou des producteurs reprocher aux diffuseurs de ne pas avoir su évoluer et d’abuser d’une situation dominante pour ne pas avoir augmenté le niveau des cachets pendant des années, ou encore des diffuseurs blâmer des artistes de ne pas respecter leurs engagements, en acceptant de se produire ailleurs dans des événements gratuits durant une tournée. Si dans plusieurs cas les reproches échangés témoignent d’une méconnaissance de la situation et des réalités des autres intervenants de l’industrie, elles indiquent surtout que les tensions financières amplifient les rivalités. De manière plus constructive, depuis 2011, l’ADISQ, des réseaux et des regroupements de diffuseurs ont fait le choix de discuter des conditions d’achat et de mise en marché des spectacles de chanson francophone pour définir notamment de nouvelles manières de fixer les cachets et de partager les dépenses et les surplus. Ce dialogue intrasectoriel pourrait être une occasion d’améliorer les pratiques de l’industrie du spectacle de chanson francophone. Parmi les différents facteurs explicatifs de la crise actuelle, plusieurs acteurs nomment un phénomène de suroffre de spectacles, particulièrement en chanson francophone. Ainsi, les scènes canadiennes seraient si dynamiques que le nombre de spectacles disponibles pour la diffusion serait de plus en plus important. Il est toutefois difficile de recueillir des données utilisables sur les« «spectacles en attente d’une diffusion » pour étayer une telle hypothèse. Par ailleurs, on peut se tourner vers les statistiques (figure 4) de l’OCCQ pour le Québec, qui indiquent qu’entre 2004 et 2014, le nombre de spectacles différents en chanson francophone est demeuré stable, avec une moyenne d’environ 700 par an. Pendant la même période, on a vu le nombre total des représentations connaître des hauts et des bas, mais avec une tendance tout de même à la baisse. La mise en relation des deux indicateurs suggère que le nombre de représentations par spectacle différent a aussi diminué et que, par conséquent, chaque spectacle est donc présenté moins souvent. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 36 2.4.8 Le développement des spectacles dans de petites salles Depuis quelques années, les spectacles de chanson francophone sont de plus en plus diffusés dans de petites salles : – Selon l’OCCQ, les représentations de chanson francophone dans les petites salles ont progressé de 51 % entre 2005 et 2012 (voir section 3.1.1 pour plus de détails). – Selon des décomptes internes effectués par la SODEC dans le cadre d’un bilan du volet d’aide fixe à la tournée, le nombre de lieux de diffusion ayant accueilli des représentations soutenues par le volet a progressé de 87 % entre 2003-2004 et 2011-2012. On constate une croissance des représentations dans les salles à petite jauge — particulièrement celles de moins de 200 places — et une baisse des représentations dans les salles de plus de 400 places. Les observateurs consultés formulent plusieurs hypothèses pour expliquer cette évolution marquée : – Les artistes de chanson francophone intéressent moins les publics qu’auparavant. Un artiste qui remplissait autrefois une salle de 700 places a du mal à attirer aujourd’hui 300 personnes. Les artistes de la relève, même les plus célébrés ou populaires, n’attirent pas autant les foules que pouvaient le faire leurs ainés. – Les genres se sont morcelés et on assiste à une segmentation de plus en plus pointue des publics. Dans ce cadre, il devient de plus en plus difficile de s’adresser à un large public et de remplir de grandes salles. – Les habitudes de consommation culturelle évoluent. Il est de plus en plus difficile de convaincre les spectateurs potentiels de se déplacer en salle. Pour les attirer, il est nécessaire de leur offrir une expérience enrichie. Les grands événements y parviennent, car ils offrent un lieu de communion sociale et des effets spéciaux à grand déploiement. Les petites salles favorisent une proximité avec l’artiste, une intimité recherchée. Entre ces deux extrêmes, l’expérience offerte semble moins attirante. Les diffuseurs se sont apparemment ajustés. Il y a dix ans, un diffuseur pluridisciplinaire pouvait se contenter d’un seul espace, la plupart du temps une grande salle de plus de 700 places, pour sa programmation en chanson. Aujourd’hui, plusieurs de ces diffuseurs se sont adaptés en s’adjoignant des petites ou des moyennes salles, parfois en partenariat avec des lieux inusités (écoles, bars, restaurants, etc.) ou en aménageant leurs salles avec une configuration plus restreinte, plus intime. L’intérêt pour ces petites salles n’est pas seulement qu’elles proposent une ambiance plus intime; elles reflètent un modèle d’affaire où les revenus de bar sont proportionnellement plus importants. En effet, la plupart de ces petits lieux de diffusion adoptent une formule de type cabaret. Un diffuseur pluridisciplinaire, expérimenté dans le secteur, résumait ainsi son modèle d’affaires : – Une salle de 150 places. – Des billets en vente entre 20 $ et 40 $. – Un cachet entre 1 000 $ et 3 000 $. – Un technicien et deux ou trois personnes à l’accueil. – Les revenus de bar couvrent l’ensemble des frais de salle. Ce modèle d’affaires se rapproche beaucoup de celui des salles privées, en location, que l’on retrouve dans les milieux urbains, ou encore de certains bars présentant une programmation de spectacles. Les revenus connexes du bar et de la restauration peuvent ainsi équivaloir aux revenus de billetterie. Les producteurs de spectacles ont également adapté leur offre aux nouvelles réalités économiques, en proposant notamment le même spectacle en des formules variées (solo, un ou plusieurs musiciens, scénographie plus ou moins élaborée, etc.). Cette flexibilité conduit un Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 37 « même spectacle » à être présenté dans des salles aux jauges et aux configurations différentes, pour un cachet qui peut varier considérablement selon le contexte. 2.4.9 L’évolution des publics Les acteurs de l’industrie affirment pour la plupart que les publics sont moins nombreux et moins assidus aux spectacles de chanson francophone. Les explications avancées peuvent être rangées en deux catégories, démographique ou identitaire : – Au plan démographique, la population francophone est tout simplement moins nombreuse sur certains territoires. Dans le cas de Montréal, la classe moyenne francophone a migré vers la banlieue. Pour d’autres régions ou territoires, c’est le dépeuplement qui en serait la cause. Un diffuseur d’une de ces régions québécoises soulignait que depuis la construction de sa salle, la population du territoire desservi a diminué des deux tiers. Cette réduction des populations s’accompagne généralement d’une paupérisation des communautés et de leur vieillissement. – On fait remarquer aussi que la génération des baby-boomers qui avait une propension à fréquenter les salles de spectacle a bien sûr vieilli et sortirait désormais moins. Les générations suivantes n’ont pas les mêmes habitudes de consommation culturelle et forment aussi des cohortes beaucoup moins importantes en nombre. – Sur le plan identitaire, la chanson francophone ne serait plus autant l’expression du militantisme francophone qui a connu son apogée dans les années 70. Certains observateurs notent qu’à l’échelle du pays, les jeunes générations cherchent avant tout un bon spectacle et que le fait qu’il soit en français ou en anglais avait beaucoup moins d’importance que pour leurs ainés. – Au Québec, plusieurs intervenants ont souligné l’émergence d’une fierté culturelle qui ne dépend pas nécessairement du découpage linguistique : on va ainsi voir un artiste québécois, qu’il soit francophone ou anglophone, chanter en français ou pas. Bien involontairement, le témoignage d’un diffuseur d’une banlieue de Montréal nous a illustré le phénomène. Alors qu’il s’affairait à faire la liste des spectacles de chanson francophone diffusés dans le cadre de sa programmation, il finit par réaliser que son décompte était celui des chanteurs et des groupes québécois, mais qu’une part très significative d’entre eux chantait en anglais. Ces éléments interprétatifs devraient également prendre en compte l’évolution des goûts des publics et la concurrence exercée par d’autres formes de spectacles comme l’humour ou la chanson anglophone. Ce sujet n’a toutefois pas fait l’objet d’études récentes. Toutefois, un sondage61 réalisé en 2012 pour le Partenariat du Quartier des spectacles de Montréal propose un éclairage intéressant sur la situation dans la région métropolitaine de Montréal. Il était demandé à un échantillon de personnes ayant assisté à au moins un spectacle gratuit ou payant dans le Quartier des spectacles quel était le spectacle qu’ils étaient le plus susceptibles de fréquenter au courant de la prochaine année. 61 Document d’analyse interne du Partenariat du Quartier des spectacles : sondage DAIGLE/SAIRE-IPSOS 2012 sur la RMR de Montréal; 3 009 répondants pour une marge d’erreur maximale de ±1,78%, 19 fois sur 20. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 38 fig.5 Nature du spectacle le plus susceptible d’être fréquenté par les personnes ayant assisté à au moins un spectacle gratuit ou payant dans le Quartier des spectacles en 2012 Source : Partenariat du Quartier des spectacles, sondage DAIGLE/SAIRE-IPSOS 2012 A assisté à au moins un spectacle gratuit ou payant dans le Quartier des spectacles: 1 546 répondants pour une marge d’erreur maximale de ±2,49 %, 19 fois sur 20 Le spectacle de chanson francophone, avec 7 % des répondants, se classe au cinquième rang loin derrière l’humour (26 %) et avec près de deux fois moins de répondants que pour le spectacle de chanson anglophone (13 %). L’analyse du profil sociodémographique des répondants semble également indiquer quelques tendances : – La propension à fréquenter un spectacle de chanson francophone augmente avec l’âge (50 à 70 ans) tandis qu’elle est plus forte chez les jeunes pour la chanson anglophone (moins de 50 ans); – Les personnes ayant comme langue d’usage l’anglais étaient beaucoup plus susceptibles de fréquenter un spectacle de chanson anglophone (13 %) qu’un spectacle de chanson francophone (2 %); – Les personnes ayant comme langue d’usage le français étaient aussi susceptibles de fréquenter un spectacle de chanson anglophone (12 %) que francophone (11 %). Les résultats du sondage du Partenariat du Quartier des spectacles62 traduisent la situation du Quartier des spectacles de Montréal. Toutefois, ils semblent conformes aux tendances rapportées par les acteurs de l’industrie à l’échelle du Canada. Au-delà des explications plus ou moins exhaustives et variées qui nous ont été proposées, les acteurs de l’industrie insistent aussi sur l’importance de l’évolution du paysage médiatique, et sur les changements liés au rôle toujours plus significatif d’Internet dans le façonnage de l’identité culturelle des publics. 62 Le Quartier des spectacles est situé au centre-ville de Montréal. C’est le c ur culturel de la métropole. On y trouve la plus forte concentration et la plus grande diversité de lieux culturels en Amérique du Nord avec notamment 80 lieux de diffusion, 8 places publiques animées et plus de 40 festivals. 26% 16% 15% 13% 7% 7% 7% 6% 3% Humour Théâtre Musique actuelle, du monde, jazz, électro, etc. Chanson anglophone Chanson francophone Musique classique et opéra Comédie musicale et music-hall Cirque et magie Danse Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 41 communauté d’amis, mais aussi au-delà, au travers d’outils comme Twitter ou Tumblr.». Selon plusieurs observateurs de l’industrie, ce type de tendance a déjà induit des changements dans la manière de faire la promotion et la mise en marché des artistes. Dans l’univers internet 2.0, les artistes sont de plus en plus appelés à contribuer pour construire leur auditoire à coup de messages personnels, voire personnalisés. Le modèle de la campagne de presse nationale, avec des entrevues standardisées, existe toujours, mais les fondements mêmes des médias traditionnels de masse sont ébranlés en étant eux-mêmes filtrés par les prescripteurs algorithmiques des réseaux sociaux auxquels se réfèrent leurs lecteurs cibles — ou leurs téléspectateurs cibles, dans le cas des chaînes de télévision généralistes. Rappelons que ce sont ces médias de masse qui ont contribué à forger le « star système » québécois tel qu’on l’a connu jusqu’à maintenant. Alors que certains acteurs voient dans l’émergence de ce phénomène, une forme de «dictature de la demande », où les goûts et profils du plus grand dénominateur commun menacent de remonter à la source et d’uniformiser l’offre culturelle, d’autres soulignent, au contraire, que cela laisse une nouvelle place à la diversité et à une forme de spécialisation. À titre d’exemple, la musique rap francophone, issue de la scène montréalaise, a une très faible visibilité dans les médias traditionnels. Pourtant, ces artistes remplissent régulièrement une salle de 950 places comme le Club Soda, située au centre-ville de Montréal, avec l’essentiel de leur promotion qui passe par l’entremise des médias communautaires virtuels. Même si le rôle des prescripteurs professionnels s’est réduit quelque peu dans les médias traditionnels, personne ne prédit leur disparition complète. On les retrouve maintenant sur d’autres plateformes, notamment les blogues et les médias sociaux. Dans un environnement de plus en plus complexe, les publics semblent de manière générale accorder une importance renouvelée aux choix des diffuseurs de proximité, que ce soit à Montréal, avec des salles emblématiques dans les quartiers centraux, ou en région où des diffuseurs développent des programmations originales suivies par leurs publics. En ce sens, mais à un autre niveau, les programmateurs de festivals de chanson jouent également le rôle de prescripteurs auprès du public. L’enquête récente sur les festivals au Québec69 souligne d’ailleurs que parmi les objectifs auxquels les festivals de musique accordent le plus de valeur, on retrouve aux deux premiers rangs « soutenir des artistes émergents » et « découvrir de nouveaux répertoires et uvres ». C’est donc dire que le facteur de différenciation joue ici un rôle. Souvent perçus comme des chefs de file, ils ont une influence certaine auprès de leurs pairs ou auprès des programmateurs des salles de spectacle. Ces diffuseurs qui sont pour la plupart regroupés en réseaux se concertent à l’occasion des vitrines de spectacles ou bien de manière informelle, sur une base affinitaire, tout comme le font les simples amateurs de chanson francophone. 69 Claude Audet et Diane St-Pierre. Mars 2015, «Les festivals de musique au Québec, Résultats d’une enquête», Bulletin de la recherche et de la statistique, no 26, Ministère de la culture et des communications du Québec Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 42 2.5 LE SOUTIEN PUBLIC 2.5.1 Un aperçu des aides publiques consacrées au spectacle de chanson francophone Un grand nombre d’acteurs publics tant du palier fédéral, que des provinces et des municipalités sont susceptibles d’intervenir pour soutenir la production et la diffusion du spectacle de chanson francophone. La SOCAN70 liste notamment plus de trente organismes publics et parapublics subventionnant le domaine musical au Canada. Tous ces organismes — et leurs programmes — ne visent pas spécifiquement le soutien du spectacle de chanson francophone, mais c’est un bon indicateur de la complexité d’une situation où, directement ou indirectement, un grand nombre d’acteurs publics proposent un soutien sectoriel. Les sections qui suivent présentent sommairement les instances fédérales et provinciales qui soutiennent la production et la diffusion de spectacles de chanson francophone. Dans la mesure du possible, les montants des aides dédiées aux spectacles de chanson francophone sont estimés. Ce travail vise à cerner, sous forme d’ordre de grandeur, l’importance du soutien public au spectacle de chanson francophone. En ce qui concerne la diffusion, les autorités municipales jouent aussi un rôle significatif en matière de soutien, mais à l’échelle du Canada, leur nombre très élevé et la multitude des formes d’aide compliqueraient la réalisation d’une recension détaillée pour le compte de cette étude. Cela explique leur quasi-absence dans cette section, autrement que par des données globales. Ainsi, en 2009, l’Étude sur les coûts de la diffusion chez les diffuseurs pluridisciplinaires membres de RIDEAU (tableau 4) 70 SOCAN, 2015, Organisations subventionnant le domaine musical, www.socan.ca/fr/creators/member-resources/music-funding-organizations montrait que 69 % des aides publiques destinées aux diffuseurs pluridisciplinaires provenaient de sources autres que provinciales ou fédérales. Considérant que 97 % de cette somme était issue du palier municipal, cette part équivaudrait donc à 64 %. Le tableau présente la répartition de toutes ces aides publiques par palier. tab.4 Montant total et part des aides publiques par palier gouvernemental pour l’ensemble des diffuseurs pluridisciplinaires au Québec en 2008 Gouvernement fédéral 2 594 489 $ 9 % Gouvernement provincial 6 726 998 $ 22 % Autres aides publiques* 20 736 376 $ 69 % Programmes disciplinaires 228 132 $ 1 % Total des aides publiques 30 057 862 $ 100 % * 93 % de ces autres aides proviennent du palier municipal Sources : Étude sur les coûts de la diffusion chez les diffuseurs pluridisciplinaires membres de RIDEAU, septembre 2009, DS 20|07. Ajoutons qu’il existe de nombreuses fêtes et événements populaires à caractère local ou régional qui présentent des spectacles de chanson francophone. Ils sont souvent organisés par des municipalités ou bénéficient de leur soutien financier ou opérationnel. Nous tiendrons donc compte de cette contribution lors de l’estimation finale du soutien public à l’industrie du spectacle de chanson francophone qui sera détaillée dans la section 2.5.8. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 43 2.5.2 Soutien du gouvernement fédéral FONDS DE LA MUSIQUE DU CANADA Le Fonds de la musique du Canada (FMC) est un des piliers du cadre stratégique fédéral d’appui à la musique canadienne. Il vise à rehausser l’accès des Canadiens à un choix diversifié d’ uvres musicales canadiennes en renforçant la capacité de l’industrie à soutenir la concurrence et à exceller tant sur le marché national que sur la scène internationale. Le budget annuel du FMC est de 24,6 millions de dollars. Musicaction Musicaction a vu le jour en 1985, suite à l’initiative des radiodiffuseurs privés et des professionnels de l’industrie du disque et du spectacle. Sa mission première : contribuer au développement de la musique francophone d’ici en offrant un soutien financier aux artistes canadiens. L’organisme met à la disposition des acteurs et à l'industrie canadienne indépendante une panoplie d’instruments dont l’objectif commun est de favoriser l’essor et le rayonnement de la création musicale proprement canadienne. Son champ d’action est assez vaste; allant de la production d’enregistrements sonores à la réalisation d’initiatives collectives sur les marchés internationaux, en passant par l’appui à la commercialisation d’albums, le soutien aux activités scéniques, ainsi que la promotion des artistes des communautés francophones en situation minoritaire. Musicaction administre deux volets du Fonds de la musique du Canada : le volet Nouvelles uvres musicales et le volet Initiatives collectives. Le budget annuel de Musicaction est constitué d'une contribution annuelle de près de six millions de dollars du ministère du Patrimoine canadien (FMC) et de trois millions de dollars provenant des contributions au titre du développement du contenu canadien versée par les radiodiffuseurs privés, incluant ceux par satellite. Bell Média, Cogeco Diffusion, RNC Media et SiriusXM sont de ce nombre. Musicaction administre également le Fonds RadioStar destiné à la commercialisation de la musique de langue française. Ce fonds est financé en totalité par les contributions des radiodiffuseurs privés. Nouvelles uvres musicales Deux programmes de Musicaction soutiennent les activités liées au spectacle dans le cadre du volet Nouvelles uvres musicales. Le programme Commercialisation nationale soutient des activités scéniques (vitrines, premières parties et spectacles) ainsi que des activités de promotion et de production d’images (vidéoclips). En matière d’activités scéniques, outre les spectacles en musique vocale francophone, le programme soutient également la musique non vocale qui inclut la musique instrumentale, la musique classique et les musiques du monde autres que francophones. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 46 Développement des marchés internationaux Le programme de développement des marchés internationaux est destiné à des initiatives collectives visant le développement de la carrière d’artistes canadiens à l’étranger. Ces deux volets (Volet 1 – Vitrines internationales et Volet 2 – Promotion collective) ainsi que sa mesure ponctuelle (Accueil de professionnels étrangers) ont tous le même objectif : accroître la circulation des artistes à l’international. L’investissement total de ce programme a été de 327 985 $, dont la majeure partie vise la présentation et la promotion de vitrines à l’international. De ce montant, 308 985 $ ont été consacrés à la chanson francophone. Au total, le soutien de Musicaction par l’entremise des programmes Accès à la scène Québec – Volet 1, Vitrines musicales et Développement des marchés internationaux, programmes d’Initiatives collectives consacrés au soutien du spectacle de chanson francophone, est d’environ1,4 millions de dollars en 2014- 2015. Volet entrepreneur de la musique En plus des volets Nouvelles uvres musicales et Initiatives collectives, le FMC compte le Volet entrepreneur de la musique (VEM) qui offre une aide financière aux entrepreneurs canadiens établis de la musique pour qu'ils bâtissent une industrie vigoureuse et viable. Il permet aux entrepreneurs canadiens de la musique d'offrir une gamme diversifiée de choix musicaux qui enrichissent l'expérience musicale canadienne à long terme, d’être plus concurrentiels sur la scène nationale et internationale et de se tailler une place de premier plan dans une économie mondiale numérisée. Le budget annuel du VEM est de 9,5 millions de dollars. Les coûts liés aux tournées nationales et internationales font partie des dépenses admissibles au volet. Toutefois, les contributions du volet étant octroyées sous forme d'enveloppe globale pour la réalisation de l'ensemble d'un plan d'activité, il n'est pas possible d'isoler quelle part de la contribution a été affectée à des activités de spectacle. Autres programmes de Patrimoine canadien Outre le FMC, le ministère du Patrimoine canadien administre depuis 2001 le Fonds du Canada pour la présentation des arts (FCPA). Ce programme fournit du financement aux organismes à but non lucratif qui présentent des festivals artistiques, aux diffuseurs qui présentent des saisons de spectacles professionnels, ainsi qu'aux organismes qui les soutiennent. Depuis 2001-2002, le nombre d'organismes bénéficiant du soutien du FPCA a triplé pour atteindre 600 organismes de diffusion dans plus de 250 communautés. En 2014, 71 % des demandes au FCPA concernaient des activités en musique (instrumentale et chanson). Dix ans auparavant, cette proportion était de 52 %. Le FCPA soutient les festivals artistiques et les diffuseurs de saisons de spectacles professionnels, dans toutes les disciplines des arts. La grande majorité des diffuseurs financés sont des diffuseurs pluridisciplinaires. En 2013-2014, le FCPA a octroyé 28 millions de dollars au total. De cette somme, 4 millions de dollars ont été distribués à des organismes francophones qui étaient des diffuseurs pluridisciplinaires ou des festivals de chanson dont la programmation était dominée par la chanson francophone. Nous retiendrons comme estimation que 4 millions de dollars issus du FCPA sont consacrés au soutien du spectacle de chanson francophone. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 47 tab.8 Montants du FCPA octroyés à des organismes francophones de diffusion pluridisciplinaire et aux festivals de chanson en 2013-2014 Diffuseurs Festivals Total Québec 2 351 350 $ 387 000 $ 2 738 350 $ Autres provinces 948 400 $ 384 605 $ 1 313 005 $ Total 3 279 750 $ 771 605 $ 4 051 355 $ Source : Programme du Fonds du Canada pour la présentation des arts, Direction des Programmes et développement des arts, Direction générale de la Politique des arts, Ministère du Patrimoine canadien Compilation DAIGLE / SAIRE Outre le FCPA, le ministère du Patrimoine canadien soutient également des festivals locaux qui présentent des uvres d'artistes et d'artisans locaux par le biais du volet festival locaux du programme Développement des arts et du patrimoine. Il n'est toutefois pas possible d'évaluer les montants d'aide affectés spécifiquement au secteur du spectacle de chanson francophone, compte tenu de la variété des festivals soutenus par le programme. Certains de ces festivals présentent des spectacles de chanson en français. Le festival Francophonie en fête de Toronto, par exemple, présentait en 2014 une programmation artistique comprenant Les Cowboys fringants, Radio Radio et Mélanie Brulée, une artiste originaire de Cornwall, basée à Toronto. FONDS RADIOSTAR Le volet Commercialisation nationale du Fonds RadioStar apporte une aide aux activités de promotion d’un album, incluant du tour support et des sommes spécifiques en soutien aux activités scéniques. Ce fonds, financé par les radiodiffuseurs privés, est administré par Musicaction. tab.9 Aides apportés par le Fonds RadioStar pour la commercialisation nationale de spectacles de musique vocale francophone entre 2010-2011 et 2014-2015 Spectacle Promotion Total Tournée Tour support Total 2014-2015 570 402 $ 56 250 $ 626 652 $ 1 663 815 $ 2 290 467 $ 2013-2014 542 210 $ 56 836 $ 599 046 $ 2 496 668 $ 3 095 714 $ 2012-2013 380 302 $ 35 406 $ 415 708 $ 1 746 304 $ 2 162 012 $ 2011-2012 391 764 $ 50 689 $ 442 453 $ 1 195 734 $ 1 638 187 $ 2010-2011 285 929 $ 84 346 $ 370 275 $ 1 443 667 $ 1 813 942 $ Source : Musicaction, analyse interne En incluant le tour support, le soutien aux activités scéniques était, en moyenne, de 0,4 million de dollars par année jusqu’en 2012-2013. Ensuite, l’aide maximale pour le spectacle a été majorée dans le cadre du programme. En tenant compte de cette hausse, le soutien devrait se situer davantage autour de 0,6 million de dollars par année comme en 2013-2014 et 2014-2015. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 48 2.5.3 Soutien des gouvernements provinciaux Les gouvernements provinciaux développent des actions de soutien à la culture et aux arts. Toutefois, les mesures qui ciblent spécifiquement le spectacle de chanson sont généralement difficiles à isoler. La Société de développement des entreprises culturelles En 2013-2014, la SODEC a octroyé près de 10 millions de dollars aux entreprises et artistes des secteurs de la musique et des variétés du Québec. Il est à noter que les aides fournies par la SODEC sont accessibles à tous les artistes québécois qu’ils travaillent en français, en anglais ou dans une autre langue. tab.10 Montants versés dans le cadre des programmes d’aide en musique et variétés en 2013-2014 par la SODEC Programmes Volet 1 : Secteur industriel – aide globale – subvention (entreprises en disques, spectacles, gérance) 836 000 $ Soutien aux activités de gérance 275 500 $ Aide aux projets 485 500 $ Soutien additionnel à la tournée (artistes/groupes) 2 518 951 $ Soutien additionnel aux activités en nouveaux médias 500 000 $ Programme de sensibilisation à la chanson et de diffusion pour le milieu collégial 2013-2014 251 698 $ Programme d'aide aux associations et aux regroupements nationaux 2013-2014 399 500 $ Aide à la diffusion en variétés Volet 1 : Aide aux évènenements nationaux et internationaux 2 128 000 $ Volet 2 : Aide à la programmation d'un diffuseur 221 000 $ Programme de soutien aux immobilisations 2013-2014 230 000 $ Volet 2.2 : Soutien à la tournée de spectacles de variétés hors Québec (Sodexport) 1 844 525 $ TOTAL 9 690 674 $ Source : Rapport annuel SODEC 2013-2014 Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 51 Ministère de la Culture et des Communications du Québec Le ministère de la Culture et des Communications du Québec administre74 depuis plusieurs années une aide au fonctionnement destinée aux diffuseurs pluridisciplinaires en arts de la scène. Le Programme d'aide au fonctionnement pour les diffuseurs pluridisciplinaires en arts de la scène a pour objectifs de permettre aux diffuseurs de maintenir une diversité disciplinaire des spectacles professionnels, d'augmenter le niveau de leurs activités visant à développer des publics pour les arts de la scène et d'accroître la fréquentation de leurs salles de spectacles. En 2013-2014, 93 diffuseurs pluridisciplinaires du Québec se sont partagé 5,3 millions de dollars dans le cadre de ce programme. Parmi les règles d’admissibilité du programme, le diffuseur doit démontrer un certain niveau d’activité et diffuser une variété de spectacles professionnels issus des quatre disciplines suivantes : théâtre, danse, musique, chanson. Selon l’Étude sur les coûts de la diffusion chez les diffuseurs pluridisciplinaires membres de RIDEAU75, les représentations en chanson représentent 57 % du nombre total de représentations (en théâtre, danse, musique et chanson) des diffuseurs soutenus au fonctionnement. Entre 2010 et 2014, selon les décomptes internes de RIDEAU, la part des représentations en chanson a varié entre 36% et 42% du nombre total de représentations en théâtre, danse, musique, et chanson de l’ensemble des membres de RIDEAU. Sur la base de ces informations, nous avons estimé que 40 % du soutien du Programme d'aide au fonctionnement pour les diffuseurs pluridisciplinaires en arts de la scène contribuent à la 74 Depuis 2014-2015, ce programme a été pris en charge par le Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ). 75 Étude sur les coûts de la diffusion chez les diffuseurs pluridisciplinaires membres de RIDEAU, septembre 2009, DS 20|07. présentation de spectacles de chanson francophone, ce qui correspond à environ 2,1 millions de dollars. Autres programmes provinciaux Un survol sommaire des ministères provinciaux responsables des arts et de la culture permet de dresser la liste des agences et des programmes qui fournissent des fonds aux artistes de la musique ou qui soutiennent la présentation de spectacles. Au Nouveau-Brunswick, le ministère Tourisme, Patrimoine et culture est responsable du soutien à la culture. Ce ministère offre le programme Musique - accès au marché qui couvre une partie des coûts associés aux activités de présentation de vitrines, au développement professionnel, à la tournée et au développement de marchés. Ce ministère offre également la subvention Arts et industries culturelles - Fonds d'initiatives stratégiques qui permet de couvrir une partie des frais associés aux projets, aux activités et aux initiatives qualifiées d'approches innovatrices pouvant consolider la contribution économique/stratégique du secteur culturel et artistique du Nouveau- Brunswick. Le secteur Culture du ministère a reçu 5 millions de dollars en 2013-2014, soit 13 % du budget total de 37 millions du ministère. En Nouvelle-Écosse, le ministère des Communautés, de la Culture et du Patrimoine supervise deux programmes : Support4Culture dont les fonds proviennent de la vente de produits de loterie spéciaux par la Société des loteries et du casino de la Nouvelle-Écosse et Arts Nouvelle- Écosse, l'agence provinciale de financement pour les artistes professionnels, les organismes artistiques et les programmes d'éducation artistique. Le ministère gère également le Industry Growth Program qui supporte des projets d’exportation et soutient notamment la participation à des vitrines musicales et à des tournées. Au total, le ministère a dépensé 14 millions de dollars au chapitre de la culture et du patrimoine en 2013- 2014. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 52 À l’Île-du-Prince-Édouard, le ministère du Tourisme et de la Culture soutient une agence indépendante, le Conseil des arts de l’Île-du- Prince-Édouard, qui offre des bourses aux artistes uvrant en artisanat, danse, film, arts multidisciplinaires, musique, théâtre, arts visuels et écriture. Toutefois, selon l’information disponible sur leur site web, aucune bourse n’a été décernée pour soutenir une tournée ou un spectacle depuis 2005. Les artistes de la musique peuvent recevoir du financement de Music PEI qui propose, grâce au soutien du ministère du Tourisme et de la Culture de l’Île, différents programmes de subventions. L’organisme offre les programmes Emerging Music, Export Development et Career Investment qui soutiennent tous les projets de tournée et de participation à des vitrines musicales. Le gouvernement de l’Ontario offre, par l’entremise de la Société de développement de l’industrie des médias de l’Ontario (SODIMO) le Fonds ontarien pour la promotion de la musique (FOPM), un programme de subventions mis en place en 2013 doté d’un budget de 45 millions de dollars. Pour son budget 2015, le gouvernement a pris l’engagement de continuer à pourvoir le fonds à raison de 15 millions de dollars par année. Le FOPM comprend quatre volets dont celui intitulé Promotion des concerts qui vise à augmenter le nombre et la qualité des expériences relatives à la promotion des concerts, au bénéfice des résidents de l’Ontario, ainsi que des personnes qui visitent cette province, dans le cadre d’événements, de festivals et de concerts mettant en vedette des artistes canadiens. En 2014-2015, la SODIMO a versé un total de 2,5 millions de dollars dans le cadre de ce volet. Bien qu’il n’y ait pas d’enveloppe spécifiquement dédiée aux artistes d’expression française, le FOPM indique dans ses lignes directrices qu’une dérogation aux critères d’admissibilité peut être envisagée pour les demandes émanant d’entreprises ou d’organismes diversifiés sur le plan culturel, et de communautés autochtones ou franco-ontariennes. Au Manitoba, la Société manitobaine de développement de l'enregistrement cinématographique et sonore (Musique et film Manitoba - MFM), une société gouvernementale financée par le ministère de la Culture, du Patrimoine, du Tourisme et du Sport du Manitoba soutient les industries manitobaines du cinéma et de l'enregistrement sonore. En matière de spectacles, MFM offre le programme de soutien à l’intention des artistes exécutants qui font des tournées. Au cours de l’année 2013-2014, MFM a accordé un total de 263 543 $ à 90 demandes soumises par 50 musiciens et groupes musicaux. En Saskatchewan, le financement est assuré par Creative Saskatchewan, une agence gouvernementale établie en 2013. Creative Saskatchewan offre le Performing arts tour support grant. Auparavant, ces subventions étaient gérées par SaskMusic (The Saskatchewan Recording Industry Association), une organisation à but non lucratif qui représente toutes les composantes du secteur de la musique. SaskMusic reçoit son financement de SaskCulture Inc, lui-même financé par Saskatchewan Lotteries. En 2014-2015, Creative Saskatchewan disposait de 4,5 millions de dollars pour financer les secteurs de la musique, les médias audiovisuels, les arts visuels et l’artisanat, les livres et les arts de la scène. La musique a obtenu 22% de ce montant soit environ1 millions de dollars. En Alberta, l’Alberta Foundation for the Arts (AFA), une société de la couronne, soutient le secteur des arts. Les artistes sont soutenus par des programmes de bourses individuelles financées par le Alberta Lottery Fund. En 2013-2014, l’AFA a versé 3,5 millions de dollars à des artistes et 19,8 millions de dollars à des organisations. C’est la musique qui reçoit la part la plus importante des fonds, soit 22 %. En Colombie-Britannique, le BC Arts Council, qui relève du Ministry of Community, Sport and Cultural Development, gère les subventions destinées à divers secteurs culturels dont les arts visuels, la littérature, la danse, les arts médiatiques, la musique, le théâtre et les musées. En 2013-2014, il a accordé un total de 24 millions de dollars en Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . DESCRIPTION DE LA STRUCTURE ET DES COMPOSANTES DE L’INDUSTRIE DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 53 subventions. De cette somme, 2 millions de dollars sont allés au Touring Programs. Ce programme finance les tournées en Colombie-Britannique et à l’extérieur de la province, pour tous les arts de la scène. BC Arts Council gère également le Professional Project Assistance - Performing Arts, qui soutient le développement, la création, la production et les prestations en direct d’arts de la scène sous toutes leurs formes. À la lumière des informations disponibles, nous avons estimé l’aide publique, issue des provinces autres que le Québec, au spectacle de chanson francophone, à 0,5 millions de dollars. 2.5.4 Estimation du soutien public à l’industrie du spectacle de chanson francophone Nous estimons qu’au Canada le soutien public au spectacle de chanson francophone s’élève à environ 23,1 millions de dollars. Ce montant correspond en fait à un ordre de grandeur, puisque le montant réel pourrait certainement se situer entre 20 et 30 millions de dollars. Le tableau ci-dessous présente le détail de ce calcul. tab.14 Montant total estimé du soutien public à l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada (en millions de dollars) Gouvernement du Canada Fonds de la musique du Canada76 2,6 Musicaction Nouvelles uvres musicales Commercialisation nationale 0,7 Commercialisation internationale 0,5 Initiatives collectives 1,4 Autres programmes de Patrimoine canadien (FCPA…) 4,0 Fonds RadioStar 0,6 Gouvernements provinciaux Québec SODEC 5,6 Crédit d'impôt remboursable 4,7 Programme d'aide au fonctionnement pour les diffuseurs pluridisciplinaires en arts de la scène 2,1 Autres provinces 0,5 Municipalités 3,0 Total 23,1 76 Ce montant n’inclut pas les contributions octroyées dans le cadre du volet Entrepreneurs de la musique pour lesquelles il n’est pas possible d’isoler la part ayant servi à soutenir le spectacle de chanson francophone. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 56 Performance générale du spectacle de chanson francophone au Québec en 2014 En 2014, les spectacles de chanson francophone ont attiré plus de 670 000 spectateurs. Les 2 234 présentations ont généré des revenus de billetterie de 19,2 millions de dollars. Globalement, cette performance est inférieure à celle de la chanson anglophone qui avec seulement 1 379 représentations a attiré plus de 910 000 spectateurs et généré 39,6 millions de dollars en revenus de billetterie. Ces différences se traduisent par des niveaux de revenu moyen de billetterie par spectateur payant très différents : celui-ci est plus de la moitié (55 %) supérieur pour la chanson anglophone avec 51,89 $, contre 33,39 $ pour la chanson francophone. Une autre manière de situer la performance générale du spectacle de chanson francophone est de la comparer à celle de l’humour, une discipline au Québec qui attire très majoritairement une clientèle francophone. Avec seulement un tiers (33 %) de plus de représentations que la chanson francophone, l’humour attire deux fois et demie (151 %) plus de public et génère près de trois fois (185 %) plus de revenus de billetterie. Les niveaux de revenu moyen de billetterie par spectateur payant sont toutefois relativement similaires : 35,50 $ dans le cas de l’humour et 33,39 $ pour la chanson francophone. fig.6 Nombre de représentations, assistance totale et revenus des spectacles de chanson francophone, de chanson anglophone et d’humour au Québec en 2014 2 234 1 379 2 979 - 500 1 000 1 500 2 000 2 500 3 000 3 500 Chanson francophone Chanson anglophone Humour Nombre de représentations 671 902 910 413 1 685 898 - 500 000 1 000 000 1 500 000 2 000 000 Chanson francophone Chanson anglophone Humour Assistance totale 19 231 416 $ 39 627 893 $ 54 772 787 $ - $ 10 000 000 $ 20 000 000 $ 30 000 000 $ 40 000 000 $ 50 000 000 $ 60 000 000 $ Chanson francophone Chanson anglophone Humour Revenus Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 57 Évolution sur onze ans de la performance du spectacle de chanson francophone L’assistance totale aux spectacles de chanson francophone décline de manière relativement régulière depuis 2006, passant de 1 154 000 spectateurs à 672 000 spectateurs en 2014, soit un recul considérable de 42 %. Dès 2007, l’assistance totale aux spectacles de chanson anglophone dépasse celle de la chanson francophone. fig.7 Évolution entre 2004 et 2014 de l’assistance totale aux spectacles de chanson francophone, de chanson anglophone et de chanson dans une autre langue au Québec Le nombre de représentations de chanson francophone est resté relativement stable sur la période, avec une moyenne d’environ 2 450 représentations. Durant la même période, le nombre de représentations de spectacles de chanson anglophone augmentait de 56 %, avec un sommet de 1 742 représentations, atteint en 2011. fig.8 Évolution entre 2004 et 2014 du nombre de représentations des spectacles de chanson francophone, de chanson anglophone et de chanson dans une autre langue au Québec 0 200 000 400 000 600 000 800 000 1 000 000 1 200 000 1 400 000 1 600 000 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 Chanson francophone Chanson anglophone Chanson dans une autre langue 0 500 1 000 1 500 2 000 2 500 3 000 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 Chanson francophone Chanson anglophone Chanson dans une autre langue Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 58 Les revenus totaux de billetterie des spectacles de chanson francophone fluctuent d’année en année depuis onze ans à l’intérieur d’une fourchette relativement stable se situant entre 20 millions de dollars et 30 millions de dollars. Par contre, les revenus totaux de billetterie des spectacles de chanson anglophone ont connu une croissance importante entre 2006 et 2012, atteignant un sommet en 2011 avec plus de 71 millions de dollars. fig.9 Évolution entre 2004 et 2014 des revenus totaux de billetterie des spectacles de chanson francophone, de chanson anglophone et de chanson dans une autre langue au Québec Pour mieux comprendre, la performance économique du spectacle de chanson francophone sur une si longue période, il convient de tenir compte de l’inflation. Si on indexe les revenus totaux selon l’indice des prix à la consommation au Québec de Statistique Canada (CANSIM) pour obtenir des résultats en dollars constants de 2014, on constate, au-delà des fluctuations annuelles, une baisse relativement continue de la valeur des revenus de billetterie. Entre 2005 et 2014 - l’année 2005 est la période ayant enregistré les revenus totaux annuels les plus importants – la baisse des revenus totaux de billetterie en dollars constants est de 46 %. Sur les onze années, en appliquant un modèle de régression linéaire, on obtient un coefficient négatif traduisant une baisse moyenne annualisée de près de 2,2 %. fig.10 Évolution entre 2004 et 2014 des revenus totaux de billetterie des spectacles de chanson francophone en dollars de 2014 (indexation selon IPC du Québec) 0 $ 10 000 000 $ 20 000 000 $ 30 000 000 $ 40 000 000 $ 50 000 000 $ 60 000 000 $ 70 000 000 $ 80 000 000 $ 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 Chanson francophone Chanson anglophone Chanson dans une autre langue 0 $ 5 000 000 $ 10 000 000 $ 15 000 000 $ 20 000 000 $ 25 000 000 $ 30 000 000 $ 35 000 000 $ 40 000 000 $ 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 Revenus totaux Linéaire (Revenus totaux) Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 61 En indexant les revenus selon l’indice des prix à la consommation au Québec et en introduisant une droite de régression linéaire sur onze ans, on observe, tel qu’illustré à la figure 14, la baisse de la valeur des revenus de billetterie des spectacles de chanson francophone présentés dans les moyennes et grandes salles. À l’inverse, on constate la progression de la valeur des revenus pour les petites salles. fig.14 Évolution entre 2004 et 2014 de revenus totaux de billetterie des spectacles de chanson francophone en dollars de 2014 (indexation selon IPC du Québec) au Québec selon la taille des salles Finalement, il est à remarquer que la baisse des revenus totaux de billetterie s’explique essentiellement par une baisse du niveau d’assistance puisque le revenu moyen de billetterie par spectateur a progressé au rythme de l’indice des prix à la consommation. Entre 2004 et 2014, les revenus moyens de billetterie par spectateur payant sont respectivement passés de 16,86 $ à 21,24 $ dans les petites salles, de 25,18 $ à 28,67 $ dans les moyennes salles et de 29,23 $ à 39,53 $ pour les grandes salles. fig.15 Évolution entre 2004 et 2014 du revenu moyen de billetterie par spectateur payant de chanson francophone, selon la taille de la salle et l’indice des prix à la consommation du Québec (base 100 en 2004) $- $5 000 000 $10 000 000 $15 000 000 $20 000 000 $25 000 000 $30 000 000 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 Petites salles Moyennes salles Grandes salles Linéaire (Petites salles) Linéaire (Moyennes salles) Linéaire (Grandes salles) 90 100 110 120 130 140 150 160 170 180 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 Petites salles Moyennes salles Grandes salles IPC Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 62 3.1.2 Centres urbains, banlieues et régions L’évolution de l’assistance aux spectacles de chanson francophone peut différer selon les zones géographiques. L’OCCQ79 soulignait récemment qu’on observait un déplacement de la fréquentation à l’intérieur de la région métropolitaine de recensement (RMR) de Montréal. Dans le cas spécifique de la chanson francophone, les auteurs soulignent que l’analyse de la répartition de l’assistance aux spectacles dans la RMR de Montréal de 2005 à 2013 tend à valider l’hypothèse de la baisse des parts de marché des salles situées sur l’île de Montréal au profit des salles situées en périphérie. Ainsi, la part de l’assistance des spectacles sur l’île de Montréal — excluant le Quartier des spectacles — est passée de 40 % entre 2005 et 2007 à 30 % entre 2011 et 2013, principalement au profit de la Rive-Nord de Montréal (21 % à 24 %) et de la Rive-Sud de Montréal (6 % à 13 %). L’explication la plus couramment avancée pour comprendre ces déplacements est d’ordre démographique : les francophones délaissent l’île de Montréal pour résider en banlieue. Toutefois, lorsque l’on examine les données des recensements de la population entre 1991 et 2011, la population francophone n’a que légèrement décliné sur l’île de Montréal (-4 %). Pour point de comparaison, l’assistance totale80 aux spectacles de chanson francophone dans le Quartier des spectacles de Montréal a baissé de 57 % en presque vingt ans, passant de 194 000 spectateurs en 1995 à 84 000 spectateurs en 2014. Le fléchissement de la population francophone ne saurait donc expliquer seul la baisse encore plus marquée de la fréquentation des spectacles. 79 OCCQ, septembre 2014, Déplacement de la fréquentation dans la région métropolitaine de recensement de Montréal, Optique Culture, numéro 34, p.17. 80 Données fournies par le Partenariat du Quartier des spectacles, décompte de l’OCCQ. tab.15 Évolution de la population francophone entre 1991 et 2011 selon plusieurs territoires de la RMR de Montréal 1991 2001 2006 2011 Île de Montréal 979 960 830 105 955 800 936 815 Laval 244 230 233 630 257 475 259 090 Rive-Nord 294 660 470 390 547 115 608 200 Rive-Sud 536 608 575 625 726 310 694 210 Source : Statistique Canada, Profil des divisions et subdivisions de recensement du Québec 1991. Partie B, Volumes 1 et 2. Ville de Montréal, Annuaire statistique de l'Agglomération de Montréal. Recensement 2001, 2006, 2011. Compilation DAIGLE / SAIRE La croissance de 45 % de la population francophone en banlieue de Montréal entre 1991 et 2011 n’est pas non plus le seul aspect à prendre en compte quand vient le temps d’expliquer l’accroissement des parts de marché des diffuseurs des banlieues. L’autonomisation « culturelle » des banlieues est un phénomène qui s’affirme. La classe moyenne attirée par les banlieues représente un poids économique supérieur à son poids démographique. Cet effet multiplicateur favorise le développement des commerces et des services, y compris culturels, dans ces territoires. Autre phénomène, ces municipalités en plein essor ont rivalisé afin d’offrir à leurs citoyens une offre de services accrus, ce qui en a conduit plusieurs à soutenir les activités de leur diffuseur de spectacles. Aussi, plusieurs municipalités se sont dotées de nouvelles salles de spectacles qui sont souvent mieux équipées et plus confortables que celles que l’on Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 63 retrouve sur l’île de Montréal. Ces salles peuvent également compter sur un accès plus aisé en voiture et un stationnement plus facile, en comparaison de leurs cons urs situées au centre-ville. Ainsi, l’identité des banlieues s’émancipe de la référence urbaine et tend à devenir le modèle implicite dominant. Les gens habitant les seconde et troisième couronnes (Ste-Thérèse, St-Jérôme, St-Jean-sur-Richelieu, etc.) s’arrêtent de plus en plus souvent à la première couronne pour leur consommation culturelle. C’est ainsi que la mobilité entre Montréal et ses banlieues diminue, y compris chez les jeunes : il n’est plus nécessaire de venir au c ur de l’île de Montréal pour assister à des spectacles, notamment ceux de chanson francophone. Ce portait général ne signifie pas pour autant que le spectacle de chanson francophone connait une croissance forte à l’extérieur de Montréal. Réseau Scènes, un réseau qui regroupe près d’une trentaine de diffuseurs à l’échelle du Québec, dont la majorité est dans la grande région de Montréal (un seul est situé dans la ville de Montréal), compile depuis plusieurs années des statistiques. Entre 2009-2010 et 2013- 2014, les chiffres pour les spectacles et les représentations de chanson francophone ont augmenté respectivement de 29 % et de 27 %. Sur la même période, le nombre de spectateurs pour la chanson francophone n’a progressé que de 9 %. Sur la même échelle de temps, la croissance du nombre de spectacles, de représentations et de spectateurs pour les spectacles de chanson anglophone est considérable. Cependant, même avec une progression de 147 %, le nombre total de spectateurs en 2013-2014 n’est que de 22 000, soit environ le quart (28 %) du nombre de spectateurs pour la chanson francophone. tab.16 Évolution du nombre de spectacles, de représentations et de spectateurs pour les spectacles de chanson francophone et anglophone chez les diffuseurs de Réseau Scènes entre 2009-2010 et 2013-2014 2009-10 2010-11 2011-12 2012-13 2013-14 Représentations Chanson francophone 280 294 280 340 356 Chanson anglophone 27 80 105 72 101 Spectateurs Chanson francophone 71 949 73 623 69 259 75 180 78 559 Chanson anglophone 9 047 25 580 29 779 19 940 21 889 Spectacles Chanson francophone 123 130 119 138 159 Chanson anglophone 15 28 42 42 50 Source : Réseau Scènes, Rapport annuel 2013-2014. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 66 spectacles présentés doivent provenir de plus d’une province ou d’un territoire canadien. Élargissement des marchés En 2009, le gouvernement fédéral lançait le programme des Vitrines musicales dans le cadre de la Feuille de route pour les langues officielles du Canada. Le programme, administré par Musicaction par l’intermédiaire du Fonds de la musique du Canada, est destiné à soutenir le développement de la carrière des artistes francophones en situation minoritaire en finançant leurs activités scéniques, au Canada et à l’international. En tirant profit des réseaux de diffusion structurés, le programme a permis à des artistes des communautés de se produire dans de nouveaux marchés, tant dans leur province que dans d’autres provinces. Il a également soutenu la présence de ces artistes à l’extérieur du pays : en 2014-2015, par exemple, 14 artistes présentaient à l’international 100 spectacles et vitrines musicales. Pour certains acteurs de l’industrie, cette ouverture vers la scène internationale est le développement le plus important des dernières années. Elle les amène à reconsidérer le positionnement des différents marchés géographiques dans leurs stratégies. En Ontario par exemple, l’Alliance nationale de l’industrie musicale (ANIM), l’Association des professionnels de la chanson et de la musique (APCM) et Réseau Ontario (RO) ont mis sur pied l’Initiative de promotion de l’industrie musicale francophone de l’Ontario — l’Initiative de promotion à l’international de la musique francophone ontarienne (IPIMFO) —afin de développer un plan d’action pour positionner l’industrie musicale francophone ontarienne sur les différentes échelles : provinciale, nationale et internationale. À l’est, la Stratégie de promotion des artistes acadiens sur la scène internationale (SPAASI) de la Société Nationale de l'Acadie (SNA) vise à promouvoir les artistes acadiens du Canada atlantique auprès d'acheteurs internationaux potentiels. Elle est à l’origine de la création du Centre de ressources international et acadien (CRIA), un guichet unique, en ligne, qui regroupe toutes les informations pertinentes quant aux structures et au fonctionnement des divers réseaux qui composent l'ensemble des marchés des différentes industries culturelles acadiennes et européennes. Des bases fragiles Certains indicateurs témoignent du succès du marché hors Québec à soutenir le développement de la carrière des artistes issus des communautés francophones. Ainsi, on constate qu’un nombre grandissant d’entre eux s’illustre au Québec. Tout en conservant une identité culturelle forte, ils réussissent à s’inscrire davantage dans la modernité comme le souligne Jean-Benoit Nadeau: « Le folklore? Très peu pour cette génération rafraîchissante… ou déconcertante, pour quiconque perçoit les francophones des autres provinces comme de lointains cousins des campagnes un peu démodés. Plutôt que de « swigner la bacaisse dans le fond de la boîte à bois », Radio Radio rappe en chiac et Lisa LeBlanc flirte avec le folk trash. L’Ontarien Damien Robitaille fait un malheur en « croonant » sans complexe avec son accent de la baie Georgienne. » 85 En s’autoproduisant et en combinant diverses activités – le développement d’une offre pour enfants par exemple – certains artistes maintiennent une carrière convenable, parfois même sans passer par le Québec qui n’est plus considéré comme le passage obligé par tous. 85 Jean Benoit Nadeau, Francophonie : la belle effronterie, L’Actualité, 11 mars 2013. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 67 Ayant pris acte de ces succès, on constate qu’une analyse plus approfondie serait nécessaire pour réussir à mesurer précisément le rôle qu’a joué chacune des stratégies déployées par les différents acteurs institutionnels et privés, ainsi que les effets des financements publics injectés dans l’industrie au fil des années. Cependant, il subsiste des failles structurelles sur lesquelles repose cette industrie et leur analyse permet d’en démontrer la fragilité : – faiblesse des ressources techniques (salles et équipements vétustes) et humaines (beaucoup de bénévolat, du personnel surtout voué au développement communautaire) à la disposition des réseaux de diffusion; – dispersion des marchés avec des contrastes importants entre les milieux ruraux et urbains; – faible rentabilité des activités, dans un contexte où les auditoires atteignent rarement plus de 100 personnes; – un marché important, le Québec, entré dans une phase de transformation qui le rend moins enclin à la prise de risque avec des artistes inconnus; – non-renouvellement des publics : une nouvelle génération moins attachée à son identité culturelle que les précédentes et davantage exposée aux grands succès internationaux qu’à la production locale; – des structures dépendantes des fonds publics. Conscients de cette fragilité et bien au fait de la nouvelle réalité économique, les acteurs du milieu se tournent vers de nouvelles avenues de développement : exploration de nouveaux lieux de diffusion pas forcément destinés au spectacle (églises, chapelles, lieux touristiques, lofts-appartements, terrasses, etc.), nouveaux usages pour le spectacle de musique comme la médiation culturelle, regroupement de diffuseurs pour l’organisation de tournées interprovinciales, développement de stratégies internationales, par exemple. Ils envisagent également de tirer profit des transformations de leur écosystème : développement des publics grâce à l’immigration francophone dans leurs propres territoires, exploitation des nouveaux marchés numériques, ouverture à de nouveaux genres musicaux, entre autres. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 68 3.2 MARCHÉS HORS CANADA 3.2.1 Dynamique des marchés hors Canada pour le spectacle de chanson francophone L’information économique sur l’exportation du spectacle de chanson francophone sur les marchés hors Canada est peu développée. D’après une analyse réalisée par Musicaction sur les contributions accordées entre 2008 et 2012 dans le cadre de son programme Commercialisation internationale, la France s’avère sans surprise le marché extérieur dominant pour le spectacle de chanson francophone canadien : – Trois pays européens francophones (France, Belgique, Suisse) se partagent près de 60 % des sommes accordées tandis que le Royaume-Uni capte 9 % des montants. – La moitié des activités cible la France comme unique destination ou dans le cadre d’un circuit combinant plusieurs pays. – Les demandes ciblant les États-Unis augmentent légèrement chaque année (une majorité de ces demandes va à la musique vocale traditionnelle86). – La catégorie Europe/USA est essentiellement constituée de projets visant la promotion de catalogues (jeunesse par exemple). 86 La musique traditionnelle désigne des musiques associées à une culture nationale, régionale ou géographique. Elle se différencie de la musique dite folklorique car elle ne vise pas à montrer le passé d'une musique, mais à faire vivre les musiques appartenant à un patrimoine de la culture populaire. fig.16 Répartition de l’enveloppe globale en musique vocale francophone du volet Commercialisation internationale de Musicaction, de 2008 à 2012 41% 1%6% 3% 0,4%2% 5% 0,4% 1%1% 0,5% 9% 11% 20% France France-Allemagne France-Belgique France-Suisse Roumanie Royaume-Uni Suisse Allemagne Asie Belgique Espagne États-Unis Europe / plusieurs pays Europe / USA Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 71 Le dernier volet89 de l’opus annuel des statistiques sur la diffusion de spectacles soulignait les faits et les tendances suivantes : – À l’échelle de la France, on dénombre en 2013, 51 000 représentations payantes pour 23,3 millions d’entrées et 723 millions d’euros de billetterie. Par rapport à 2012, les revenus de billetterie progressent de 13 % et la fréquentation des représentations payantes de 9 %. – 20 % de la fréquentation totale et 16 % de la billetterie sont attribués aux festivals alors qu’ils ne représentent que 10 % des représentations payantes. – 52 % des représentations ont lieu dans des salles de spectacles spécialisées dans les variétés. – 60 % des représentations comptent moins de 200 entrées, mais celles qui comptent plus de 1 500 entrées représentent 62 % de la billetterie et 48 % de la fréquentation. – 50 % des représentations payantes ont lieu en Île-de-France pour 45 % du total des recettes de billetterie. – 10 organisateurs de spectacles sur les 3 619 déclarants concentrent 37 % des recettes avec seulement 4 % du nombre total de représentations. Qu’est-ce que ces statistiques peuvent signifier pour le marché de la chanson francophone? En apparence, la dynamique économique semble favorable, mais seuls les lieux de grande jauge connaissent une forte croissance. Plus encore que les festivals, ce sont les tournées et les gros évènements qui tirent la fréquentation et les recettes de billetterie à la hausse. On semble assister à une concentration toujours plus 89 CNV, Hors-série septembre 2014, La diffusion des spectacles de variétés et de musique actuelle en 2013, CNV info. importante des recettes et de la fréquentation autour de quelques grands spectacles qui pour la majorité mettent au premier plan des vedettes internationales qui vraisemblablement chantent en anglais. Toutefois, la progression des résultats s’explique aussi par les bonnes performances de tournées réalisées dans des lieux de grande capacité90 présents sur le territoire français. Parmi ces artistes, on compte un grand nombre d’artistes français à fort potentiel commercial comme Mylène Farmer, Michel Sardou, Serge Lama, Patrick Bruel, M, Indochine, Vanessa Paradis, Marc Lavoine, Patricia Kaas, etc. Ce sont les représentations payantes qui ont réuni plus de 3 000 entrées qui expliquent la progression des résultats : leur nombre progresse de 20 %, leur fréquentation de 22 % et les revenus de billetterie de 29 %. À l’opposé, les représentations qui ont réuni moins de 200 entrées ont connu une baisse globale de leur billetterie. Des lectures contrastées de la dynamique de l’industrie du spectacle de chanson francophone Affirmer que l’industrie du spectacle de chanson en France ou de France se porte bien ne signifie pas que le spectacle de chanson francophone est en santé. Globalement, comme nous venons de le voir, les indicateurs économiques témoignent d’une situation en expansion où le spectacle de chanson connait une croissance en France, mais aussi à l’international. En 2012, le chiffre d’affaires des producteurs de spectacles français attribuable à l’exportation91 était de 27 millions d’euros, en progression de près de 30 % par rapport à 2011. Ces 90 Il est question de salles de plus de 3 000 places. Par exemple, le réseau des Zénith comprend dix-sept salles en France dont les jauges varient de 6 000 à 12 000 places. 91 Bureauexport, Dossier de presse 2014, Les chiffres export 2012, Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 72 exportations sont tournées à 70 % vers l’Europe et à 30 % hors de l’Europe. Toutefois, ce dynamisme tient en partie au fait que de plus en plus d’artistes se tournent vers l’anglais pour leur carrière internationale, mais également nationale. Par exemple, le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel92 (CSA) constatait en 2013 que dans la plupart des grands festivals français93, les artistes étrangers étaient surreprésentés par rapport aux artistes français, mais aussi que ces derniers chantaient majoritairement en anglais (encadré 2). Privilégier l’anglais est pour certains un choix artistique, pour d’autres, c’est une alternative de carrière qui ouvre de nouvelles perspectives économiques. Cette internationalisation de la chanson française — pas francophone, dans ce cas-ci — est d’ailleurs régulièrement saluée comme contribuant au rayonnement culturel de la France. 92 Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA). Décembre 2013, L’exposition des musiques actuelles par les radios musicales privées – États des lieux et perspectives. 93 La dynamique festivalière est très forte en France où l’on dénombre 1 400 festivals. La présence des chanteurs nationaux serait plus importante dans les petits festivals. Selon des décomptes fournis par la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM), en 2014, pour les concerts et les spectacles de musiques actuelles (rock, pop, électro, jazz, rap, musiques du monde, etc.), les uvres de créateurs membres de la SACEM ont représenté près de 68 % des titres qui ont bénéficié d’une répartition (en augmentation de 4 % par rapport à 2013), et les uvres d’origine étrangère un peu moins de 32%. À l’échelle des concerts et des spectacles, ce sont donc majoritairement les uvres de créateurs français qui sont jouées. Toutefois, il n’est pas possible de savoir si les uvres sont chantées en français ou en anglais. Encadré 2 Présence des artistes français dans quelques festivals de l’été 2013 SOLIDAYS Hippodrome de Longchamp, du 28 au 30 juin 2013 Le festival Solidays est une manifestation de lutte contre le SIDA qui a lieu chaque année. Créé en 1999, l'édition 2013 a rassemblé 170 000 festivaliers sur trois jours. Sur 92 artistes qui se sont produits lors du festival : 52 artistes sont français et 40 artistes sont étrangers. Sur les 52 artistes français du festival : 16 artistes s'expriment en français et 36 s'expriment en anglais. LES EUROCKEENNES Belfort, du 4 au 7 juillet 2013, Créé en 1989, l'édition 2013 a rassemblé 127 000 festivaliers sur quatre jours. Sur 74 artistes qui se sont produits lors du festival : 30 artistes sont français et 44 artistes sont étrangers. Sur les 30 artistes français du festival : 9 artistes s'expriment en français et 21 s'expriment en anglais. FRANCOFOLIES La Rochelle, du 10 au 14 juillet 2013 Fondé en 1985, le festival est spécialisé dans la promotion de la musique française. Sur 97 artistes qui se sont produits lors du festival : 84 artistes sont français et 13 artistes sont étrangers. Sur les 84 artistes français du festival : 64 artistes s'expriment en français et 20 s'expriment en anglais. ROCK EN SEINE Domaine national de Saint Cloud, du 23 au 25 août 2013 Créé le 27 août 2003, l'édition 2013 a accueilli 118 000 festivaliers. Sur 56 artistes qui se sont produits lors du festival : 9 artistes sont français et 47 artistes sont étrangers. Sur les 9 artistes français du festival : 2 artistes s'expriment en français et 7 s'expriment en anglais. Source : Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA). Décembre 2013, L’exposition des musiques actuelles par les radios musicales privées – États des lieux et perspectives, p.40. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 73 Certains observateurs consultés tentent de relativiser le succès de la chanson française en anglais. Ils notent que parmi les artistes qui remplissent de grandes salles en France, dans le cadre de tournées, la grande majorité d’entre eux chante en français. Ils relèvent qu’un genre musical dynamique comme le rap, très apprécié des jeunes et des communautés culturelles, se chante généralement en français. Finalement, ils brandissent la réussite internationale de jeunes artistes comme Stromae ou encore Zaz pour démontrer la vitalité de la chanson française. D’autres observateurs s’inquiètent du phénomène. Ils soulignent que le problème ne se situe pas au niveau de la création, toujours très vivante, mais au niveau de la diffusion : le spectacle de chanson francophone a du mal à attirer les foules. Les chanteurs qui remplissent de grandes salles sont souvent des artistes établis qui ont construit leur notoriété voici plusieurs années. Certains dénoncent une forme de snobisme qui conduirait certains programmateurs à ignorer une chanson francophone jugée a priori « ringarde ». Une illustration symbolique de cette désaffection des foules pour la chanson francophone est l’introduction d’une programmation en anglais dans des festivals comme les Francofolies de La Rochelle ou de SPA, des évènements historiquement associés à la promotion de la chanson francophone. Plusieurs arguments sont invoqués pour justifier cette trajectoire festivalière : – Dans un contexte de forte concurrence entre les évènements et les festivals régionaux, il est nécessaire de disposer de « grosses » têtes d’affiche qu’il est difficile de trouver parmi les artistes de la chanson francophone. – La volonté de soutenir une relève culturelle locale et nationale pousse les organisateurs à accueillir des artistes français ou belges talentueux qui ont fait le choix de chanter en anglais. – Afin de renouveler ou d’élargir les publics, il est nécessaire de proposer une programmation en anglais. Les spectateurs seront ensuite exposés, et peut-être convertis, à la chanson francophone. Les arguments des uns et des autres s’entrecroisent et, faute de statistiques précises, il n’est pas possible de statuer sur l’état du marché du spectacle de chanson francophone. Toutefois, le simple fait qu’il n’y ait pas eu d’étude récente sur le sujet ou que l’on ne prenne pas en compte la dimension linguistique dans le cadre des mesures de performance de l’industrie pourrait suggérer que le spectacle de chanson francophone n’est généralement pas perçu comme menacé. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . PORTRAIT DES MARCHÉS DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 76 Ces premières visites ne sont qu’un premier pas dans la conquête d’un nouveau marché. Les intervenants soulignent aussi que les démarches doivent être soutenues et persistantes pour être efficaces. Pour plusieurs, les artistes canadiens ne peuvent demeurer assez longtemps en Europe faute de ressources financières pour espérer bénéficier des retombées de leurs efforts. Les risques sur le plan financier et sur la conduite de la carrière sont très importants. D’un point de vue tactique, certains observateurs pensent qu’il serait préférable de concentrer les efforts sur un plus petit nombre d’artistes, mais mieux préparés et disposant de ressources suffisantes pour approfondir leurs efforts sur le nouveau marché à conquérir. Depuis des années, les artistes canadiens ont démontré qu’ils pouvaient séduire les publics européens. Toutefois, ces succès n’ont pas permis de créer une filière durable qui guiderait les démarches des nouveaux venus. Les réussites servent d’exemple et les professionnels tirent des enseignements de certains échecs. Le marché de l’Europe francophone est plus que jamais attirant, mais toujours aussi difficile à conquérir. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . IMPORTANCE ÉCONOMIQUE DE L’INDUSTRIE DU SPECTACLE DE CHANSON AU CANADA DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 77 IMPORTANCE ÉCONOMIQUE DE L’INDUSTRIE DU SPECTACLE DE CHANSON FRANCOPHONE AU CANADA 4.1 PRINCIPAUX FLUX FINANCIERS L’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada est alimentée par deux principales sources de revenus : – les revenus commerciaux qui incluent, pour la diffusion, les revenus de billetterie et d’autres revenus connexes (essentiellement les revenus de bar, de restauration, de stationnement, etc.) et, pour la production, les revenus de la vente des spectacles; – les aides publiques qui soutiennent le secteur tant au niveau de la diffusion que de la production et qui sont estimées à 23,1 millions de dollars à la section 2.5.8. Pour établir le niveau des principaux flux financiers de l’industrie, nous avons eu recours à trois types d’information : – le montant des revenus de billetterie de l’OCCQ; – les montants estimés des aides publiques; – les informations fournies par les acteurs de l’industrie, quant aux flux financiers (revenus et dépenses). Pour ces derniers, dans le cadre des entrevues, nous leur demandions de réagir à des budgets-types pour mieux situer leur réalité. C’était dans bien des cas un exercice complexe, car il leur était difficile d’isoler le spectacle de chanson francophone de l’ensemble de leurs activités. Les hypothèses que nous présentons découlent donc d’un travail d’analyse, mais également d’étalonnage des flux financiers au regard d’une enquête non statistique. Cette approche vise donc avant tout à fixer des ordres de grandeur, de manière à illustrer l’empreinte économique de l’industrie et pouvoir ensuite estimer ses impacts économiques. Les principales hypothèses retenues pour illustrer les flux financiers100 sont : – Les revenus de billetterie fluctuent considérablement d’une année sur l’autre. Nous avons retenu comme base de calcul la moyenne des cinq dernières années des revenus de billetterie des spectacles de chanson francophone au Québec, tel que calculée par l’OCCQ, soit 24,8 millions de dollars. – Les revenus connexes associés à ces spectacles tarifés sont évalués à 35 % des revenus de billetterie, soit 8,7 millions de dollars. – Les revenus des bars et lieux inusités au Québec — non pris en compte par l’étude de l’OCCQ — sont estimés à 25 % du total des revenus des spectacles couverts par l’OCCQ. – Les revenus des autres provinces canadiennes sont estimés de manière à représenter 20 % du total canadien. – Les revenus liés à la vente de spectacles sont estimés à 25 % des revenus totaux de la fonction de diffusion (billetterie, revenus connexes et aides publiques). Ainsi, dans le cas particulier des spectacles non tarifés où les revenus liés à la vente de spectacles sont estimés à 4,2 millions de dollars, les revenus totaux des diffuseurs sont évalués à 16,7 millions de dollars. 100 Dans le cadre de la simulation les montants des flux financiers ne sont pas arrondis. Toutefois, lors de la présentation des résultats, les montants sont arrondis à une décimale ce qui peut se traduire par la différence apparente entre le montant total d’un ensemble et la somme de ses parties. Ces différences s'expliquent par un écart d'arrondi. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . IMPORTANCE ÉCONOMIQUE DE L’INDUSTRIE DU SPECTACLE DE CHANSON AU CANADA DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 78 – Les revenus liés à la vente de spectacles à l’étranger équivalent à 10 % des revenus récoltés au Canada. – Les revenus liés à la vente de spectacles non tarifés (fêtes, festivals, etc.) équivalent à un tiers des revenus de la vente des spectacles tarifés. – Les aides publiques ont été attribuées selon la nature des programmes aux fonctions diffusion et production. Sur la base de ces quelques hypothèses, l’empreinte économique du secteur de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada est d’environ 114 millions de dollars à l’échelle du Canada : environ 80 millions de dollars pour la fonction de diffusion et plus de 34 millions de dollars pour la fonction de production. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . IMPORTANCE ÉCONOMIQUE DE L’INDUSTRIE DU SPECTACLE DE CHANSON AU CANADA DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 81 Le modèle intersectoriel du Québec est un modèle dit linéaire c’est-à- dire qu’il permet de lier par des proportions le niveau des impacts économiques et celui des dépenses. Ainsi, puisque 80 % des dépenses des acteurs du secteur se réalisent au Québec, 80 % de l’impact économique calculé peut être associé à cette province. Le modèle intersectoriel du Québec permet de simuler des impacts économiques pour l’économie québécoise. Pour les dépenses effectuées dans les autres provinces, les résultats sont des estimations à prendre à titre indicatif. 4.2.3 Impacts économiques L’impact économique des dépenses d'exploitation liées aux activités du secteur de l'industrie du spectacle de chanson francophone pour l'année 2015 représente une création ou une consolidation de plus de 1 500 emplois-année au Canada dont 1 200 au Québec et 300 dans les autres provinces. L’effet total est de plus de 86 millions de dollars en valeur ajoutée c’est- à-dire en revenus pour les entreprises et les ménages à l’échelle du pays. Le Québec bénéficie d’un effet de 69 millions de dollars en valeur ajoutée et les autres provinces de 17 millions de dollars. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . IMPORTANCE ÉCONOMIQUE DE L’INDUSTRIE DU SPECTACLE DE CHANSON AU CANADA DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 82 Tab.17 Impact économique des dépenses d'exploitation liées aux activités du secteur de l'industrie du spectacle de chanson francophone pour l'année 2015 Québec Autres provinces * Canada * Catégorie Effets directs Effets indirects Effets totaux Effets directs Effets indirects Effets totaux Effets directs Effets indirects Effets totaux Main-d' uvre (années-personnes) 645 590 1 235 161 147 309 806 737 1 543 Salariés 360 387 748 90 97 187 451 484 934 Autres travailleurs 285 203 487 71 51 122 356 253 609 En milliers de dollars de 2015 Valeur ajoutée au coût des facteurs 33 404 35 614 69 018 8 351 8 903 17 254 41 755 44 517 86 272 Salaires et gages avant impôts 13 087 14 842 27 929 3 272 3 711 6 982 16 359 18 553 34 912 Revenus mixtes bruts 10 750 8 065 18 814 2 687 2 016 4 704 13 437 10 081 23 518 Autres revenus bruts avant impôts 9 567 12 707 22 274 2 392 3 177 5 569 11 959 15 884 27 843 Autres productions 63 63 16 16 78 78 Subventions -5 353 -5 353 -1 338 -1 338 -6 692 -6 692 Taxes indirectes 762 762 190 190 952 952 Importations 10 791 10 791 2 698 2 698 13 489 13 489 * Estimation sur la base du modèle intersectoriel du Québec exploité par l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . IMPORTANCE ÉCONOMIQUE DE L’INDUSTRIE DU SPECTACLE DE CHANSON AU CANADA DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 83 Par ailleurs, ces dépenses permettent au gouvernement du Canada de percevoir près de 2,9 millions de dollars en revenus gouvernementaux fiscaux et parafiscaux. Le gouvernement du Québec reçoit, quant à lui, 7 millions de dollars en revenus fiscaux et parafiscaux, tandis que les autres provinces perçoivent près de 1,8 million de dollars en revenus fiscaux et parafiscaux. Les dépenses d'exploitation liées aux activités du secteur de l'industrie du spectacle de chanson francophone étant estimées sur une base annualisée, l’impact économique évalué se renouvellera année après année. Tab.18 Impact économique des dépenses d'exploitation liées aux activités du secteur de l'industrie du spectacle de chanson francophone pour l'année 2015 sur les revenus des gouvernements provinciaux et fédéral (en milliers de dollars de 2015) Québec Autres provinces * Canada * Catégorie Effets directs Effets indirects Effets totaux Effets directs Effets indirects Effets totaux Effets directs Effets indirects Effets totaux Revenus du gouvernement provincial 893 1 690 2 583 223 423 646 1 116 2 113 3 229 Parafiscalité provinciale 2 080 2 348 4 428 520 587 1 107 2 600 2 936 5 536 Total provincial 2 973 4 039 7 012 743 1 010 1 753 3 716 5 049 8 765 Revenus du gouvernement du Canada 486 800 1 287 122 200 322 608 1 000 1 608 Parafiscalité fédérale (assurance- emploi) 484 529 1 013 121 132 253 605 662 1 267 Total fédéral 970 1 330 2 300 243 332 575 1 213 1 662 2 875 Total 3 943 5 368 9 312 986 1 342 2 328 4 929 6 710 11 639 * Estimation sur la base du modèle intersectoriel du Québec exploité par l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . ÉLÉMENTS DE CONCLUSION DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 86 Changements structurels : vers de nouveaux modèles Au-delà de simples fluctuations statistiques, plusieurs indicateurs pointent vers des changements structuraux importants dans l’industrie de la musique, ce que certains de nos interlocuteurs ont qualifié de « fin du modèle traditionnel ». La tournée était historiquement déployée davantage comme un véhicule promotionnel pour mousser la vente des disques. Puis elle est devenue de plus en plus une source de revenus directs pour l’artiste, grâce à la vente sur place des disques et de produits dérivés. Dans le modèle traditionnel, le cycle de carrière d’un artiste suit un parcours relativement stable : production et mise en vente d’un album, préparation d’un spectacle, rodage du spectacle, rentrée montréalaise; en cas de succès, tournée majeure pouvant occuper une année entière et conclusion par une tournée des événements et des festivals. Dans le contexte actuel où l’album n’est plus forcément l’élément central de la carrière d’un artiste, et où l’on constate une augmentation de l’offre de spectacles de chanson, toutes les étapes se télescopent. La durée de vie des albums comme des spectacles tend à se raccourcir. En 1996-1997, selon une étude de la SODEC, le spectacle et les ventes de disques représentaient respectivement 20 % et 54 % des revenus des entreprises qui déclaraient des revenus de diverses sources du secteur de la musique (enregistrements, spectacles, gérance, etc.). En 2013-2014, selon une autre étude de la SODEC, cette proportion s’est inversée, passant à 50 % pour le spectacle et à 14 % pour l’enregistrement sonore. Les changements profonds dans la structure des revenus ne s’apparentent pas à un simple rééquilibrage. Même si le spectacle joue un rôle de plus en plus central dans le développement des carrières des artistes de la chanson francophone, les pertes de revenus liés à l’enregistrement sonore n’ont pas été compensées, en chiffres absolus, par l’accroissement du pourcentage des revenus liés aux spectacles. Les revenus de billetterie en dollars constants des spectacles de chanson francophone ont même diminué de près 2,2 % en moyenne chaque année depuis 2004. Un changement structurel aussi important et aussi rapide semble avoir pris beaucoup d’acteurs au dépourvu et laissé de vives cicatrices. Malgré cette profonde transformation, pour plusieurs, le modèle dit traditionnel — celui qui prévalait avant l’émergence d’internet et des enregistreurs numériques — reste la référence implicite à partir de laquelle ils tentent de comprendre la situation actuelle. Toutefois, une nouvelle génération d’acteurs de l’industrie du spectacle de la chanson francophone, qui n’a pas connu l’âge d’or du modèle traditionnel, a appris à composer avec sa transformation. Pour les plus anciens, la grande majorité d’entre eux ont su s’adapter. Plusieurs entreprises ont ainsi développé des stratégies centrées sur les artistes, regroupant presque tous les services — production de disque, de spectacle, gérance d’artiste, agence de spectacle, édition — sous un même toit, avec pour résultat des économies d’échelle et, surtout, une diversification des sources de revenus. Pour les plus petits joueurs, c’est la nécessité qui les pousse à assumer une multiplicité de fonctions, faute de moyens suffisants pour s’adjoindre des services professionnels spécialisés; on peut alors parler d’une stratégie de diversification émergente. Dans le cas de la strate des entreprises mieux structurées, comme les maisons de disques, cette stratégie de diversification est délibérée et planifiée Selon une étude de la SODEC qui utilise des données récoltées dans le cadre de son Programme d’aide aux entreprises en musique et variétés (PADISQ), pour l’année financière 2013-2014, cette diversification des activités semble rapporter. Ce sont en effet les entreprises aux activités diversifiées qui affichent les meilleures marges bénéficiaires avant impôt (15,1 %), alors que celles qui se spécialisent en spectacle ne dégagent qu’une marge de 2,7 %, soit un résultat qui ne reflète pas une situation financière particulièrement solide. Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . ÉLÉMENTS DE CONCLUSION DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 87 L’importance de l’aide publique Tous les intervenants consultés dans le cadre de la présente étude ont souligné l’importance des aides publiques dont les montants versés font souvent la différence entre produire ou non un spectacle, entre le programmer ou non. Mais l’effet de ces apports va bien au-delà de la dimension strictement monétaire; elle est particulièrement structurante sur le développement des réseaux de diffusion formels et informels, tant au Canada qu’à l’étranger ainsi que sur la capacité des entreprises de production de soutenir la carrière d’artistes canadiens et le développement d’une offre musicale francophone diversifiée. Dans tous les cas, on constate qu’il y a un grand nombre d’instances tant au niveau fédéral, provincial que municipal qui sont susceptibles d’intervenir pour soutenir les acteurs de la production et de la diffusion du spectacle de chanson francophone. Nous estimons qu’au Canada le soutien public au spectacle de chanson francophone s’élève à environ 23,1 millions de dollars. Ce montant correspond en fait à un ordre de grandeur, puisque le montant réel pourrait certainement se situer entre 20 et 30 millions de dollars. Dans le cadre de cette étude, il n’a pas été possible d’isoler ou d’évaluer l’impact de chacune des aides publiques, mais globalement les acteurs consultés font ressortir que la diffusion de la chanson francophone au Canada est de mieux en mieux structurée notamment grâce au développement de canaux ou des réseaux de diffusion efficaces. Également, la visibilité des artistes issus de la francophonie canadienne n’a jamais été aussi grande au Québec comme dans d’autres régions du pays. Des mesures comme les aides à la tournée et à la production ont aussi un effet considérable et structurant. Finalement, les actions pour favoriser la visibilité et la diffusion des artistes de la chanson francophone à l’étranger sont jugées efficaces. On souligne, en particulier, la complémentarité, voire la complicité, des interventions publiques sur le plan canadien et québécois. Les marchés canadiens : un portrait contrasté C’est au Québec qu’il est possible de faire le portrait statistique le plus complet en raison de la disponibilité de données provenant de l’Observatoire de la culture et des communications du Québec (OCCQ). Il subsiste tout de même des trous puisque les volets gratuits des festivals ne sont pas comptabilisés, ni les spectacles de chanson présentés dans le cadre des fêtes et d’autres grands rassemblements. Les données ne comprennent pas non plus les lieux inusités où on présente parfois des prestations professionnelles, ou les bars et les plus petits lieux de spectacle qui ne répondent pas aux conditions de l’OCCQ. En 2014, au Québec, les spectacles de chanson francophone ont attiré près de 672 000 spectateurs et les 2 234 présentations ont généré des revenus de billetterie de 19,2 millions de dollars. L’assistance totale aux spectacles de chanson francophone a décliné de manière relativement régulière depuis 2006, passant de 1 154 000 spectateurs à 672 000 spectateurs en 2014, soit un recul considérable de 42 %. Le nombre de représentations est cependant resté relativement stable sur la période, avec une moyenne d’environ 2 450 représentations. Quant aux revenus totaux de billetterie, malgré des fluctuations annuelles, ceux-ci semblent généralement stagner depuis onze ans autour du palier de 25 millions de dollars, mais ils ont dans les faits diminués en moyenne de 2,2 % annuellement lorsque l’on tient compte de l’indice des prix à la consommation au Québec. La baisse des revenus totaux de billetterie s’explique essentiellement par la baisse de la fréquentation, puisque le revenu moyen de billetterie par spectateur a progressé au rythme de l’indice des prix à la consommation. La performance de la chanson francophone varie considérablement selon la taille de la salle. Ainsi les petites salles enregistrent de meilleures performances que celles de taille moyenne et grande pour les trois mêmes indicateurs (nombre de spectacles, nombre de représentations, Profil de l’industrie du spectacle de chanson francophone au Canada . ÉLÉMENTS DE CONCLUSION DAIGLE / SAIRE Rapport final / janvier 2016 / p. 88 revenus de billetterie). Toutefois leurs hausses ne compensent pas les baisses importantes enregistrées dans les autres salles. Au Québec, il y a aussi des écarts significatifs entre l’état de santé du spectacle de chanson francophone, selon que l’on observe la ville de Montréal, les banlieues de sa couronne, la ville de Québec ou d’autres régions de la province. Selon la plupart des indicateurs, on relève des baisses très marquées à Montréal, des hausses pour sa banlieue et une relative stabilité pour les autres villes et régions. Même si l’explication la plus couramment avancée pour comprendre le phénomène de déplacement des spectacles de chanson francophone vers la banlieue est d’ordre démographique — les francophones délaissant l’île de Montréal —, on note que ce facteur n’explique pas tout puisque la baisse de la fréquentation des spectacles à Montréal est largement supérieure à la diminution des populations francophone. On ne peut ignorer que plusieurs municipalités de la couronne de Montréal se sont dotées de nouvelles salles de spectacles souvent mieux équipées, plus confortables et plus accessibles que celles sur l’île de Montréal. En région, même si la baisse de fréquentation semble moins marquée, voire inexistante, la diffusion de la chanson francophone y rencontre ses propres défis. Les enjeux financiers liés aux coûts de déplacement sont notamment importants et interpellent directement les instances gouvernementales qui gèrent les programmes de soutien à la tournée. Dans les autres provinces canadiennes, les artistes des communautés francophones évoluent dans des écosystèmes culturels et artistiques qui peuvent être très distincts. D’une province ou d’un territoire à un autre, la proportion des francophones passe notamment de 0,4 % à 32,7 %. Les communautés francophones y ont progressivement créé des organismes artistiques et culturels qui représentent les intérêts des artistes au plan national, provincial ou territorial et municipal. Soutenue par diverses politiques et programmes, la constitution de ces organismes et de ces réseaux de diffusion a permis aux milieux de se structurer et d’offrir davantage de possibilités de développement aux artistes de la chanson. Les réseaux de diffuseurs de ces communautés ont notamment établi entre eux des espaces collaboratifs qui favorisent des échanges auxquels participent aussi des partenaires québécois. L’ouverture vers la scène internationale est considérée comme le développement le plus important des dernières années pour les artistes de la chanson francophone qui uvrent à l’extérieur du Québec. La diversification des marchés qui leur sont accessibles fait en sorte que certains artistes parviennent à maintenir une carrière convenable, parfois même sans passer par le Québec qui n’est plus considéré comme le passage obligé par tous. Ayant pris acte de ces développements positifs, on note qu’il subsiste des failles structurelles importantes qui dénotent encore une certaine fragilité de l’industrie dans les provinces autres que le Québec. Parmi ces failles, on cite principalement la faiblesse des ressources techniques et des expertises qui sont à la disposition des réseaux de diffusion. Ensuite, on mentionne la dispersion des communautés, la faible rentabilité des activités dans un contexte où les auditoires atteignent rarement plus de 100 personnes, le non-renouvellement des publics à la suite du vieillissement de la population et d’un désintérêt par les jeunes, et enfin une dépendance des structures aux fonds publics.
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